Accueil > Big Brother > Big Brother 316

CA 316 janvier 2022

Big Brother 316

samedi 15 janvier 2022, par Courant Alternatif


  1. Le marché de la technopolice en pleine extension
  2. Cadets de la Gendarmerie
  3. Carrefour Flash a ouvert ses portes
  4. La généralisation de la reconnaissance faciale en Inde
  5. Finalisation de la loi dite « Drones 2
  6. QR code-isation de la société

Le marché de la technopolice en pleine extension

La vidéosurveillance est aujourd’hui largement déployée ; ce secteur juteux cherche de nouveaux débouchés. Bien sûr, il y a le complément des caméras qui permettrait l’identification des personnes filmées, c’est la reconnaissance faciale. Mais il y a bien d’autres compléments de la vidéosurveillance qui sont ici ou là expérimentés. C’est ainsi que la ville de St Étienne avait un projet de micros « intelligents » qui devaient être reliés à des drones envoyés sur les lieux en cas de bruits suspects. Dans cette ville un collectif « Halte au contrôle numérique » s’était mobilisé (conférences, ateliers, déambulations sonores) jusqu’à ce que la CNIL s’intéresse au sujet et avertisse la municipalité qu’il s’agissait d’un traitement illicite de données à caractère personnel. Ce projet a ensuite été remisé dans les archives…

Depuis, bien d’autres projets sont nés. C’est ainsi que la mairie de Suresnes a accepté que la start-up locale XXII analyse les moindres faits et gestes, sur la voie publique, des suresnois·es : Durant un an et demi, l’entreprise sera libre d’utiliser les images de vidéosurveillance de Suresnes pour développer des algorithmes de “détection de comportements suspects” dont elle sera propriétaire. Comme l’explique le maire de Suresnes en conseil municipal : « le problème de nos entreprises françaises est qu’elles n’ont pas accès à des bases de données, des bases d’images, des bases d’événements suffisantes qui leur permettent d’exercer aussi rapidement leurs algorithmes. » En fait les Suresnois·es sont des cobayes de la technopolice même si XXII tente de se dédouaner de toute velléité sécuritaire ; la surveillance qu’elle impose à ses habitant·es est bien réelle. Il s’agit de technologies intrusives, imposées sans débat, à toute une population. Les suresnois·es voient leur vie épiée et exploitée comme une vulgaire matière première utilisable pour le développement de technologies malsaines où les êtres humains ne sont finalement plus considérés que comme une masse de données à vendre ou des corps à contrôler. Enfin, la convention signée ne permet pas de savoir avec précision quels seront les algorithmes déployés. S’il est évoqué la notion on ne peut plus vague de « détection de comportements suspects », il est plus loin fait référence à un algorithme de détection de « maraudage »…

Passons maintenant à la ville d’Orléans. Le projet de la Mairie d’Orléans annoncé en octobre 21 est d’installer des micros couplés aux caméras de vidéosurveillance pour que, dès qu’ils détectent un bruit « anormal », une alerte remonte au Centre de supervision urbain, c’est-à-dire dans la salle de commandement de la police municipale où sont aussi acheminés les flux de vidéosurveillance. L’objectif de ce partenariat consiste à perfectionner ces dispositifs de détection sonore. L’argument principal de la municipalité pour ce dispositif est de dire que celui-ci respecte la vie privée, car le détecteur n’enregistrerait pas les sons mais un simple « paysage sonore ». L’expérimentation est entièrement prise en charge par Sensivic, l’entreprise chargée d’installer et de gérer ces mouchards. Celle-ci cherche à améliorer et entraîner ses algorithmes afin, par exemple, de pouvoir différencier des cris de joie de ceux d’épouvante, ou d’identifier des bris de glace si une vitrine est cassée. A noter que l’expérimentation n’a pas de durée déterminée, afin de permettre à Sensivic de faire toutes les recherches nécessaires. Sensivic a été créé en 2015, à Sophia Antipolis, la technopole spécialisée en Intelligence Artificielle (IA) des Alpes maritimes, et s’est depuis installée à Orléans, au sein de Lab’O, un accélérateur de start-up numériques. Sensivic a aussi rejoint le projet Lorias un laboratoire d’innovation pour l’armée de l’air : « Le projet consiste à développer des solutions pour améliorer la collecte, la gestion et la transmission de données sensibles diffusées par des objets de « troisième dimension » (drones, capteurs, objets connectés…) » comme l’indique le journal local. Ainsi, des start-up orléanaises, dont Sensivic, travaillent pour l’armée de l’air aux côtés des champions nationaux que sont Thalès, Engie, Atos et Orange.

