Accueil > Textes > Textes Non OCL > offensive répressive contre le mouvement du 15-M

Barcelone

offensive répressive contre le mouvement du 15-M

lundi 3 octobre 2011, par admi2

Ce matin à l’aube du lundi 3 octobre, la police catalane a procédé au début d’une vague d’arrestations visant 22 personnes.
Cette action policière obéit à des ordres de poursuites engagées par la Audiencia Nacional, le bras judiciaire de l’État espagnol créé en 1976 et surtout connu pour les poursuites contre ETA et la gauche abertzale basque.

Ces 22 personnes auraient été identifiées comme ayant participé aux incidents du 15 juin dernier, devant le Parlement de Catalogne, au cours d’une manifestation contre la politique budgétaire du gouvernement où des députés avaient été insultés et quelques uns un peu bousculés. D’après des sources policières citée par la presse, ils sont poursuivis pour « délit d’atteinte à de hauts organismes de la nation », les magistrats les accusant d’ « actes de force, intimidation ou menace contre des membres de la chambre législative autonome » dans le but « d’empêcher leur assistance à ses sessions et gêner leur travail ».
Ces délits sont punis de peines allant de 3 à 5 ans de prison.


Les identifications auraient été rendues possible par les images vidéo de moyens de communication et un ratissage de l’Internet. La police catalane assure avoir des « preuves graphique » solides.

Les poursuites ont été initiées par la Fiscalía provinciale [le ministère public ou procureur] et transmises à la Audiencia Nacional, qui, le 7 septembre, a accepté de prendre en charge les poursuites.

Le 15 juin dernier, le mouvement dit des “Indignés” de Barcelone avait appelé à manifester en direction du Parlement de Catalogne pour empêcher qu’il vote des mesures de coupes budgétaires prenant effet dès le 1er Juillet, et qui ont provoqué la fermeture de dispensaires, de centres d’attention psychiatrique, des baisses des salaires et des fournitures dans les hôpitaux, des restrictions supplémentaires au RMI et à tout le secteur social…

Ce jour là, 32 élus et membres du gouvernement comme le président de la Generalitat, Artur Mas et la présidente du Parlement, Núria de Gispert avaient été amenés dans l’édifice en hélicoptère.

Aussitôt, le gouvernement de Catalogne avait lancé une violente campagne politique et médiatique sécuritaire, parlant de guérilla urbaine, d’attentat à la démocratie, d’ennemis de la Catalogne, de « “kale borroka” d’une extrême violence », de sauvages (“cafres”) et qu’il fallait des punitions exemplaires… Une dizaine de personnes ont déjà été arrêtées au mois de juin et au moins 7 sont poursuivies pour « désobéissance » et « résistance à l’autorité ». Le même Puig avait ensuite fait savoir publiquement qu’il avait donné l’ordre à la police de faire des recherches systématiques sur tous les sites Internet, les comptes Facebook, Twitter et autres du mouvement dit des “Indignés” et des “antisystèmes”.

Ce qui fait désordre, c’est aussi que 6 des policiers chargés d’enquêter sur le 15M sont actuellement poursuivis pour collusion avec des narcotrafiquants et entrave à l’action de la justice. Ambiance….

CiU, droite catalaniste, a remporté les dernières élections du 28 novembre 2010 au Parlement de Catalogne sur un programme ouvertement néo-libéral et sécuritaire. Dans une surenchère répressive, le gouvernement de Catalogne et son ministre de l’Intérieur, Felip Puig, ont fait de l’action et de la présence policière, du maintien de l’ordre, de la mise au pas de la contestation (« c’en est fini de l’impunité des okupas »), une des pièces maîtresses de leur politique.

Le 27 mai, les Mossos d’Esquadra (police catalane) avaient été envoyé pour expulser la place de Catalogne. Bilan : 121 blessés dont 4 grièvement. En fin d’après-midi, des milliers de personnes ont repris possession de la place et les flics ont dû reculer et céder la place. Mais c’est clair, à Barcelone, le pouvoir politique veut la confrontation directe avec le mouvement, un mouvement multiforme qui se bat aussi bien contre les politiques de démantèlement des systèmes sociaux, de santé, d’éducation mais aussi qui poursuit les blocages de saisie-expulsion immobilières et même soutient des occupations de logements vides par des sans-logis comme récemment dans le quartier populaire du Raval où l’expulsion de 9 appartements a été bloquée par 300 personnes et ensuite suspendue par la justice. La partie est loin d’être finie.

A la mi-journée, 3 détentions étaient confirmées par la police, dont un cameraman d’une TV locale du quartier de Gracia, proche des mouvements sociaux. Ces sources policières, comme disent les médias, précisant que les autres personnes “identifiées” seront prochainement et progressivement arrêtées.

Francesco, le 3 octobre

= = = = = =

Communiqué
(Plusieurs assemblées de quartiers de Barcelone du 15M, divers collectifs et organisations
)

Contre le processus répressif visant le mouvement 15-M

Manifestation, place de Catalogne, 19 h

Voici le communiqué proposé par la commission pénale et auquel ont déjà adhéré les quartiers suivants : Casco Antiguo, Gracia, Sants y Poble Nou, Sant Andreu, Clot-Camp de l’Arpa, Poble Sec, Sarrià-San Gervasi, Sant Antoni, l’Ágora libre de L’Escala, l’Ateneo arte y cultura de la Escala, Assemblea de Drets Socials de l’Eixample, Izquierda Independentista, Confederación General del Trabajo (CGT) de Cataluña et plusieurs organisations politiques.

Devant les nombreuses informations apparues au cours des derniers jours dans les médias sur l’arrestation imminente et les poursuites judiciaires visant des membres du mouvement 15-M, fruit de la protestation qui a eu lieu le 15 juin 2011 aux portes du parc de la Ciutadella de Barcelone, nous voulons exprimer notre absolu soutien à toutes les personnes qui peuvent se voir poursuivie en représailles et notre refus du processus jurídico-politique qu’a ouvert la Audiencia Nacional.

Le ministre de l’Intérieur du gouvernement de la Generalitat, Felip Puig et le magistrat de la Audiencia Nacional, Eloy Velasco, ont impulsé avec la coopération de la Fiscalia Générale de Catalogne, une opération répressive contre un mouvement social massif qui en train de s’opposer frontalement aux politiques de coupes budgétaires dans des domaines aussi importants que l’enseignement et la santé, entre autres. De cette manière, au lieu de prêter attention au malaise citoyen qui s’étend suite à la crise et aux coupes sociales, les pouvoirs factices répondent par la répression et la criminalisation contre la dissidence. À cela, il faut ajouter le rôle fondamental qu’a eu dans cette affaire une entité si antidémocratique et si peu représentative que Manos Limpias [Mains propres, pseudo syndicat fasciste de fonctionnaires], initiateurs de la procédure à l’Audience Nationale avec la présentation d’une plainte criminelle. Ce processus s’ajoute au procès pénaux que sont en train de subir six personnes devant les tribunaux de Barcelone pour la même action de protestation.

Il faut rappeler que la Audiencia Nacional est une institution héritière du Tribunal d’Ordre Public franquiste (TOP), un tribunal d’exception utilisé historiquement dans des affaires clairement politiques. Les personnes qui affronteront cette procédure sont accusées d’un délit “Contre les Institutions de l’État”, délit qui n’a jamais été appliqué aux multiples protestations qui se sont déroulées devant plusieurs parlements autonomes, ou le Congrès des Députés ou le Sénat. Il n’a pas non plus été utilisé en 1983 quand, il faut le rappeler, une foule de militants de Convergence Démocratique de Catalogne, rassemblée aux portes du Parlement, a mené une protestation beaucoup dure que celle du 15 juin, en ce cas contre les députés du Parti des Socialistes de Catalogne. A cette époque, les dirigeants de Convergence n’ont fait aucune référence à l’honorabilité de l’une des “principales institutions du pays”.

Nous comprenons cette initiative, non pas comme une action contre des personnes spécifiques – qui en tout cas sont des boucs émissaires – mais comme une attaque contre l’ensemble du mouvement du 15M qui, avec un soutien social très élevé, est à la tête de la critique à l’actuel système de représentation politique et aux mesures économiques d’austérité néo-libérales génératrices de ségrégation et d’exclusion sociale. Ainsi, l’appel du 15 juin 2011 a été une décision prise à partir de débats publics, ouverts, transparents et horizontaux qui se sont tenus lors d’assemblées massives. C’est pour cela que nous pensons que ces poursuites constituent une attaque à tout le mouvement.

Cette protestation a été instrumentalisée et exagérée par le ministre de l’Intérieur Felip Puig et le gouvernement [de Catalogne] avec des images habilement construites comme celle de l’arrivée au Parlement en hélicoptère du président de la Generalitat et d’autres membres du gouvernement. L’objectif de Convergència i Unió (CiU) avec tous ces rideaux de fumée a été assez clair : dévier l’attention publique sur ce qui était en train de se passer à l’intérieur de l’hémicycle où commençaient les débats sur le budget antisocial absolument illégitime, d’autant qu’il ne figure dans aucun programme électoral et qu’il n’est passé par aucun référendum obligatoire. En revanche, et paradoxalement, ce sont maintenant les mêmes politiciens de CiU qui demandent ces “garanties démocratiques” et un processus de consultation des citoyens pour l’imminente réforme de la Constitution.

Cependant, le dimanche 19 de juin, une marée humaine de plus de 200.000 personnes a répondu avec force tant contre le montage politique que contre les graves coupes sociales que subit la population catalane depuis les derniers mois, en manifestant sous le mot d’ordre : “La rue est à nous, nous ne payerons pas votre crise”.

Nous réaffirmons une fois de plus, notre refus des procédures judiciaires et policières en cours contre le mouvement, nous réitérons notre soutien aux personnes mises en cause et à celles qui pourraient l’être et nous annonçons que, loin de craindre les poursuites, le mouvement 15M continuera à sortir dans la rue et à travailler pour qu’il soit bien clair que “ne sommes pas des marchandises dans les mains de politiciens et des banquiers”.

Enfin, nous lançons un appel à nous rassembler contre l’action répressive et les coupes sociales, aujourd’hui lundi, Place de Catalogne de Barcelone, à 19h.

Tous et toutes nous sommes le 15-M. 

Répondre à cet article

1 Message

  • Les interpellations se sont poursuivies à Barcelone

    Ce sont finalement 4 personnes qui ont été arrêtés la journée du lundi. Elles ont été placées dans un commissariat et interrogées. Les personnes ont refusé de faire une déposition devant la police et ont déclaré ne vouloir parler qu’à un magistrat. Elles ont été relâchées après avoir reçu la citation pour déposer devant un juge.

    La Audiencia Nacional a fait savoir dans l’après midi qu’elle n’avait jamais lancée des « ordres de détention » mais de « citation », ce qui n’est pas la même chose : tout ne serait finalement qu’une question d’interprétation… Selon un des avocats désignés dans cette affaire, les détentions sont « un outrage public, inutiles et irrégulières », car pour délivrer une citation, il n’est pas nécessaire de procéder à des arrestations.

    La manifestation appelée dans la soirée, a réuni entre 1000 et plus de 2000 personnes selon les sources, et s’est dirigée vers la place Sant Jaume, où se trouve le Palau de la Generalitat. Les slogans les plus entendus : « Audiencia Nacional, nous n’avons pas peur », « Notre meilleurs arme, la solidarité », « Moi aussi j’étais au Parlement », « S’ils touchent à l’un [d’entre nous], ils touchent à tous ». Un communiqué a été lu ainsi qu’un appel à manifester de nouveau jeudi.

    Mardi 4/10. Quatre autres personnes ont été arrêtées ce jour, trois à Barcelone et une à Granollers (30 km). D’après une « source » judicaire, le motif de l’action juridico-policière serait un besoin de vérification par photos car les « preuves » contre les personnes identifiées seraient insuffisantes et qu’il manquerait des images concluantes.

    Les défenseurs des personnes poursuivies ont réitéré leurs critiques sur les opérations « non nécessaires » et les formes qu’elles ont prises : dans plusieurs cas, les Mossos d’Esquadra sont intervenus en civil, les visages recouverts par des passe-montagnes, comme s’il s’agissait d’une affaire hautement risquée. Ils rappellent qu’il n’y a aucune obligation à faire une déposition devant la police et que celle-ci peut se contenter de remettre en mains propres les citations.

    Mercredi 5/10. Deux personnes ont été arrêtées dans la matinée, ce qui porte à 10 le nombre des personnes “identifiées” ayant été interpellées.

    A suivre…

    repondre message


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette