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[Antinuc] Procès du 08/12 du GANVA.

dimanche 12 décembre 2010, par OCLibertaire

Le 05 novembre dernier les compagnon-ne-s du GANVA (Groupe d’action non violente antinucléaire) organisait sur Caen une action de blocage contre un train de déchets radioactifs en route vers le centre de stockage de Gorleben en Allemagne.
Si l’action a permis de retenir le train 3 heures, elle a également donné lieu à des poursuites contre 7 compagnon-ne-s antinucléaires et à des blessures sérieuses pour 3 d’entre eux-elles (brûlures sérieuses
avec complications et tendons de main sectionnés).
Le 08 décembre, le procès avait lieu à Caen, et nous sommes un certains nombres à nous être mobilisés.


Voir en ligne : infos CRAN (collectif radicalement antinucléaire)

 CAEN : AUTOUR DU PROCES DES INCULPE-E-S DU GANVA.

Le samedi 04 décembre, un rassemblement a été organisé pour appeler au procès. Une agence EDF a été redécorée pour l’occasion. Des pubs détournées...

Le 07 un débat public a eu lieu avec une projection du film « Nicht mit uns » sur un transport de déchets en Allemagne en 2005. Un débat s’en est suivi sur les modes de lutte, le reflux de la lutte antinucléaire sur Caen et ailleurs et les éventuelles raisons de ce reflux et sur le procès à venir.

Le 08 nous étions autour de 300 Place Fontette pour soutenir les 7 interpellé-e-s. Une cuisine est installée pour la circonstance (merci aux radicales cocottes et à la cuisine libertaire).des barnums avec
du cidre chaud, des infokiosk, Enercoop (eh oui, il y en a encore pour croire que le capitalisme vert puisse être une alternative ! )... et même des élus écolos qui viennent de s’abstenir sur un vote pro-nucléopolis, le nouveau pôle de compétitivité nucléaire Bas-Normand, à la commission permanente du conseil régional...Un tract contre le train-train nucléaire a été diffé (document joint à télécharger en pdf ci dessous)

Le procès se déroule sous forte présence policière. Les anti-émeutes et la BAC veillent dans l’enceinte même du tribunal. Le procès se révèle rapidement être un procès à charge. Le juge note au cour d’un raisonnement qui aurait fait frémir Georges Orwell, que la désobéissance, "c’est le début du fascisme".
Ce même juge cherche à démontrer que les prévenu-e-s n’auraient aucune légitimité à avoir agi de la sorte. Aucune légitimité scientifique : quelles preuves ont-il-elle-s ? Les seuils sont respectés...
Aucune légitimité politique : les français accepteraient le nucléaire. Les accusé-e-s agiraient alors en minoritaires voulant prendre le pouvoir. Aucune légitimité de conviction car les prévenu-e-s ne sauraient pas ce qu’il-elle-s ont fait et n’agiraient qu’en petits soldats.
La défense des inculpé-e-s s’organise comme lors du précédent procès de 2008, autour du principe de nécessité : le transport serait dangereux et aurait donc nécessité qu’on le stoppe, fut-ce en désobéissant.

Les témoins de la défense se succèdent. Yannick rousselet de Greenpeace France apporte son témoignage sur des actions de blocages antérieures, sur le fait qu’elles avaient été beaucoup moins violemment réprimées. Il insiste également sur le fait que les actions de Greenpeace contre les jets de déchets radioactifs à la mer avaient contribué au fait que les gouvernements finissent par y renoncer.

Un des compagnons de route de Lanza del Vasto, J-B Libouban, membre des communautés non violentes de l’Arche, est interrompu alors qu’il tente de justifier et de donner une filiation au combat non violent de la désobéissance. Un ancien délégué CHSCT de la SNCF intervient quant à lui sur les risques encourus par les cheminots aux abords des trains et souligne comment la SNCF délègue la gestion de la sécurité des « colis » nucléaires qui leur sont livrés à l’exploitant, AREVA. Un scientifique indépendant intervient lui sur les risques encourus et le danger que représentent ces transports.

S’en suivent des arguments de formes autour des conditions de garde à vue cherchant à annuler l’ensemble de la procédure.

Finalement au bout de plusieurs heures de débats, ce sont les réquisitoires. La SNCF réclame 40000€ de préjudice (retards, annulations, heures sup’, etc). La procureure s’attaque au fond. « Elle fait ensuite
une digression sur la plainte déposée par les militants pour violence policière. Elle a demandé un rapport au directeur départemental de la sécurité publique sur l’intervention des CRS. Suite aux conclusions de celui-ci, elle a classé la plainte sans suite. En effet, le DDSP estimait que la désincarcération a été faite dans le respect des normes et de la protection des personnes (sic). Les CRS ont été surpris par le dispositif mis en place par les militants, les manchons utilisés étaient inconnus des CRS. Ils ont alors utilisé un endoscope pour voir où ils devaient couper mais les militants avaient eu la « fantaisie d’ajouter de la mousse à raser » dans le manchon rendant l’endoscope inutilisable. La procureure note que les CRS ont utilisé toute l’eau à leur disposition afin de refroidir les scies lapidaires et que les bâches bleues mises en place ont servi à protéger les militants des étincelles (et non pas à empêcher la presse de voir ce qui se passé). » - source résistances. Elle requiert à l’encontre des prévenu-e-s : 2 mois de prison avec sursis et 2000€ d’amende pour les 2 personnes non enchaînées ; 2 mois avec sursis et 3000€ pour ceux qui étaient enchaîné-e-s ; 3 mois de sursis et 3000 euro pour celui qui n’a pas voulu donner ses empruntes. L’exclusion du casier B2 nécessaire à pouvoir travailler dans la fonction publique est d’avance refusé par le procureur à une vacataire de l’éducation nationale.

Il semble que la justice caennaise, simple rouage de transmission des desiderata de l’Etat et d’AREVA cherche à frapper fort. Le fric, les blessures et les menaces de prison, histoire de dissuader d’autres personnes de passer à l’action.
Pour ma part je regrette d’avoir vu surgir une ligne de défense qui faisait de la désobéissance civile non plus un moyen mais une fin via l’un des témoins de la défense, Libouban, ou plus tard Yannick Rousselet présentant des actions minoritaires comme pouvant faire stopper des activités des nucléocrate. Je le regrette d’autant plus à un moment où nos formes d’actions méritent d’être questionnées et d’être imaginatives au risque de sombrer dans le piège que nous tend comme jadis
l’Etat . Nous ne pouvons faire l’économie d’un mouvement vaste, mêlant différentes formes d’action, d’organisation, terrains de lutte (des THT aux transports...). Parce que nous ne pouvons déléguer la lutte à quelques-un-e-s chargée-e-s de se battre à notre place, ni à d’éventuelles études scientifiques, ni à des élu-e-s politiques si prompts à nous trahir ou à se rallier à la real politik, encore moins à la justice dont on voit encore une fois aujourd’hui à quel point elle est aux ordres.

L’heure est à la solidarité avec les compagnon-ne-s. Le soir même du procès avait lieu aux ateliers intermédiaires un concert de soutien.
Des actions de soutien ont également eu lieu dans d’autres villes comme à bordeaux où les locaux d’AREVA ont été visités et des tracts distribués - http://paris.indymedia.org/spip.php... – L’heure est au soutien est à la lutte contre le nucléaire et son monde mortifère▪

Un quidam solidaire contre la société nucléaire

 Compte-rendu non exhaustif des 6 heures de débat de mercredi dernier.

Pour le blocage du train de « l’enfer », 7 personnes comparaissent devant le tribunal de grande instance de Caen : 1 allemand et 6 français. Beaucoup de soutiens sont présents à ce procès mais tous ne pourront pas assister à l’audience car la contenance de la salle est limitée à 80 personnes. La section d’intervention de la direction départementale de la sécurité publique (D.D.S.P.) est présente en tenue de maintien de l’ordre dans l’enceinte même du tribunal et empêche toute intrusion intempestive.
Quelques personnes, après avoir été soumises au détecteur de métaux, tentent d’accéder à la salle d’audience, les policiers les en empêchent. Puis l’ordre est donné de « dégager » la salle des pas perdus, les militants se retrouvent finalement dehors. A l’intérieur de la salle, les 3 juges appellent tour à tour les 7 prévenus, leur demandant de décliner leur identité et d’expliquer leur geste. Un traducteur est présent pour le prévenu allemand. Le président du tribunal, qu’on entend à peine, faute de sonorisation, lit ensuite l’ordonnance les ayant convoqué devant lui et rappelle les faits dans les détails : le vendredi 5 novembre 2010, au point-kilométrique (PK) 247,1, 5 personnes se sont enchaînées au rail et 2 autres étaient sur les voies afin de signaler la présence des militants sur les voies. A 16h15, les forces de l’ordre interpellent les 2 premières militantes dont l’une était porteuse d’une fusée éclairante. A 16h40, 2 militants qui étaient liés sont désentravés et conduits au commissariat. A 17h45, une troisième personne est désentravée non sans difficulté. A 18h40, une autre personne est désentravée et enfin à 18h50, la dernière personne est désentravée et amenée dans une ambulance des pompiers au vu de ses blessures (section de deux tendons fléchisseurs de l’index). A 19h, le convoi repart. Après le descriptif des faits, le juge note que les prévenus ont refusé de s’exprimer devant les officiers de police judiciaire lors de la garde à vue mais pas devant le juge des libertés et s’étonne de ce comportement. Chaque prévenu est ensuite appelé individuellement et sommé d’en dire plus sur l’action. Au vu des réponses, le président se permet d’affirmer que « le train n’était pas dangereux car le taux d’exposition était très faible », il ajoute qu’il a lui même fait des recherches sur les taux d’exposition, de contamination. Ce qui lui permet de dire que les militants sont « peu arrimés côté scientifique ». Les militants se défendent comme ils peuvent mais le président du tribunal reste sur la même ligne : le transport de déchets nucléaires n’est pas plus dangereux que le transport de matières chimiques donc pourquoi se focaliser sur le nucléaire. Le président auditionne ensuite le militant qui a refusé de donner son ADN selon la procureure. Il rétorque qu’il a juste refusé de donner ses empreintes digitales et de se faire photographier. Le président le questionne donc sur les motivations de son refus : le militant explique que même si son acte est illégitime aux yeux de la loi, il estime qu’il est légitime par rapport à ses convictions et qu’en conséquence, il n’a pas à être fiché comme un vulgaire délinquant. Le président indique que le fichage est réglementé et consacré par des lois et donc personne ne peut s’y soustraire. Le militant répond qu’il s’inscrit dans une démarche non- violente et de désobéissance civile. Le président estime qu’à partir du moment où on érige la désobéissance à la loi comme doctrine, c’est le début du fascisme ! L’auditoire marque sa désapprobation des propos du président. C’est au tour d’une militante d’être entendu, elle venait auparavant de prendre à partie le président sur la question du fichage, considérant que les militants n’avaient pas à être fiché comme du bétail. Elle explique son action par le fait que la question du nucléaire n’est pas discutée en France et qu’il n’y a pas d’autres moyens de se faire entendre. La procureure intervient et lui lance « vous n’êtes pas là pour refaire le monde ! ». Ce à quoi la militante répond : « eh bien si ! ».

Après avoir entendu les prévenus, le président donne le droit à la défense de présenter ses témoins. Le premier d’entre eux est un militant de longue date de la non-violence, c’est même l’un des initiateurs en France. Il a cofondé les Faucheurs volontaires d’OGM. Il explique au tribunal la philosophie même de la non-violence et de la désobéissance civile. Et il note très fortement que les moyens qui ont été utilisés pour désincarcérer les militants ressemblent à de l’intimidation. Visiblement, le témoin ne plaît pas à la procureure qui prend la parole en rappelant que le sujet de l’audience n’est pas le nucléaire mais l’entrave à la circulation d’un train. Les avocats de la défense indiquent au contraire que le témoin est parfaitement dans le sujet. Il indique qu’il a lui même participé à une action non-violente en 1958 en s’introduisant sur le site nucléaire de Marcoule (le premier site français). Il termine son intervention en félicitant les 7 militants car ils continuent le combat auquel il a lui même participé. La salle applaudit l’intervention, ce qui n’est pas du goût de la procureure qui se lève en disant « on n’est pas dans une salle de spectacle ! ». Le deuxième témoin est Yannick Rousselet, chargé de mission chez Greenpeace. Il témoigne sur le fait qu’il a participé lui même à une action similaire il y a quelques années de cela. L’action s’était bien déroulée et la désincarcération s’était bien passée, sans heurts. Il s’étonne donc que l’opération se soit déroulée autrement pour les 7 militants et de la violence des forces de l’ordre. Le président le questionne alors sur l’efficacité de ce type d’action. Yannick Rousselet répond que dans les années 80, Greenpeace tournait en zodiac autour des bateaux qui jetaient des fûts de déchets nucléaires en pleine mer. L’image d’un fût tombant sur un zodiac avait fait le tour du monde. Du coup, la France avait décidé d’arrêter ce type de stockage. Une autre campagne plus récente d’actions non-violentes a permis l’arrêt de l’exportation des déchets nucléaires en Sibérie.

Il faut donc du temps avant que les actions aient un impact. Le troisième témoin de la défense est un cheminot (aiguilleur) du triage de Villeneuve Saint Georges (le plus grand de France). Il est délégué syndical et secrétaire du CHSCT (Commission Hygiène et Sécurité et des Conditions de Travail) du triage. Sur son lieu de travail, beaucoup de convois de déchets passent. Mais c’est en tant qu’ancien élu au CA de la SNCF et secrétaire d’un CHSCT qu’il intervient. Il estime, d’après son expérience, qu’il y a un risque de contamination sur ce genre de transport avec les poussières. Mais la SNCF nie cela et estime qu’en tant que transporteur, elle reçoit des « colis » sains et donc qu’elle n’a pas à se soucier de la sécurité des cheminots. Les CHSCT ont plusieurs fois demandé à avoir des informations fiables pour les cheminots qui travaillent sur les convois mais la SNCF s’y refuse. De même, des informations ont été demandées à AREVA qui n’a pas donné suite. Il informe aussi le tribunal que l’A.S.N (Autorité de Sûreté Nucléaire) préconise la mesure des doses d’irradiation pour les forces de l’ordre qui accompagnent les convois mais pas pour les cheminots qui travaillent dessus ! Ceux de Valognes demandent que soit mesurée la radioactivé depuis 1998 mais la SNCF n’est guère pressée de leur répondre. Sur l’action même, en tant que cheminot, il estime que les militants ont parfaitement respecté les consignes internes de la SNCF pour faire arrêter d’urgence un train et donc que l’action n’a causé aucun problème de sécurité ferroviaire. L’avocat de la SNCF prend la parole pour demander pourquoi les syndicats et CHSCT ne déposent pas de référé péril imminent comme ils le pourraient. Les avocats de la défense répondent qu’il est matériellement impossible de déposer un tel recours devant la juridiction compétente (tribunal administratif). Pour ce convoi, l’arrêt d’exécution a été délivré le 22 octobre soit 2 semaines avant le départ du train. Quand bien même un recours aurait été déposé, l’affaire aurait été jugée après le passage du train... Le 4ème témoin est membre d’un centre indépendant d’expertise à Paris. Il intervient sur des données très techniques sur le convoi en question.

Il estime que les 11 wagons présents représentent l’équivalent de produits nucléaires d’une centrale. Donc le 5 novembre denier, c’était une centrale nucléaire qui se baladait sur rail ! Dans un autre ordre d’idée, c’est l’équivalent d’un quart de la radioactivité relâchée lors de Tchernobyl. Le président du tribunal le reprend là dessus car il estime que la comparaison avec des incidents de ce type n’est pas possible car les déchets nucléaires sont vitrifiés et confinés et ne peuvent donc pas être relâchés. Les débats durent depuis 3 heures, les avocats de la défense demandent une suspension de séance que le président accorde.

Après 20 minutes de pause, les avocats de la défense plaident sur la forme. Ils demandent en premier lieu la nullité de la garde-à-vue car ils l’estiment disproportionnée notamment dans sa durée à cause de l’état de santé des militants. Il y a aussi disproportion entre le délit (l’entrave à la circulation ferroviaire) et la garde-à-vue que la Convention Européenne des Droits de l’Homme, dans son article 3, considère comme un traitement inhumain. L’avocate d’AREVA, sur la forme, rejette la nullité de la garde-à-vue considérant que celle-ci n’est pas encore déclarée illégale (suite aux récentes décisions européennes) et qu’elle s’en remet à un arrêt récent de la cour de cassation : il faut attendre une nouvelle loi qui encadre la garde-à-vue. La procureure dit la même chose et rejette la nullité de la garde-à-vue car les récentes décisions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (C.E.D.H.) n’ont pas de portée générale et donc qu’elles ne sont pas applicables à la France (c’est la Turquie qui a été condamnée par la C.E.D.H.). Elle poursuit que tous les militants étaient parfaitement au courant de leur droit et que les conditions de la garde-à-vue ont été respectées car ils ont pu voir un médecin, qui a estimé que leurs états étaient compatibles avec une garde-à-vue. Il y a eu donc, selon elle, « un strict respect de la procédure ».

Les avocats des parties civiles plaident maintenant sur le fond. Pour celle d’AREVA, les militants ont reconnu avoir participé à l’action donc il n’y a aucun doute à avoir. Elle attaque donc sur la justification de l’acte. Selon elle, le convoi ne représentait pas un danger car AREVA confine et transporte proprement les déchets et que l’entreprise respecte les normes internationales en la matière.

Selon elle, « la question du transport [de déchets nucléaires] est définitivement réglé » (sic). Et donc, si le convoi n’est pas dangereux, les militants ne peuvent implorer l’état de nécessité comme le prévoit la loi. Concernant le préjudice qu’AREVA a subi, elle estime qu’il est important car l’entreprise a été limite diabolisée dans la presse ; elle parle d’une « campagne anxiogène » de la part de la presse en citant les articles du Monde, JDD, le Figaro. Elle demande donc 1€ par militant. C’est au tour de l’avocat de la SNCF de plaider. Il commence sa plaidoirie par des questions auxquelles il répond : est- ce légitime de s’attacher aux rails ? Non, c’est un délit. Est ce que le train répondait aux normes de transport de déchets nucléaires ? Les militants n’ont pas réussi à prouver le contraire. Est-ce un état de nécessité de s’enchaîner pour arrêter un train ? Non car il n’y a pas de danger et que les militants n’ont pas utilisé tous les recours légaux à leur disposition pour prouver la dangerosité. Sur le préjudice subi par la SNCF, l’avocat insiste sur le fait que les militants ont des soutiens et donc qu’ils pourront payer !

L’avocat fait un décompte minutieux des frais de ralentissements (trains en retard), de ceux de suppressions (partielles et totales) ainsi que les heures supplémentaires des agents SNCF. Il aboutit à une somme d’environ 40 000 € !

C’est ensuite au tour de la procureure de faire ses réquisitions sur le fond. Elle rappelle que les débats judiciaires avaient pour objet l’entrave et non le nucléaire. Elle n’a pas entendu de la part des militants de réelles explications sur l’action mais qu’à contrario celle-ci avait nécessité beaucoup de préparation (étude des normes pour arrêter un train, achats de matériels). Elle fait ensuite une digression sur la plainte déposée par les militants pour violence policière. Elle a demandé un rapport au directeur départemental de la sécurité publique sur l’intervention des CRS. Suite aux conclusions de celui-ci, elle a classé la plainte sans suite. En effet, le DDSP estimait que la désincarcération a été faite dans le respect des normes et de la protection des personnes (sic). Les CRS ont été surpris par le dispositif mis en place par les militants, les manchons utilisés étaient inconnus des CRS. Ils ont alors utilisé un endoscope pour voir où ils devaient couper mais les militants avaient eu la « fantaisie d’ajouter de la mousse à raser » dans le manchon rendant l’endoscope inutilisable. La procureure note que les CRS ont utilisé toute l’eau à leur disposition afin de refroidir les scies lapidaires et que les bâches bleues mises en place ont servi à protéger les militants des étincelles (et non pas à empêcher la presse de voir ce qui se passé). Selon la procureure, le discours des militants sur leur motivation est « basique, simpliste » et qu’ils n’ont pas pu avancer de données sur la dangerosité du train donc l’état de nécessité ne peut être invoqué. C’était aussi une action concertée et donc elle requiert 2 mois de prison avec suris et 2 000€ d’amende pour les deux militantes qui étaient sur les voies mais non enchaînées, 2 mois de prison avec sursis et 3 000€ d’amende pour ceux qui étaient enchaînés et 3 mois avec sursis et 3000€ d’amende pour le militant qui a refusé de donner ses empreintes. Elle indique que le cautionnement servira à dédommager les parties civiles et à payer les amendes. Elle refuse par avance l’exclusion de l’inscription de la condamnation au casier judiciaire bulletin n°2 pour la militante qui travaille dans l’Education nationale.

Il est 18h20 quand les avocats de la défense commencent à plaider. Maitre Lehoux débute la sienne par une longue citation de Stéphane Hessel tirée du livre « indignez vous ». En paraphrasant Stéphane Hessel, il indique que l’indignation des prévenus, c’est le transport de nucléaire. Il parle ensuite des militants, de leur passé et des liens qu’ils ont avec le nucléaire (lieu de naissance près de la Hague, études, etc...) pour expliquer les motivations de l’action. Il parle ensuite de l’intimidation qu’on subit les militants antinucléaires avec un cautionnement disproportionné alors qu’ils sont tous là, le fait qu’AREVA dépêche deux avocats du barreau de Paris pour la défendre. Il interroge ensuite l’avocat de la SNCF qui n’a pas réussi à produire assez de justificatifs concernant les retards ni à démontrer que ces derniers étaient forcément liés à l’action. Il termine sa plaidoirie en demandant l’aide juridictionnelle pour l’ensemble des prévenus.

La deuxième avocate, de Rennes, débute son allocution en reprenant le président et la procureure qui ont parlé de débats depuis 30 ans sur le nucléaire. Mais en 1974, le plan Messmer qui décide de miser sur l’énergie nucléaire n’a pas fait l’objet de réels débats au parlement. Et depuis, il n’y a eu aucune consultation de la population. Elle parle même d’opacité dans les prises de décision concernant le nucléaire. Elle parle de la relance du programme en 2003 qui avait été précédé d’un débat national avec une commission de sages présidée par Edgar Morin. La commission avait rendu un avis défavorable à la poursuite du programme mais le gouvernement a passé outre cet avis. De même, en 2004, lors du vote sur l’EPR, les députés et sénateurs ont voté avant qu’un rapport d’experts indépendants sur la sûreté de l’EPR ne soit rendu ! Plus récemment, le nucléaire a été exclu du Grenelle de l’environnement. C’est dans cette absence de débats par les voies démocratiques que les militants ont agi. Le troisième avocat demande aux juges d’utiliser leur pouvoir d’interprétation de l’état de nécessité. Il estime que les nuisances et les pollutions irréversibles du nucléaire en font un danger imminent et donc pour faire face à ce danger imminent, l’action est la seule possible. Car, il se demande comment peut on faire un recours alors que les informations sur le convoi sont classés secret défense (comme beaucoup de ce qui concerne le nucléaire). Selon lui, l’état de nécessite découle de l’absence de possibilité de recours et de débats démocratiques ; il demande donc la relaxe.

Les plaidoiries se terminent à 20h10, le président du tribunal fixe au 26 janvier la date du délibéré. Les militants restent encore de longue minutes dans la salle d’audience entourés de leurs soutiens et avocats. Quelques uns répondent aux questions des journalistes. Puis tout le monde sort de la salle et se retrouvent nez à nez avec la section d’intervention qui « garde » la salle des pas perdus. Dehors, il reste encore une cinquantaine de personnes, les stands ont été démontés mais des braséros continuent de se consumer au centre de la place Fontette. Une militante prend la parole et remercie les personnes qui sont venus les soutenir durant toute la journée. Les avocats prennent ensuite la parole et expliquent que, selon eux, l’audience s’est bien passée. Enfin, un des témoins prend la parole et se félicite de la mobilisation autour de ce procès. Il est bientôt 20h30 et une bonne partie des présents prend la direction de la presqu’île afin d’assister au concert de soutien aux ateliers intermédiaires.

SOURCE : B. -RESISTANCES CAEN.

P.-S.

Pour soutenir le GANVA vous pouvez envoyer des sous à :

GANVA Fond de soutien : chèque à l’ordre de l’APSAJ -

Association Pour la Solidarité et l’Aide Juridique,
APSAJ, 6 cours des alliés,
35000 Rennes

Code IBAN : FR76 4255 9000 5541 0200 1473 207
Code BIC : CCOPFRPPXXX

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