Pour résumer, la municipalité veut donner les moyens à une entreprise pour tester et mettre au point ses produits sur la population orléanaise pour le compte de l’armée française, de Thalès et d’autres. Comme à St Etienne, ce dispositif est illégal. Mais, alertée, la CNIL se tait. La Quadrature du Net a été obligée d’intervenir, aussi bien devant le tribunal administratif pour faire annuler cette convention d’expérimentation que devant la CNIL directement pour la forcer à appliquer de nouveau sa décision vis-à-vis de la ville de St Etienne. A suivre !

Source : laquadrature.net

« Cadets de la Gendarmerie »

SUD éducation a pris connaissance par voie de presse de l’existence d’un partenariat entre l’Association nationale des réservistes opérationnels et citoyens de la gendarmerie nationale (ANORGEND), des rectorats franciliens et la région de gendarmerie Île-de-France. Dans le cadre de ce dispositif, soixante-six lycéen·nes ont effectué durant les vacances de la Toussaint un stage au camp militaire de Beynes, dans les Yvelines, camp où s’entraîne notamment le GIGN. Au programme : montée des couleurs, maîtrise avec arme et sans arme d’un adversaire, tirs à balles réelles, mais aussi inculcation des « valeurs de la République ».

L’objectif est la préparation de ces lycéen·nes, les “Cadets de la gendarmerie” aux concours et sélections de la gendarmerie par le biais de trois stages sur site ainsi que 60 heures assurées par des professeur·es en établissement. Ce dispositif a pour objectif de s’étendre à six établissements en Essonne, puis dans l’Académie de Paris avec le lycée Buffon. En 2024, l’objectif est de porter le nombre de Cadets de la gendarmerie à 200.

Source : Sud Éducation

Carrefour Flash a ouvert ses portes

Carrefour a ouvert le 24 novembre 2021 son premier magasin autonome dans le 11 arrondissement de Paris. Il est équipé de la technologie développée par la start-up californienne AiFi. Nommé Carrefour Flash, il est pensé pour tout le monde et pour accélérer les courses du quotidien. Il n’est pas nécessaire de télécharger une application ou de s’identifier, tout le monde peut entrer dans ce magasin pour faire ses courses car c’est le magasin lui-même qui est connecté. Dans cet espace de 55 m², ce sont 60 caméras qui ont été installées au niveau du plafond. Les rayonnages quant à eux sont composés de 250 étagères dotées de huit capteurs de poids chacune (soit 2000 capteurs en tout). Ces derniers peuvent supporter jusqu’à 30 kg et sont précis à 10 g près.

Une fois que le client pénètre dans le magasin, il est convertit en avatar anonyme et représenté par une couleur. Les équipes de Carrefour insistent sur l’anonymat : le but n’est pas d’identifier concrètement une personne, mais de suivre chaque client indépendamment pour déterminer les achats réalisés par chacun. Toutes les données issues des caméras et des étagères connectées sont fusionnées pour déterminer en temps réel le panier du client et son prix à payer. Carrefour et AiFi se targuent d’avoir un taux de fiabilité de 96% au niveau des paniers. Il reste encore 2 problèmes à régler : Le magasin et ses technologies ne peuvent suivre qu’un maximum de 20 acheteurs et une seule personne doit remplir un panier. Les employés du Carrefour Market sur lequel cette technologie a été implantée seraient toujours présents sur les lieux, jusqu’à quand pour les caissières ?

Source : usinedigital.fr

La généralisation de la reconnaissance faciale en Inde

En Inde, les autorités utilisent depuis longtemps des technologie de reconnaissance faciale dans des contextes où les droits humains sont en jeu, notamment, parmi les exemples récents, pour faire appliquer les mesures de confinement liées au COVID-19, pour identifier les électeurs et électrices lors des élections municipales, et pour maintenir l’ordre pendant des manifestations. Les droits des musulmans, des dalits (opprimés), des adivasis (aborigènes), des personnes transgenres et de toutes les catégories de la société historiquement défavorisées sont particulièrement menacés par la surveillance de masse.
La surveillance généralisée dans la ville d’Hyderabad (près de 7 millions d’habitants-es) en Inde, est une menace pour les droits humains, a déclaré Amnesty International le 10 novembre 2021 dans le cadre d’une nouvelle phase de sa campagne Ban The Scan, qui vise à faire interdire les technologies intrusives de reconnaissance faciale.

La capitale de l’État du Télangana – l’une des villes les plus surveillées au monde – a commencé la construction d’un « centre de commande et de contrôle » qui ne présage rien de bon, dans l’objectif de connecter en temps réel l’immense réseau de caméras de surveillance à reconnaissance faciale de l’État. Par ailleurs, selon une étude menée par l’Internet Freedom Foundation, l’État du Télangana est l’État indien qui compte le plus grand nombre de projets liés aux technologies de reconnaissance faciale.

« Hyderabad est sur le point de devenir une ville sous surveillance totale. Il est presque impossible d’y marcher dans la rue sans risquer de s’exposer à la reconnaissance faciale », a déclaré Matt Mahmoudi, chercheur sur l’intelligence artificielle et les mégadonnées à Amnesty International.

Amnesty International demande une interdiction totale de l’utilisation, du développement, de la production, de la vente et de l’exportation, tant par le secteur public que privé, des technologies de reconnaissance faciale à des fins de surveillance de masse. A suivre…
Source : Amnesty International

Finalisation de la loi dite « Drones 2 »

La loi « responsabilité pénale et sécurité intérieure » dite « Drones 2 » a fini d’être examinée par le Parlement le 18 novembre dernier. Elle a été définitivement adoptée le 16 décembre par le Sénat après un passage en commission mixte. Elle prévoit notamment de ré-autoriser les drones policiers qui, l’an dernier, avaient été interdits par le Conseil constitutionnel lors de la censure de la loi sécurité globale. Ensuite, il faudra attendre sa promulgation qui ne peut intervenir qu’après la décision du Conseil constitutionnel si celui-ci venait à être saisi ! En effet, depuis des semaines la Quadrature du Net ainsi que d’autres associations essaient de trouver 60 parlementaires (député-es ou sénateur·trices) nécessaires à la saisie de ce Conseil. A ce jour (le 16/12), rien n’est fait même si en théorie, tout devrait conduire à une nouvelle censure des drones dans cette nouvelle loi. Rappelons ici que les forces de répression, gendarmerie et police, ont des centaines de drones à faire fonctionner légalement. Lorsque cette loi sera promulguée, nous reviendrons en détails sur son contenu.

Source : laquadrature.net

QR code-isation de la société

Le QR code s’impose partout dans le monde. Le QR code est une sorte de super code-barres. Son nom signifie en anglais « quick response code », « code à réponse rapide ». Il se lit en effet dix fois plus rapidement que le code-barres. Grâce à ses deux dimensions, il peut être lu quel que soit l’angle de lecture. Il contient aussi 200 fois plus de données qu’un code-barres classique. Cette technologie fut inventée en 1994 par le Japonais Masahiro Hara, un ingénieur de Denso Wave, une filiale de Toyota qui fabriquait des pièces automobiles. Les ingénieurs souhaitaient alors mieux suivre l’itinéraire des pièces détachées à l’intérieur des usines. Son usage a permis à Toyota de déployer sa stratégie au tournant des années 2000. La multinationale cherchait un moyen d’identification automatique pour accélérer la cadence. L’idée était de produire à flux tendu avec une coordination constante entre la tête de la multinationale et l’ensemble des sous-traitants, des fournisseurs aux revendeurs. Pour améliorer ses marges et son pouvoir, Toyota a créé une obsession de la traçabilité en tout point.

Cette évolution répondait aussi à un objectif politique. « Les projets d’automatisation de la production avaient pour but essentiel de renforcer le contrôle managérial sur la force de travail bien plus que d’augmenter les profits », analyse le groupe Marcuse (Mouvement Autonome de Réflexion Critique à l’Usage des Survivants de l’Économie) dans son livre « La liberté dans le coma ». Les auteurs estiment que les dispositifs comme le QR code, la puce RFID ou la biométrie participent à une vaste « contre-insurrection ». L’informatisation de l’organisation industrielle a dépossédé la classe ouvrière de ses savoir-faire, détruit les solidarités dans l’usine et accru la surveillance au profit d’un projet cybernétique où les machines communiquent entre elles et où les hommes deviennent quantité négligeable.

À l’origine, le QR code a été créé pour accroître l’automatisation dans le milieu industriel et répondre aux besoins du capital. « En vingt ans, nous sommes passés d’un outil pour intensifier la logistique à un outil pour régir et contrôler les humains dans tous les aspects de leur vie, constate l’historien François Jarrige. Le QR code, qui s’appliquait d’abord aux flux de marchandises, sert désormais à gérer et surveiller le troupeau humain. » Une forme de réification (volonté de considérer une personne comme un objet) est à l’œuvre. En effet avec ces dispositifs de traçage numérique, on s’occupe des humains comme des choses.
Cette technologie accélère notre dépendance au numérique et nous fait entrer de plain-pied dans l’ère du flash, un monde peuplé de scanners, d’écrans, un monde illisible à l’œil nu où nous déléguons notre regard aux machines et c’est une évidence de dire que nous ne sortirons pas de ce monde une fois la pandémie passée !

Source : reporterre.net

Répondre à cet article


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette