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Israéliens contre l’État d’Israël

« Nous sommes des réservistes israéliens. Nous refusons de servir »

dimanche 10 août 2014, par WXYZ


L’appel de réservistes israéliens contre leur incorporation dans l’armée d’occupation qui aujourd’hui et une fois de plus, massacre massivement à Gaza, réprime en Cisjordanie et en Israël, et poursuit la domination la plus brutale de l’État d’Israël sur les territoires et la population de Palestine et son cortège d’usurpation, de dépossession, de destructions.
Informations et témoignages de juifs israéliens qui font mentir la fable de l’unité des ‟juifs” d’Israël (et d’ailleurs) derrière le pseudo-‟État juif” et qui montrent combien se battre aux côtés des Palestiniens, contre le sionisme et le militarisme, n’a rien à voir avec l’antisémitisme, qu’il faut séparer le judaïsme ou la judaïté et le sionisme, que la “question palestinienne” est avant tout celle de la nature coloniale et ségrégationniste de cet État, de sa politique et de l’état de guerre permanent qui en découlent, de toute la machine de propagande et de mensonges qu’il développe et répand, des massacres et des crimes de guerre qu’il commet sans cesse, dans la plus parfaite impunité, depuis des décennies, et qu’il s’agit là d’une question et d’un combat éminemment politiques.

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Des réservistes israéliens disent non

C’est le sens d’une lettre publiée d’abord sur le site en ligne de Yesh Gvul (« Il y a une limite », en français), une organisation anti-occupation qui soutient les objecteurs de conscience, dont le texte et ses signataires (51 soldats réservistes israéliens) a ensuite été relayé par le Washington Post. Ils s’étaient mis d’accord pour publier cette lettre avant le début de l’assaut contre Gaza.
Déserteurs, objecteurs de conscience, ces « refuzniks » refusent de servir dans les territoires occupés ou de combattre dans les rangs de l’armée israélienne contre les Palestiniens. Pour cela, ils et elles risquent la prison.

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Protestation à Haïfa contre l’opération israélienne à Gaza le 19 juillet 2014. Photo par Rami Shllush


« Nous sommes des réservistes israéliens. Nous refusons de servir ».

Washington Post, 23 juillet 2014

Chaque fois qu’Israël mobilise des réservistes – qui sont constitués d’ex-soldats – il y a des dissidents, des résistants, des déserteurs parmi les troupes envoyées à la guerre. Maintenant qu’Israël a de nouveau envoyé des soldats à Gaza et rappelé les réservistes, des dizaines de personnes ont refusé d’y participer.

Nous sommes plus de 50 Israéliens qui avons été soldats autrefois et maintenant nous déclarons notre refus de faire partie de la réserve. Nous nous opposons à l’armée israélienne et à la loi sur la conscription. En partie, parce que nous rejetons catégoriquement l’opération militaire en cours. Mais la plupart des signataires ci-dessous sont des femmes et n’auraient pas participé directement au combat.

Pour nous, les méfaits de l’armée vont au-delà de l’‟Opération Bordure Protectrice” ou même de l’occupation. Nous sommes amèrement attristés par la militarisation de la société israélienne et les politiques discriminatoires de l’armée. Un exemple est la façon dont les femmes sont souvent reléguées à des postes administratifs subalternes. Un autre est le système de sélection qui discrimine les Mizrachi (juifs dont les familles sont originaires de pays arabes) en les empêchant d’être équitablement représentés dans les unités les plus prestigieuses de l’armée. Dans la société israélienne, l’unité et la position de chacun dans l’armée détermine énormément la voie professionnelle dans vie civile qui s’ouvre ensuite.

Pour nous, l’opération militaire actuelle et la façon dont la militarisation affecte la société israélienne sont inséparables.
En Israël, la guerre n’est pas simplement la politique par d’autres moyens : elle remplace la politique. Israël n’est plus capable de concevoir une solution à un conflit politique autrement que dans des termes de force physique. Pas étonnant que cela l’amène à des cycles de violence sans fin. Et lorsque les canons résonnent, plus aucune critique n’est tolérée.

Cette pétition, prévue de longue date, revêt une urgence particulière en raison de l’opération militaire brutale qui se déroule en notre nom. Et, bien que les soldats d’active soient généralement ceux qui sont engagés dans la guerre actuelle, leur travail ne serait pas possible sans l’ensemble des fonctions administratives dans lesquelles beaucoup d’entre nous ont servi. Ainsi, s’il y a une raison de s’opposer aux opérations militaires à Gaza, il y a aussi une raison de s’opposer à l’appareil militaire israélien dans son ensemble. C’est le message de cette pétition.

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Page Facebook du mouvement Yesh Gvul (Il y a une limite), 15 mars 2014

Nous avons été soldats dans des unités différentes et à des positions diverses dans l’armée israélienne, ce que nous regrettons aujourd’hui, car, pendant notre service, nous avons découvert que les troupes qui opèrent dans les territoires occupés ne sont pas les seules à renforcer les mécanismes de contrôle sur la vie des Palestiniens. En vérité, c’est tout l’appareil militaire qui est impliqué. Pour cette raison, nous refusons de remplir notre devoir de réservistes, et nous soutenons tous ceux qui refusent d’aller servir.

L’Armée israélienne, part fondamentale de la vie des Israéliens, est aussi le pouvoir qui régente la vie des Palestiniens dans les territoires occupés depuis 1967. Depuis qu’elle existe dans sa structure actuelle, son langage et sa mentalité nous contrôlent : nous partageons le monde entre le bien et le mal selon des critères militaires ; c’est l’armée qui est l’autorité décidant de la valeur relative de chaque citoyen, qui est le plus responsable de l’occupation, qui est autorisé à exprimer sa résistance contre elle et qui ne l’est pas, et la façon dont ils sont autorisés à le faire. L’armée joue un rôle central dans tous les projets et propositions discutés dans le débat national, ce qui explique l’absence de toute véritable discussion sur des solutions non-militaires aux conflits avec ses voisins dans lesquels Israël s’est enfermée à double tour.

Les habitants palestiniens de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza sont privés des droits civils et des droits de l’homme. Ils vivent sous un régime juridique différent de leurs voisins juifs. Ce n’est pas uniquement la faute des soldats qui opèrent dans ces territoires. Ces troupes ne sont donc pas les seules qui sont tenues de refuser. Beaucoup d’entre nous ont servi dans des rôles logistiques et de soutien bureaucratiques ; là, nous avons constaté que c’est l’ensemble de l’appareil militaire qui permet de mettre en œuvre l’oppression des Palestiniens.

Beaucoup de soldats qui servent dans des fonctions non-combattantes refusent de résister parce qu’ils croient que leurs actions, souvent routinières et banales, sont éloignées des conséquences violentes commises ailleurs. Et les actions qui ne sont pas banales – par exemple, les décisions concernant la vie ou la mort des Palestiniens prises dans des bureaux à plusieurs kilomètres de la Cisjordanie – sont classifiées, et il est donc difficile d’avoir un débat public à leur sujet. Malheureusement, nous n’avons pas toujours refusé d’effectuer les tâches dont nous avons été chargés, et de cette façon, nous aussi, avons contribué aux actions violentes de l’armée.

Pendant notre service, nous avons été témoins ou avons participé aux comportements discriminatoires militaires : la discrimination structurelle contre les femmes qui commence avec les bizutages et l’assignation des rôles ; le harcèlement sexuel qui était une réalité quotidienne pour certaines d’entre nous ; le contrôle militaire sur des centres de résorption de l’immigration. Certains d’entre nous ont également vu directement comment la bureaucratie dirige délibérément les étudiants techniques vers des postes techniques, sans leur donner l’opportunité de servir ailleurs. Dans nos cours de formation, nous étions placés dans des groupes de personnes qui nous ressemblaient et qui parlaient comme nous au lieu de nous mélanger et de nous socialiser comme l’armée prétend le faire.

L’armée tente de se présenter comme une institution qui facilite la mobilité sociale, comme un tremplin pour la société israélienne. En réalité, elle perpétue la ségrégation. Nous croyons que ce n’est pas un hasard si ceux qui viennent des familles de la classe moyenne-supérieure intègrent des unités du renseignement d’élite, et souvent, à partir de là, vont travailler dans des entreprises de haute technologie aux salaires élevés. Nous pensons que ce n’est pas un hasard quand les soldats envoyés dans les unités de maintenance des armes ou de militaires de troisième classe désertent ou abandonnent l’armée, souvent motivés par la nécessité de soutenir financièrement leurs familles, on les appelle « conscrits réfractaires ». L’armée met sur un piédestal l’image du ‟bon Israélien”, qui en réalité assoit son pouvoir par l’assujettissement des autres. La place centrale de l’armée dans la société israélienne et cette image idéale qu’elle fabrique, agissent ensemble pour effacer les cultures des Mizrachi, Éthiopiens, Russes, Druzes, des ultra-orthodoxes, des Bédouins et des femmes.

Nous avons tous participé, à un niveau ou à un autre, à cette idéologie et pris part au jeu du ‟bon Israélien” qui sert l’armée loyalement. Pour la plupart, notre service militaire a permis d’avancer nos positions dans l’université et sur le marché du travail. Nous avons tissé des liens et bénéficié de la chaleur enveloppante du consensus israélien. Mais pour les raisons ci-dessus, ces bénéfices n’ont pas été à la hauteur des coûts.

Légalement, certains d’entre nous sont toujours enregistrés dans les forces de l’armée de réserve (d’autres ont réussi à obtenir des exemptions ou qu’elles leur soient accordées à leur libération) et les militaires conservent nos noms et données personnelles, ainsi que la possibilité légale de nous ordonner de servir. Mais nous ne participerons pas. En aucune manière.

Il y a beaucoup de raisons différentes pour refuser de servir dans l’armée israélienne. Nous-mêmes, nous avons des contextes et des motivations différents pour écrire cette lettre. Néanmoins, contre les attaques qui frappent ceux qui résistent à la conscription, nous soutenons les résistants : les lycéens qui ont écrit une lettre déclarant leur refus, les ultra-orthodoxes protestant contre la nouvelle loi sur la conscription, les refuzniks druzes, et tous ceux dont la conscience, la situation personnelle ou économique, ne leur permettent pas de servir. Sous couvert d’un discours sur l’égalité, ces personnes sont obligées de payer le prix. Rien de plus.

Lettre suivie d’une première liste de signatures nominales de 51 réservistes de l’armée israélienne.

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Source : ici

Traduction : XYZ / OCLibertaire


Israéliens, ils refusent de porter les armes

Photographe : Martin Barzilai

Pendant toute leur scolarité, les Israéliens reçoivent dans leurs classes des militaires qui leur expliquent le rôle et l’importance de l’armée. Aujourd’hui, environ la moitié des Israéliens est enrôlée à l’âge de 18 ans (3 ans de service pour les hommes, 2 ans pour les femmes), à l’exception des Arabes israéliens (18 % de la population) et de la plupart des Juifs Haredim qui se consacrent à l’étude religieuse. On peut être exempté pour problèmes physiques ou mentaux. Les refuzniks sont objecteurs de conscience, pacifistes ou refusent de combattre dans les territoires occupés. S’ils déclarent refuser la politique d’occupation sur les territoires palestiniens lors de leur incorporation, ils sont envoyés en prison militaire pour désobéissance. En 2014, cinquante jeunes ont pris cette décision et devraient être incarcérés en octobre prochain.

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01

Yuval, 25 ans, étudiant : « J’ai décidé d’aller en prison pour protester contre l’occupation. J’ai fait trois séjours en prison militaire. Je suis content d’avoir fait cette démarche mais je ne suis pas certain que je le referais. Je n’ai pas fait quelque chose de mal, et pourtant j’ai été puni. Je ne crois pas que je méritais une telle punition. Bien entendu, nous avons utilisé la prison pour faire parler de l’occupation des territoires palestiniens. Disons que c’est une bonne façon de se battre mais il y en a peut-être de meilleures. » Tel-Aviv, 2014

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© Martin Barzilai / Sub.coop / Picturetank

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02

Tamar, 20 ans : « Je suis pacifiste. En 2008, j’ai choisi d’aller en prison pour pouvoir expliquer qu’il est possible de remettre en question le tabou du service militaire. Le plus important pour moi c’était que les gens entendent une voix différente. Je suis resté 3 mois en prison. Le dernier mois, je l’ai passé en isolement parce que je ne voulais pas porter l’uniforme. Au regard de ce qu’il se passe actuellement, je pense qu’il est d’autant plus important de refuser l’armée. La haine et l’intolérance envers ce genre de décisions sont encore plus fortes aujourd’hui qu’à ce moment-là. Le nationalisme, la propagande de droite ont fait perdre tout espoir. Ma génération a grandi sans aucun contact avec la société palestinienne. La haine vient donc plus facilement. » Tel-Aviv, 2014

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© Martin Barzilai / Sub.coop / Picturetank

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03

Kobi, 43 ans, mathématicien : « J’ai décidé de ne pas faire l’armée quand j’avais 12 ans. Je ne me sentais pas obligé de servir une société dont je ne me sentais pas faire partie. La première fois qu’ils m’ont convoqué, j’ai dit que j’étais gay, déprimé et déséquilibré. Aujourd’hui, je regrette d’avoir pris la voie la plus facile et de ne pas avoir déclaré que je refusais de servir dans l’armée. L’atmosphère en Israël devient de plus en plus irrespirable, il devient de plus en plus dangereux de manifester à Tel-Aviv contre l’occupation des territoires. » Haïfa, 2014

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04

Alex, 22 ans, travaille dans un cinéma : « À 17 ans, j’ai été dans les territoires occupés aider les Palestiniens à ramasser les olives. Ça m’a beaucoup marqué. Un jour, des colons ont volé toute la récolte de la journée. Leur argument était que tout ce qui pousse sur la terre d’Israël est aux Juifs. Il n’y a pas d’instance juridique pour régler ce genre de problème. J’ai compris que l’argument de la sécurité pour occuper la Palestine était un mensonge. J’ai décidé que je ne ferais pas le service militaire. J’ai passé cinq mois en prison pour désobéissance. » Tel-Aviv, 2009

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05

Ben, 27 ans, employé de vidéoclub : « Mon père a passé 40 jours en prison parce qu’il ne voulait pas servir l’armée à Gaza. Quand ça a été mon tour, je n’ai pas voulu y aller non plus. J’ai dit à l’officier chargé des problèmes mentaux que je ne voulais pas porter d’arme et que s’ils m’y obligeaient je l’utiliserais contre mes supérieurs. Cette décision a été l’une des plus importantes de ma vie. Quand je vois tous ces jeunes qui meurent pour la cause sioniste, je ne peux que me réjouir de ma décision. J’aimerais pouvoir sentir de la compassion pour ces soldats, mais honnêtement, je ne peux pas : quand ils appuient sur la gâchette et tirent sur des civils, c’est impardonnable. » Tel-Aviv, 2014

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06

Omer, 20 ans, étudiante : « Le système de l’armée fonctionne bien. Il ne laisse pas le temps de réfléchir. Je pense que les jeunes Israéliens doivent connaître la situation des Palestiniens pour pouvoir choisir s’ils font ou non l’armée. Mon père est un général important, il a été vice-président du Mossad. Nous sommes à l’opposé l’un de l’autre. J’ai passé deux mois en prison. Mon cas a fait beaucoup de bruit. Ça a été difficile, j’ai perdu cinq kilos. » Tel-Aviv, 2009

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07

Haggai, 26 ans, journaliste : « Quand j’avais 16 ans, j’ai eu un professeur qui pour la première fois nous parlait du conflit d’une façon différente. J’ai participé, cette même année, à un convoi pour la paix en Cisjordanie afin d’aider à reconstruire les maisons des Palestiniens qui avaient été détruites par l’armée. En 2001, quand nous avons décidé d’aller en prison pour protester contre l’occupation, nous étions 25. Un grand procès eut lieu. Les témoignages passaient à la télé. À la faculté de droit, ce procès est devenu un exemple important aussi bien du point de vue politique que philosophique. L’armée a voulu faire un exemple pour faire peur aux autres. Ils m’ont condamné à deux ans de prison. » Tel-Aviv, 2009

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08

Neta, 18 ans : « J’ai reçu une éducation très sioniste. Mais vers 15 ans, en cherchant sur Internet, j’ai découvert ce qu’était l’occupation des territoires palestiniens. Beaucoup d’amis militants autour de moi n’ont pas fait l’armée, je leur ai demandé conseils. Ils m’ont dit de ne pas aller en prison. En général, la raison qu’ils invoquent, c’est on ne peut pas y lutter. Mais j’ai tout de même choisi cette solution parce que je pense que les gens doivent savoir : l’armée israélienne ne respecte pas les droits humains et commet des crimes de guerre. » Haïfa, 2009

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09

Giyora Neumann, 55 ans, journaliste : « À 17 ans, en 1971, j’ai été le premier à refuser de faire l’armée et à aller en prison. À l’époque, j’étais militant de Matzpen, un parti politique socialiste, révolutionnaire et antisioniste. Nous étions contre l’occupation depuis le début (1967). Je l’ai aussi fait pour des raisons personnelles : ma famille avait souffert une autre occupation… en Pologne. Mes parents m’ont soutenu même s’ils avaient peur. Moralement, ils comprenaient ma position. Peut-être que d’un point de vue social, à cause de ce que l’on disait sur leur fils, ils en ont plus souffert que moi. » Tel-Aviv, 2009

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10

Naomi, 20 ans, étudiante : « Je n’ai pas fait mon service militaire parce que je suis contre l’occupation et contre la militarisation de la société israélienne. Il n’y a pas que les Palestiniens qui souffrent de la militarisation de notre société. Nous avons l’une des armées les plus importantes au monde, alors que nous sommes un tout petit pays. L’argent qui est investi dans la défense ne l’est pas ailleurs, dans l’éducation par exemple. Ce fut un problème quand j’ai voulu chercher un travail. Je devais travailler dans une librairie, mais quand ils ont vu que je n’avais pas été à l’armée, les patrons ont changé d’avis. » Tel-Aviv, 2009.

Israël détient le record mondial en dépenses d’armement par habitant : 1 429 US $ en 2006 (source : Le Temps – Suisse).

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11

Gal, 19 ans : « Je me souviens, quand j’avais 13 ans, avoir vu à la télé les refuzniks qui allaient en prison pour ne pas faire l’armée. Je les trouvais répugnants. Les attentats suicides des années 2002-2003 m’avaient marqué. Par la suite, j’ai lu sur l’histoire palestinienne et j’ai réalisé toute l’étendue de mon ignorance. Finalement, surtout à cause de ma famille, j’ai décidé de me faire réformer pour problèmes psychologiques. Je crois que le plus difficile pour mon père, c’est quand les gens lui demandent ce que je suis en train de faire. Si j’étais un garçon “normal”, je serais à l’armée. » Haïfa, 2009

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12

Daniel, 24 ans, étudiant : « Étant socialiste, je n’ai pas voulu faire l’armée parce que je suis contre l’impérialisme. Par ailleurs, au niveau de la société israélienne, la guerre a toujours été synonyme d’injustice sociale. N’importe quel problème social majeur passe à l’arrière-plan du débat public si l’État décide que l’armée doit attaquer le Liban ou Gaza. Mes parents ne voulaient pas de drame pour leur fils unique. J’ai finalement été réformé pour problèmes psychologiques. » Haïfa, 2009

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13

Margarida, 23 ans : « Je suis arrivée du Brésil en Israël à 14 ans avec ma famille. J’ai commencé mon service à 19 ans et je leur ai demandé d’être près de chez moi. Ils ne m’ont jamais écoutée. Au final, j’ai dû prendre 60 comprimés pour qu’ils comprennent que c’était sérieux et ils m’ont virée. Je rêvais de travailler à l’aéroport, mais maintenant c’est impossible. » Ashkelon, 2009

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14

Avner, 32 ans, historien : « J’ai grandi dans un kibboutz, dans une famille de gauche sioniste. Tous les hommes de ma famille sont dans l’armée. À 18 ans, j’y suis allé confiant, je pensais que nous étions les bons, même si nous faisions parfois des erreurs. Mais quand j’ai découvert comment vivaient les Palestiniens, j’ai pensé que c’était inacceptable de voir que l’armée, au lieu de protéger notre pays, défendait un projet colonialiste. Avec 13 autres soldats, nous avons envoyé une lettre qui expliquait que nous ne voulions pas être réservistes. » Jérusalem, 2009

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15

Tal Sela, 33 ans, éducateur : « J’ai été affecté à 19 ans dans une unité d’élite. Pour cette spécialisation, il fallait prendre des cours et j’ai donc tout de suite su que j’allais rester un an et demi de plus que la normale. En 1997, il y avait la guerre au Liban. Le 15 septembre, douze soldats israéliens sont morts à cause d’une charge explosive qu’ils transportaient. Ils ont envoyé mon unité pour récupérer les corps. Je suis resté traumatisé par l’horreur. Maintenant je ne veux plus être réserviste. Je suis membre de l’association Combattants for peace. » Tel-Aviv, 2009

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Raz, 19 ans : « Quand j’avais 15 ans, je ne connaissais rien aux Palestiniens. Je vivais dans une sorte de bulle. Mais quand je suis allée dans les territoires pour la première fois, j’ai vu très clairement que l’occupation n’existe pas pour des raisons de sécurité. J’ai clairement ressenti qu’on m’avait menti. En 2008, nous étions sept à refuser de faire l’armée. J’ai passé quatre mois en prison. Je me suis confronté à la réalité des autres filles qui étaient dans des situations bien plus compliquées que moi aussi bien au niveau social que familial. » Tel-Aviv, 2009

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Hilla, 23 ans, étudiante : « Je ne me voyais pas dans l’armée, mais je voulais donner quelque chose à la société. Je voulais faire un service civil. Cela a posé un gros problème à mes parents. Nous nous sommes disputés très sérieusement. J’ai finalement déclaré que j’étais pacifiste et je suis passée devant une commission. Mon père m’a soutenue et s’est même prêté à cette comédie imposée par l’armée en étant mon témoin lors de cet entretien. » Haïfa, 2009

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Uri, 26 ans : « Quand j’étais au lycée, j’ai commencé à comprendre que ce qu’on nous apprenait à l’école n’était que partiel. Je me suis intéressé à la politique et je me suis positionné contre l’occupation des territoires palestiniens. À 17 ans, pour la première fois, j’ai pensé que je ne devrais pas y aller. Ce fut un choc pour mes parents. Ils ont essayé de me convaincre, mais ils n’ont pas réussi. J’ai finalement été réformé pour des raisons psychiatriques. » Haïfa, 2009

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Isham, 39 ans, journaliste : « Mes parents sont druzes et communistes. Il était clair dès le départ que je ne ferais pas l’armée parce que je ne pouvais pas soutenir la politique israélienne. Il existe une loi israélienne de 1957 qui oblige les Druzes à faire l’armée. Les grandes familles druzes avaient accepté. Il s’agissait d’un accord entre deux élites, les jeunes n’avaient rien à dire. Le but d’Israël a toujours été de diviser pour mieux régner. La politique israélienne a fonctionné, les jeunes Druzes font leur armée et on leur fait croire qu’ils sont privilégiés, mais leur situation sociale reste misérable. Ils font tout le sale boulot, en particulier aux check points. J’ai passé un an et demi en prison pour désobéissance. » Haïfa, 2009

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Gaï, 30 ans, dramaturge : « Cela faisait un mois que j’étais dans l’armée quand j’ai appris que ma petite sœur était décédée dans un attentat suicide à Jérusalem. Je suis resté dans l’armée pour ne pas déprimer totalement. Mais ça n’a pas marché. Bien plus tard, j’ai voyagé en France où j’ai travaillé avec des réfugiés palestiniens. C’est à ce moment-là que j’ai décidé d’être un “missionnaire” du refus du service militaire. » Tel-Aviv, 2009

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21

Or, 19 ans : « Parce que j’ai grandi dans une famille israélienne très sioniste, quand j’étais enfant, j’étais certaine que je servirais dans une unité de combat. Mais quand j’ai été à une manifestation contre le mur en Cisjordanie, l’armée israélienne nous a tiré dessus. Ce jour-là, j’ai compris que je ne ferais pas mon service. Je vais aller en prison pour que ma famille comprenne. » Tel-Aviv, 2009

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Efi, 23 ans, étudiant : « Depuis l’enfance, en Israël, on vous fait croire que l’armée vous protège. Une expérience importante m’a fait comprendre que ce n’était pas le cas : je suis allé à Bilin en Cisjordanie, où j’ai vu des manifestants pacifistes défendre leurs terres. J’ai vu les soldats leur tirer dessus et cela m’a choqué. Quand on grandit en Israël, quand on est jeune, c’est impossible d’être au courant de ce genre de choses. » Tel-Aviv, 2009.
En 2014, il dit : « Aujourd’hui, je pense que le problème est en fait complexe. La guerre est une chose affreuse et il y a des gens qui souffrent des deux côtés. Mais étant attaqué, je pense qu’Israël a le droit de se défendre. »

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Photo-reportage publié sur Médiapart


Daniel, un jeune israélien : « Bien sûr que j'ai peur quand ça bombarde mais nous sommes plus en sécurité à Tel Aviv qu'à Gaza »

Notre envoyé spécial a rencontré à Tel Aviv deux jeunes Israéliens qui militent avec « leurs frères palestiniens ».

Le bar dans lequel nous rencontrons Anat Eylon, une petite blonde qui porte une belle robe noire et Daniel Elsohn, un brun aux cheveux courts, en ce vendredi après-midi, est un joli endroit situé au sud de Tel Aviv. Un vieux rade avec des posters d’anciennes gloires de la musique israélienne. On y sert des cafés froids avec du lait de soja. Il y a de la musique arabe qui passe en boucle. On se croirait presque dans un quartier cossu de Ramallah. D’ailleurs, Anat et Daniel, comme aussi la plupart de ceux qui fréquentent ce lieu, militent avec leurs « frères palestiniens ». Ils ont des positions très claires : l’arrêt immédiat de l’occupation. Des justes qui sont malheureusement une minorité en Israël et qu’on aimerait entendre plus souvent. « On nous donne très peu la parole, regrette Anat. Nous détestons Néthanyahu mais aussi tous les autres gouvernements qui ont dirigé Israël. Ils n’ont fait que promouvoir la guerre », commente-elle.

Anat et Daniel, malgré leur jeune âge - ils viennent tous les deux d’avoir 18 ans, parlent déjà comme des très grands. Ils se sont fait connaître parce qu’avec une centaine d’autres jeunes de leur âge, ils ont envoyé en mars dernier une lettre à leur premier ministre pour lui dire tout le bien qu’ils pensaient de leur armée. Et que pour rien au monde, ils iraient combattre pour eux. Depuis l’agression israélienne sur Gaza, leur voix commence un peu à se faire entendre.

Un acte courageux perçu par beaucoup comme un acte de trahison

En pleine discussion, la sirène retentit. Tout le monde se réfugie à l’arrière du bar. Anat et Daniel continuent comme si de rien n’était. Des roquettes viennent d’être tirées de Gaza. Comme la très grande majorité d’entre elles, elles seront très vite interceptées par l’armée israélienne. « Bien sûr que j’ai peur quand ça bombarde, reconnaît Daniel. Mais bon, nous sommes plus en sécurité ici que les Gazaouis. Eux, ils ont nulle part où aller se réfugier ». Daniel avoue ne pas « aimer le Hamas, ni le gouvernement israélien ». Mais pour lui, on ne peut pas comparer les deux. « Le Hamas est tout petit. Il n’a pas le même pouvoir qu’Israël. J’en veux beaucoup plus à Israël parce qu’il tue des Palestiniens en mon nom ».

En mars dernier, donc, les refuznik (le nom qu’on donne à ceux qui refusent d’aller faire l’armée) ont envoyé une lettre à Benjamin Nethanyahu. Un acte courageux mais perçu par beaucoup comme un acte de trahison. « En Israël, à la fin du lycée, tout le monde doit partir faire son service militaire. Les garçons s’en vont trois ans, les filles deux, explique Daniel, d’un air désolé. Dès l’âge de 14 ans, j’ai su que je n’irai pas faire l’armée. C’est pas évident de l’exprimer tout haut, parce que depuis tout petit, on nous dit que servir chez Tshahal, c’est permettre à tous de vivre en sécurité et tu peux vite passer pour un égoïste, voir un traitre ».

Daniel raconte aussi comment à l’école, même si on ne désigne jamais le Palestinien en tant qu’ennemi, « on nous explique qu’Israël a toujours survécu malgré les menaces ». Plus jeune, Anat, était comme toutes les filles de son âge : elle avait intégré le fait qu’elle partirait faire son service militaire. Ça ne lui faisait pas spécialement plaisir, mais c’était comme ça, et tout le monde était logé à la même enseigne. Au lycée, elle rencontre des gens qui sont totalement contre. « Et au fond de moi, je l’étais aussi, avoue la jeune fille. Grâce aux autres, j’ai juste compris que je n’étais pas la seule à détester la politique des gouvernements israéliens. Israël ne promeut que la guerre. Mon pays est terrifiant ».

Si Anat et Daniel s’expriment aujourd’hui, c’est surtout pour envoyer un message aux autres, parce que les deux sont persuadés qu’il y a plus d’Anat et Daniel en Israël, qu’on veuille bien le dire ou le croire. « La plupart pense qu’il n’y a pas d’autre alternative que d’aller faire l’armée. C’est faux. Il existe des options. Plus nous serons nombreux à refuser, plus le gouvernement sera mis sous pression ». Anat et Daniel ont la chance d’être soutenus par leurs familles dans leur démarche. « Beaucoup de nos amis qui ont décidé de prendre la même voie que nous, ne le sont pas. Certains le cachent. D’autres se brouillent définitivement avec les leurs ». Plus que tout, Anat et Daniel espèrent que leur refus d’aller servir sous les drapeaux permettra de lancer un débat. « Aujourd’hui, c’est un sujet qu’on ose pas aborder. Dans la société israélienne d’aujourd’hui, on peut parler de tout sauf de ça ».

Ce soir, samedi 19 juillet, ils iront manifester à Tel Aviv pour demander « l’arrêt des massacres de Gaza ». « On a vu qu’à Paris, votre gouvernement avait interdit les rassemblements pro-palestiniens. C’est dingue mais ça ne nous surprend pas, disent les deux adolescents. Chez vous, quand on est pro-palestinien, on est antisémite. Vous voyez, nous on est Juifs et ça ne nous empêche pas clairement d’être antisioniste ».

Nadir Dendoune, envoyé spécial en Palestine

Le Courrier de l’Atlas, 19 juillet 2014


Moyen-Orient

Israël : "Un été en prison" pour avoir refusé d'aller combattre à Gaza

Texte par Leela JACINTO

Le 09/08/2014

Gilad Halpern faisait partie des réservistes de l’armée israélienne pénétrant dans la bande de Gaza en 2009. Il a été condamné, jeudi [7 août], à 21 jours de prison. Son crime : ne pas avoir répondu à l’appel de l’armée israélienne pour aller combattre à Gaza. Il s’est confié par téléphone à France 24 depuis une base militaire au sud d’Israël.

Le 11 août, Gilad Halpern aura 33 ans, mais il ne pourra pas rentrer chez lui pour fêter son anniversaire. La semaine suivante, son fils soufflera sa deuxième bougie, là non plus, Gilad ne rentrera pas. Il sera détenu dans une prison israélienne.

Vendredi 8 août, quand je l’ai appelé sur son mobile, Gilad était en garde à vue dans une base de l’armée au sud d’Israël. La veille, au cours d’une audience, il a écopé de 21 jours de prison pour avoir refusé de rejoindre son unité dans l’opération terrestre de l’armée israélienne à Gaza. Dimanche, il s’attend à être emprisonné. Son téléphone portable lui sera sans doute retiré. D’ici là, Gilad explique être libre de se déplacer dans l’enceinte de la base, mais ne peut pas quitter les lieux.

Le jeune israélien assume son choix. "Je voulais en faire une position de principe, dire que je trouvais ça odieux", explique Gilad, en référence à l’opération Bordure protectrice, qui a coûté la vie à plus de 1 800 Palestiniens, selon des sources palestiniennes, et plus de 65 Israéliens, en grande majorité des soldats. "Je suis prêt à en payer le prix. C’est un acte de solidarité modeste – tant de gens ont souffert beaucoup plus", ajoute-t-il avec l’humilité qui le caractérise.

La première fois que j’ai rencontré Gilad, en 2011, il n’y avait aucun doute que ce nouveau journaliste dégingandé de France 24 était un Israélien, orienté à gauche, mais nous ne parlions pas du Moyen-Orient. Un an plus tard, Gilad a quitté la France pour rentrer chez lui, en Israël. Il a d’abord travaillé dans un quotidien de gauche avant de rejoindre la rédaction d’une radio anglophone à Tel Aviv. Entre-temps, il a eu un enfant, nous avons "liké" des messages sur nos pages Facebook respectives et voilà tout.

De la fin du processus de paix à la seconde intifada

Gilad n’est pas étranger aux opérations israéliennes dans les territoires palestiniens. En 1999, peu après ses 18 ans, lorsqu’a débuté son service militaire de trois ans, il a été témoin des derniers jours du processus de paix. À la fin de son service militaire obligatoire, la seconde intifada était à son paroxysme et le jeune Israélien servait dans une division blindée en Cisjordanie.

Il y a plus d’une décennie, au cours de son service militaire, Gilad croyait encore à la "cause". Dans une interview à Mediapart publiée le 24 juillet, il expliquait : "J’étais conscient que le traitement des Palestiniens par Israël était injuste et injustifiable, mais j’ai cru – et je le croyais encore quelques années après la fin de mon service [militaire] – que c’était une "pause" temporaire dans le processus de paix. Je pensais que c’était dans l’intérêt d’Israël de mettre fin à ce long conflit. Et je pensais que dès lors que les risques pour la sécurité étaient terminés, on pourrait donner aux Palestiniens leur indépendance et leurs droits."

Mais sa position a changé en 2009, quand il a été appelé en tant que réserviste à servir pendant l’opération Plomb durci de l’armée israélienne à Gaza, au cours de laquelle 1 400 Palestiniens ont été tués, selon un bilan officiel palestinien. Trois civils et dix soldats étaient morts côté israélien. "J’étais vraiment horrifié par ce qui semblait être une opération d’une brutalité exceptionnelle, qui a fait des ravages dans la bande de Gaza", m’explique Gilad.

"J’en suis venu à la conclusion, en 2009, que je n’étais pas prêt à défendre une politique israélienne qui consistait à attaquer Gaza tous les deux ans. Le conflit actuel n’est pas du tout nécessaire. Le gouvernement israélien a eu plusieurs fois l’occasion d’apaiser les tensions avec le Hamas. Je ne suis plus disposé à mettre mon nom sur des solutions brutales qui peuvent facilement être évitées et je vais le refuser."

Depuis le début de l’opération Bordure protectrice, le 8 juillet, Israël a appelé 86 000 réservistes au fur et à mesure qu’approchait l’offensive terrestre. Alors que le soutien de l’opinion publique israélienne à l’opération à Gaza allait croissant, un certain nombre de campagnes d’objection de conscience ont été lancées, dont une pétition d’anciens soldats qui ont refusé de servir comme réservistes.

Arrêté à l’aéroport

Le 17 Juillet, quand Gilad a été appelé à la mobilisation, il a consacré plusieurs jours à passer des appels téléphoniques pour expliquer aux différents responsables militaires qu’il n’avait pas l’intention de rejoindre ses quartiers. On lui a finalement donné un ultimatum de 12 heures pour rejoindre son unité ou son cas serait transféré à la police militaire. Gilad a pris place à bord d’un vol pour les Pays-Bas, quittant Israël un jour avant que des compagnies aériennes internationales suspendent brièvement leurs vols à destination de Tel Aviv. "Nous avions prévu des vacances la semaine suivante, mais j’ai pris l’avion pour les Pays-Bas seul. Ma famille m’a rejoint plus tard", explique-t-il.

C’est à son retour à la maison - avec sa famille –, mercredi 6 août, que Gilad a été arrêté à l’aéroport international Ben Gourion de Tel-Aviv et emmené dans une base militaire au sud d’Israël, où il a fait face à un tribunal militaire. "J’ai dit au [militaire présidant] qu’il s’agissait d’un acte de principe de refuser de participer au combat et que c’était une décision qui n’avait pas été facile parce que j’avais servi dans l’armée par le passé", explique-t-il.

Par sa décision, Gilad est devenu un "refuznik", comme on appelle les objecteurs de conscience en Israël. Malgré le rôle central de l’armée en tant qu’institution qui défend et unit Israël, le pays a déjà connu plusieurs mouvements de refuzniks. Ces dernières années, à la suite de la droitisation de la politique et l’opinion publique israéliennes, la dénonciation des refuzniks a augmenté à mesure qu’Israël se retrouvait de plus en plus isolé sur la scène internationale.

Gilad assure cependant que sa famille et ses amis ont accueilli très positivement sa décision – notamment sa femme pourtant issue d’une grande famille de militaires. Un message faussement jovial posté sur Facebook – "L’été en prison" – a suscité des commentaires tels que : "Oh non ! Je suis fier d’être ton ami" et "Très courageux de ta part Gilad. Je soutiens ton action". Mais en dehors du cercle restreint de la famille et des amis Facebook, les objecteurs de conscience sont confrontés à la colère d’une société militarisée peu conciliante avec les réfractaires.

À la base militaire où les soldats s’affairent, Halpern a tout simplement dit qu’il avait été AWOL ("absent sans permission officielle") sans révéler les raisons politiques de sa décision. "Les gens qui font le même choix que moi sont souvent considérés comme des gens qui s’identifient à l’ennemi – il y a eu une résurgence du discours nationaliste", explique Gilad. "Je ne souhaite pas lancer un débat politique qui me mettrait dans une position inconfortable ici."

Avec du recul sur ces dernières semaines, Gilad note qu’il aurait pu gérer les choses différemment. "J’aurais pu trouver des excuses – d’autres l’ont fait avant", dit-il. "Mais je voulais en faire une question de principe. Je ne le regrette pas. Je n’en pouvais plus. Nous devons avoir une position assez radicale et nous devons faire quelque chose. En allant en prison, je fais quelque chose. Maintenant, je vais être en mesure d’en parler - non seulement comme un Israélien, mais comme quelqu’un qui a payé le prix pour cela."

(publié sur le site france24.com)


Agissez ! Demandez la libération de l'objecteur de conscience Udi Segal !

mardi 5 août 2014

Un appel à l’action de New Profile, une association israélienne de soutien aux objecteurs de conscience...

Udi Segal, 19 ans, habitant du kibboutz Tovel, s’est rendu le 28 Juillet 2014 à la base de l’incorporation militaire de Haïfa, accompagné d’une manifestation de soutien pour son refus de servir dans l’armée israélienne.

Udi a justifié son refus de servir pour des raisons de conscience et par son opposition à l’occupation du peuple palestinien ainsi qu’à la discrimination dont sont victimes les Palestiniens en Israël. Le 28 juillet 2014, Udi a été condamné à 20 jours de prison militaire et incarcéré à la prison n° 6 située près d’Atlit.

Déclaration d’Udi Segal

Je m’appelle Udi Segal, j’ai 19 ans, je viens du Kibbutz Tuval au nord d’Israel, il y a quelques mois j’ai signé la lettre des objecteurs de conscience 2014 qui fut envoyée au premier ministre, à ce jour, elle a été signée par 130 déserteurs. Dans la lettre nous déclarions notre refus de servir dans l’armée israélienne. La principale raison est l’occupation et l’oppression continue du peuple palestinien, qui s’exprime par des allocations sociales inégales, le mépris des droits, et le meurtre continu de plus de 600 personnes dans la dernière opération à Gaza. De plus, le service militaire contribue au militarisme israélien. Moi par exemple, en tant qu’homme, juif et ashkénaze, et donc plus susceptible d’avoir un impact sur la société israélienne et de m’en sortir, car je viens d’un milieu social dominant plus enclin au militarisme israélien, un milieu auquel je m’oppose fortement.

Même si il n’y avait pas l’occupation, je refuserais de servir l’armée, car elle pérennise un système politique, nationaliste et capitaliste auquel je refuse de prendre part et qui ne profite qu’à quelques-uns. Je ne pense pas que l’opération militaire en cours à Gaza me protège. Les opérations militaires ne me protégeront pas, elles ne feront qu’engendrer de nouvelles opérations militaires comme ça a été le cas avec l’Opération Plomb durci [2008-2009] qui n’a fait que mener à l’Opération Pilier de défense [novembre 2012] et qui continue aujourd’hui avec l’opération Bordure Protectrice, qui elle-même mènera probablement à d’autres opérations militaires. Ce qui protégerait serait une paix juste reconnaissant l’injustice faite aux palestiniens. On ne pourra réaliser la paix tant qu’un peuple sera opprimé, occupé et entouré d’un mur. Cette population n’a pas abandonné son désir de liberté et ne se repose pas sur l’éventuelle compassion de ceux qui l’occupent, alors ne vous attendez pas à vivre en sécurité dans une telle situation. A ceux qui pensent quand même qu’ils me défendent, dans une telle situation, si le prix à payer pour la sécurité est de 600 morts à Gaza, je ne suis pas intéressé par ce genre de sécurité.

Mon refus de servir sera difficile pour ma famille. Mon frère est dans l’armée, et il pourrait être à Gaza lorsque je me retrouverai en prison, j’espère que cela ne créera pas de conflits insolubles... Et au delà de ça, à cause de moi, les gens regarderont avec méfiance mes parents et mes frères. Je pense que je contribue à la société israélienne, mais il me semble important de préciser que mon action ne s’inscrit pas dans une vision patriotique ou sioniste, mais dans une vision globale, une globalité qui inclut Israël. Je pense que l’occupation est un obstacle et qu’elle est dommageable pour les israéliens.

Beaucoup d’amis de mon âge se sont enrôlés dans l’armée. Je viens moi-même d’un milieu militariste, mon école a un des plus forts pourcentages de recrutement dans le pays. Oui, il y a de nombreuses personnes qui ont arrêté de m’adresser la parole et qui m’ont mis à l’index suite à mon choix. Mais il s’agit peut-être d’un bon tri dans mes amitiés, puisque j’ai aussi des amis qui se sont enrôlés et qui sont restés à mes cotés. J’ai choisi d’aller en prison parce que malheureusement, les israéliens écoutent plus facilement ceux qui sont prêts à se sacrifier et à payer le prix. La prison va me retirer ma liberté, c’est quelque chose de difficile à appréhender car je n’ai connu jusque là que le dehors, dans une liberté toute relative. De plus, pour ceux qui refusent l’occupation, les conditions de détention peuvent être particulièrement dures, comme le montre l’exemple d’Uriel Ferera, emprisonné récemment. Il a refusé de porter l’uniforme et subit des humiliations en raison de son milieu traditionnel.

L’objectif qui sous-tend ma désertion est d’en finir avec l’occupation. Mais compte tenu de la réalité présente, ce qui importe maintenant est que les israéliens ouvrent leurs yeux, qu’ils réfléchissent au sens de l’occupation et à ce que cela signifie de servir dans l’armée, particulièrement les adolescents qui se rapprochent de la conscription.

En ce qui concerne l’opération en cours à Gaza, j’appelle les soldats de base et les réservistes à refuser les ordres et à ne pas participer au massacre.

Udi Segal.

(sources : non-fides.fr, newprofile.org)


Liberté pour l'objecteur de conscience Uriel Ferera !

mardi 5 août 2014

Demandez la libération de l’objecteur de conscience israélien Uriel Ferera, qui purge actuellement sa cinquième peine de prison pour avoir refusé de servir dans l’armée israélienne !

Cinquième peine de prison pour l’objecteur de conscience Uriel Ferera. Tous les détails et appels à l’action et de soutien ci-dessous.

Uriel Ferera, 19 ans, originaire de Beer Sheva, s’est rendu à la base d’incorporation militaire de Tel Hashomer, accompagnée d’une manifestation de soutien pour son refus de servir dans l’armée. Uriel a justifié son refus de servir pour des raisons de conscience et par son opposition à l’occupation du peuple palestinien ainsi qu’à la discrimination dont sont victimes les Palestiniens en Israël. Le 21 Juillet 2014, Uriel a été condamné à 20 jours de prison militaire et incarcéré à la prison n° 6 située près d’ Atlit.

La veille de son emprisonnement Uriel avait déclaré son opposition à la guerre contre Gaza :

"Bonjour, mon nom est Uriel Ferera. Je suis âgé de 19 ans, et j’habite Beer Sheva. J’ai déjà passé 70 jours en prison, ayant été condamné à cinq reprises, pour avoir refusé de m’enrôler pour objection de conscience. Les raisons de mon refus, c’est que l’armée viole les droits de l’homme dans les territoires occupés, qu’lle tue et humilie les Palestiniens. Pour moi, en tant que personne religieuse - cela va contre l’idée que Dieu nous a tous créés à son image, et que nous n’avons pas le droit de porter atteinte à des vies humaines. À L’heure actuelle, Dans le cadre des opérations à Gaza, l’armée attaque des cibles en sachant qu’elles abritent des gens innocents, des femmes et des enfants. J’espère que cette opération va s’arrêter, que l’occupation prendra fin, et que nous vivrons tous en paix sur cette terre. Demain, je me présenterai à la base d’incorporation militaire et je refuserai une fois de plus. Je vais donc commencer ma cinquième période d’emprisonnement. et j’en suis fier : je refuse de prendre part à des crimes de guerre. "

Arrêtez le massacre à Gaza !

Pendant les derniers jours de sa première peine de prison, on lui a interdit tout appel téléphonique y compris les appels à son avocat de l’association New Profile, et on lui a interdit de recevoir des lettres de soutien.

Il est important de mentionner qu’Uriel avait fait un recours devant le comité militaire de l’objection de conscience, mais que son appel a été rejeté.

Pour Ruty, la mère de cet objecteur de conscience israélo-argentin, interrogée par le quotidien argentin Página12, la société israélienne « est une société complètement malade. Quelle personne saine d’esprit souhaite que ses enfants soient des soldats et s’en aillent tuer ou mourir ? » Elle attribue ce sentiment à l’Europe de la Première Guerre mondiale : « ce patriotisme-là existe encore en Israël », dit-elle en estimant que le contexte social est alimenté par le Premier ministre Benjamin Netanyahu. « Le gouvernement allume et alimente la fierté nationale », indique-t-elle.

Depuis qu’ils ont arrêtés Uriel, vous n’avez pas pensé retourner à l’Argentine ?

« Plus je vois ces choses, plus j’ai envie de rester, plus j’ai envie d’agir, et plus je veux parler à des gens comme vous pour qu’on sache dans le monde qu’il y a des juifs qui pensent différemment, que quelques 3000 personnes ont rempli la place de Tel Aviv la semaine dernière pour manifester pour la paix, pour qu’on sache que nous sommes allés protester devant la prison où est mon fils. Je suis fier d’être juive et ça m’emmerde que mon peuple soit de la merde ».

« Je ressens très fortement de faire partie du peuple qui tue et ça m’emmerde. Avec l’argent de mes impôts, ils achètent des bombes et des balles. Même si je suis pacifiste et contre l’opération d’Israël, j’ai aussi les mains tachées de sang », dit-elle. « Je veux que ce gouvernement de merde qui affame les juifs et assassine les Palestiniens tombent ». Uriel sera libéré quand l’horloge sonnera les 8 heures à Atlit. Et il sera contraint, pour la sixième fois, de s’enrôler dans les forces armées israéliennes.

(source : newprofile.org, losotrosjudios.com)



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2 Messages

  • moi aussi j habite en israel et je comprends tout a fait leur refus de faire l armee mais il faut savoir qu ici personne ne fait le service militaire par plaisir
    deuxiemement il faut savoir que les palestiniens sont aussi responsables que nous de la situation
    troisiemement:si nous laissions tomber les armes que se passerait il ?si vous etes honnete regardez autour de nous ce qui se passe en irak ou en syrie
    quatriemement:je prefere que mes enfants fasse l armee’bien que je naime pas du tout le discours militantiste plutot que nous finissions par etre massacre par nos voisins si nous baissions la garde.
    qui naimerais pas vivre dans la paix ?

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    • Bonjour,

      Modeste et rapide réponse personnelle d’une personne qui a traduit l’appel des réservistes israéliens déclarant « Nous refusons de servir »

       

      1. « je comprends tout a fait leur refus de faire l armee mais il faut savoir qu ici personne ne fait le service militaire par plaisir ».
      Tant mieux si c’est cela que vous pensez et si c’est la réalité. Quand le service militaire était obligatoire en France, nous étions assez nombreux à le refuser : comme objecteurs de conscience, comme insoumis, comme déserteurs… et plus encore en faisant valoir des « médicales » incompatibles avec le fait de porter des armes et/ou de devoir obéir stupidement et aveuglément à des ordres stupides pour des finalités plus que douteuses.

       

      2. « il faut savoir que les palestiniens sont aussi responsables que nous de la situation ».
      Là, pas du tout d’accord ! Et c’est là sans doute le nœud du problème.
      La création de l’Etat d’Israël s’est faite au détriment des Palestiniens. Dès le départ, dès la « nakba » avec l’exode forcé de 800 000 personnes, la fondation de l’Etat d’Israël s’est réalisée sur la base de cette prise de possession, de cette dépossession des terres et du territoire, de cette négation des habitants non-juifs vivant en Palestine. Sur ce point, je vous invite à lire ce texte sur ce crime fondateur qui se poursuit tous les jours.
      Et les frontières (jamais définies précisément par Israël) de 1949 ne sont déjà plus les mêmes que celles du « plan de partage » de l’ONU de 1947 : la superficie de l’Etat d’Israël s’est déjà considérablement agrandie entre 1947 et 1949.

      Et ça ne s’est pas arrêté là. La politique des gouvernements successifs en Israël (gauche et droite) a été celle l’expansion continuelle du pays et la colonisation de nouveaux territoires. En particulier à partir de 1967. Les « territoires palestiniens » de Cisjordanie et de Gaza ont été occupés (sans parler du Golan syrien et du Sinaï égyptien). Colonisation politique, militaire, économique et de peuplement (surtout à Jérusalem-Est et en Cisjordanie)

      Aujourd’hui, l’essentiel de la Cisjordanie est occupée, et colonisée, ainsi que Jérusalem-Est : plus de 500.000 colons hors des « frontières de 1967 » dites internationalement reconnues. La bande de Gaza n’est plus « occupé » par des colons et l’armée mais cela revient au même : Israël (aidé par l’Egypte) contrôle tout le territoire, impose le blocus et la misère, maintient les 1,8 millions de Gazaouis dans une prison à ciel ouvert…
      Il y a une carte célèbre reproduite dans cet article (au début du texte) qui illustre parfaitement cette évolution, cette expansion continuelle.

      Donc, non, les Palestiniens ne sont pas « aussi responsables » que les Israéliens : il ne peut pas y avoir d’égalité ou d’équivalence : les uns sont les colonisés, les autres sont les colonisateurs et les spoliateurs. C’est un conflit de type colonial, et pas entre deux nations a priori « égales » (comme naguère la France et l’Allemagne ou il y a quelques temps l’Iran et l’Irak). Inégalité que l’on retrouve dans le disproportion totale entre les moyens militaires, technologiques, financiers de l’Etat d’Israël (et les soutiens diplomatiques) et ceux — dérisoires — des résistants palestiniens.

       

      3. « si nous laissions tomber les armes que se passerait il ? »
      En finir avec l’occupation, démanteler et abandonner les colonies, rendre les terres et les territoires, dédommager les Palestiniens, accorder aux exilés de 1948 et à leurs descendants le « droit au retour », lever le blocus de Gaza.... les thèmes sont nombreux et n’ont pas variés depuis des décennies. Dans tous les cas, aller vers un processus de paix, de décolonisation et de négociation. Après, la solution de « deux Etats » ou d’un Etat bi-national est relativement secondaire à ce stade : de toute façon, ce sera aux peuples d’en décider, ce sera l’objet de débats, de controverses…

       

      4. Faire la guerre pour ne pas être massacrés.
      Certes, si on est attaqué, c’est logique de se défendre. Mais si « se défendre » revient à attaquer sans cesse, à envahir, à détruire, à massacrer des voisins (Palestiniens principalement mais aussi à l’occasion Libanais), à maintenir un état de guerre permanent et le climat militariste qui va avec… Et puis, toutes les guerres, toutes les logiques militaires et militaristes reposent là-dessus. Partout les armées sont faites officiellement pour « se défendre ». Y compris les armes nucléaires dites de dissuasion…

      Alors, pour ne pas risquer d’être massacrés ni massacrer en masse, il faut faire la paix. Pas la paix des cimetières, pas la « pacification » dont rêvait l’armée française en Algérie, pas l’armistice comme la France l’a connu entre le régime de Pétain et l’occupant nazi-allemand. Une paix ‟juste” comme on dit.

      Et cela suppose de revenir au point 3, en prenant en considération les points 1 et 2.

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