lundi 24 octobre 2011, par
La tempête a fini par, relativement, se calmer en Libye, après sept mois de guerre et des milliers de morts, des milliers de blessés, d’handicapés à vie et de disparus. L’Otan a fait son travail de destruction massive des infrastructures, il reste très peu de choses à bombarder ; des groupes armés d’insurgés ont le contrôle de la quasi-totalité du territoire libyen ; apparemment, cette première étape est achevée, il reste la plus compliquée celle de la construction de la vie politique libyenne « la démocratie », la mise en place des institutions et là, les conflits d’intérêt des diverses factions se font jour. Des critiques contre le CNT commencent à apparaître et les différentes tendances politiques et idéologiques se dessinent plus nettement.
Voir en ligne : Chronique libyenne - Brochure
Ce mouvement, dès le 15 février, a fixé comme objectif unique, la chute du colonel Kadhafi sans aucun autre projet politique, si ce n’est le mot « Liberté » comme unique programme mais sans contenu clairement défini même si tout le monde entend liberté d’expression, liberté d’entreprendre, de créer des associations et des partis politiques, liberté de manifester, etc., tout ce que les Libyens commencent à faire. Les Libyens respirent, sortent dans les rues, agitent le drapeau libyen, américain, français et celui du Qatar ; ils créent des centaines d’associations, des groupes de discussion, organisent des débats, des colloques, des conférences notamment à Benghazi, Zouara, Neffoussa et Misrata. On voit les compagnies pétrolières revenir petit à petit, la production reprend doucement, l’argent libyen bloqué aux USA, en Angleterre et en France est en partie à nouveau accessible pour aider le CNT à payer les factures à ces mêmes pays, la vie reprend son cours normal, surtout dans les grandes villes…
Les débats qui animent la société portent sur trois ou quatre sujets d’importance capitale pour l’avenir du pays. Premièrement sur la forme de l’état libyen : central ou fédéral ? C’est à Benghazi qu’on en discute là où la population est plutôt favorable à une sorte de fédéralisme car elle a souffert pendant 40 ans du centralisme du régime de Kadhafi. Toutes les institutions et centres de pouvoir et de décision étaient basés à Tripoli, il fallait faire des milliers de kilomètres pour obtenir un papier. Ce projet intéresse aussi les régions berbères qui ont besoin d’institutions spécifiques, notamment dans le secteur éducatif à propos de la langue qui était interdite et réprimée. La région du Sud de la Libye peut aussi être favorable au fédéralisme, en particulier les Touaregs et des villes isolées dans le désert. Mais il y a beaucoup de réticence par crainte d’une partition du pays, du risque d’apparition de conflits autour des emplacements de gisements pétroliers et d’inégalité d’accès aux richesses du pays. Le deuxième sujet brûlant du débat, lié indirectement au précédent, est l’identité de la Libye. Le CNT (conseil de transition national) inexpérimenté et sous la pression de certains groupes islamistes a élaboré un projet de constitution provisoire stipulant que la Libye est un pays musulman et l’Arabe en est sa langue officielle ; cela à l’instant même où les Berbères de Neffoussa et Zouara, ville situées à l’ouest, menaient des combats acharnés contre les troupes de Kadhafi ; ils n’ont bien sûr pas accepté ce projet. Les Berbères n’accepteront plus d’être des citoyens de seconde zone après leur participation active et massive aux combats et surtout parce que pendant 40 ans ils ont été visés en permanence par la répression et la négation de leur identité. Les Berbères organisent un grand colloque à Tripoli du 26 septembre au 3 octobre 2011 pour discuter de la constitutionnalisation de la langue berbère en invitant des personnalités du CNT hostiles à ce projet, notamment Fathi Terbel. Celui-ci a, pendant une réunion du CNT, insinué que les berbères jouent la partition de la Libye, qu’ils sont manipulés de l’étranger, etc. Un grand meeting est prévu le 27 septembre, sur la grande place de Tripoli avec un concert où pour la première fois des chanteurs et musiciens berbères pourront se produire en public, sans craindre d’être arrêtés avant ou après le concert. Il y aura Dania, jeune chanteuse apparue il y a quelques mois, portée par la vague d’enthousiasme général et devenue une véritable icône de la cause berbère en deux ou trois chansons. Cet événement peut être un test pour la société libyenne. Autre sujet, celui de l’incorporation de figures de l’ancien régime au sein du CNT mais aussi dans la majorité des représentations politiques et diplomatiques. Les Américains et les Européens ont insisté sur la nécessité de garder les anciens cadres et pratiquent une intégration appuyée pour éviter le scénario irakien et garantir leurs intérêts avec des gens qu’ils connaissent déjà, sans prendre de risques avec des personnalités inconnues de leurs services. Le CNT est bien sûr d’accord avec cette stratégie, mais les Libyens ne l’entendent pas de la même oreille, si l’on peut dire. Ainsi à Benghazi, le 9 septembre, s’est déroulée une impressionnante manifestation devant le siège du CNT pour exiger la non intégration au Conseil, d’anciens responsables du régime et même demander l’éviction ou la démission de Mahmoud Jibril, le numéro deux du CNT, premier ministre qui, lui, était un des piliers du régime de Kadhafi. Les nouveaux ambassadeurs libyens en France et en Grèce, récemment désignés par le CNT, et tous deux issus de l’ancienne équipe diplomatique, ont été refusés par les communautés libyennes de ces deux pays qui ont envoyé des courriers dans ce sens au CNT. Un quatrième sujet non moins important, est la place de l’Islam dans la constitution. La constitution provisoire du CNT stipule à l’article 1 que « la charia islamique est la source principale de la législation », ce qui n’est pas du goût des « laïcs » au sein du CNT qui préfèrent les termes : « une des sources de législation » ; quant aux fondamentalistes, djihadistes et islamistes radicaux, eux, préfèrent, « source unique de législation ». Ce débat, à notre avis, pourrait, s’il n’est pas tranché par des discussions ou par un vote, être réglé par les armes, ce qui augurerait d’un épisode sanglant prochainement.
La convergence d’intérêts entre la politique des USA et des islamistes est connue de toute personne qui veut bien voir au-delà de la propagande, à commencer par la création d’un personnage comme Ben Laden afin de se servir de lui pour mener des guerres en Afghanistan et en Irak et finalement l’assassiner et jeter son corps à la mer. En Libye, la démonstration est plus claire avec cette collaboration qui dure encore, sous d’autres formes, entre les islamistes et l’Otan. Cette fois-ci, à partir du 20 août, quelques jours avant le dixième anniversaire de l’attentat des Twin Towers, l’aviation de l’Otan bombarde Tripoli pendant trois jours, de manière très intensive pour préparer la ville à recevoir des groupes islamistes, armés par la France et le Qatar qui vont prendre le contrôle de la ville avec une facilité déconcertante. Quelques jours plus tard, Abdelhakim Belhaj, considéré il y a quelques années comme un terroriste dangereux et traqué par la CIA, devient gouverneur militaire de Tripoli. Le 20 août est aussi le vingtième jour du Ramadan, date symbolique pour les islamistes du jour de la reconquête de la Mecque par le prophète Mohammed, au titre de chef d’état musulman. Le choix ne peut être plus clair : c’est l’acte fondateur d’un état musulman. On observe une sorte de jeu théâtral qui se dégage de la scène des opérations, notamment sur la position du Qatar qui soutient sans aucune réserve le CNT et ses membres, tout en envoyant des cargaisons d’armes aux djihadistes radicaux, et diffusant les critiques de Ali Sallabi, chef spirituel des Frères Musulmans, sur les ondes de sa chaine Al Jazeera. Les conflits mis en scène entre le CNT, les brigades armées, les frères musulmans et les libéraux paraissent superficiels, fictifs et semblent n’être là que pour faire monter les enchères à propos de l’Islam. En brandissant le spectre d’Al Qaîda par la mise en avant médiatique de Abdelhakim Belhaj (qui, notons au passage, a reconnu la légitimité du CNT) on finit par faire passer la pilule de l’islam comme source principale de législation, considérée alors comme une solution « modérée » déplaçant ainsi le débat entre islam ou non islam, vers islam intégral ou islam partiel. Et ce qui vient étayer cette thèse, c’est le fait que toutes les critiques contre le CNT d’où qu’elles viennent ont, jusqu’à ce jour, épargné Mustapha Abdeljalil, ex-ministre de la justice de Kadhafi, spécialiste de la charia islamique et président du CNT.
Abdelhakim Belhaj, commandant militaire de Tripoli depuis septembre 2011, fondateur du Groupe Islamiste Combattant (GIC) est né le 1er mai 1966, il commence sa vie de djihadiste, en 1988, en Afghanistan où il ouvre un camp d’entrainement militaire au nom du GIC. De retour en Libye à la fin de la guerre d’Afghanistan, en 1993, il commence à organiser à Benghazi les islamistes et inciter les jeunes à rejoindre les comités révolutionnaires pour bénéficier de la formation et de l’entraînement militaire avec accès aux armes.
Dans les années 90, la répression contre ce groupe a été terrible, Kadhafi utilisant l’aviation pour tuer la majorité de ses membres, une petite partie réussit à fuir à l’étranger, surtout en Angleterre. Il voyage alors dans près de 20 pays : Pakistan, Turquie, Afghanistan, Soudan, …. En 2003, la CIA l’arrête alors qu’il s’apprêtait à quitter la Malaisie pour le Soudan. Il sera transféré dans une prison secrète à Bangkok en Thaïlande, puis livré par la CIA et par l’entremise d’officiers anglais, aux services secrets de Kadhafi en 2004. En 2009, dans un vaste projet de libéralisation et une politique de réconciliation avec l’opposition et le GIC entre autre, Saïf Al Islam, le fils de Kadhafi, par l’intermédiaire de Ali Sallabi, relâche Belhaj qui entre temps a révisé sa doctrine et annonce alors que la guerre sainte contre Kadhafi n’est pas légale, que le jihad n’est nécessaire dans les pays musulmans que lorsqu’ils sont envahis par une armée étrangère comme en Afghanistan, en Irak ou en Palestine. Il est libéré avec une centaine d’autres membres du GIC en 2010, quelques mois avant le début de l’insurrection qu’il rejoint aussitôt. Ensuite il part effectuer un stage intensif de 3 mois au Qatar avec des formateurs de l’Otan pour préparer l’assaut final du 20 août sur Tripoli.
Ce qui se dessine nettement aujourd’hui, c’est un avenir pour la Libye qui se joue entre plusieurs forces antagonistes, voir hostiles l’une à l’autre. D’une part une représentation politique par le CNT, reconnu dans le monde entier, la France en tout premier jusqu’à l’Iran récemment, en passant par l’OPEP et le FMI ; il est totalement incompétent et subi des pressions de tout part, hétéroclite dans sa composition, il souffre d’un manque de légitimité parmi la population et parmi les combattants. La seule figure qui pouvait faire le lien entre le CNT et les combattants sur le terrain était le général Abdel Fettah Younès, transfuge du régime de Kadhafi, chef de l’armée assassiné le 28 juillet, accusé d’avoir des contacts et de mener des négociations secrètes avec Kadhafi et de jouer un double jeu. Responsable de la répression contre les révoltes islamistes en Cyrénaïque, dans les années 90/95, il était devenu le chef d’Etat-major de la rébellion. D’autre part, les brigades des Révolutionnaires - Kataïb Al Thouar-, sont contrôlées principalement par les islamistes radicaux, tout en sachant qu’elles ne sont pas non plus homogènes et qu’il y a des risques de tension ou de rivalités entre les diverses factions représentées, entre autres par Abdelhakim Belhaj, Ismaïl Sallabi, un des fondateur du GIC, emprisonné de 1997 à 2003, chef de la brigade du 17 février à Benghazi à la tête de 3500 hommes, très critique à l’encontre du CNT et Abdelhakim Al Assadi de Derna, à l’Est de Benghazi. A côté de ces brigades entrainées, expérimentées et endoctrinées, existent des multitudes de petites unités de citoyens qui ont pris les armes et rejoint l’insurrection de façon spontanée. Elles suivent les directives du CNT quand il y en a, sinon opèrent de manière autonome aux check-point, montent la garde devant des bâtiments publics, etc. La population des grandes villes, spécialement à Tripoli, émet des réserves quant à la présence d’armes et d’hommes armés un peu partout dans la ville. Le CNT a demandé aux membres de toutes les unités, entrées dans Tripoli début septembre, de rendre leurs armes et de rentrer chez eux. Il leur a même été proposé de racheter leurs armes, considérées comme une prise de guerre à l’ennemi, mais il reste encore des quantités impressionnantes d’armes ce qui ne rassure pas les pays voisins comme l’Algérie, le Niger ou le Soudan. L’armée libyenne de libération, constituée à Benghazi par le général Younès, complètement démunie et inopérante, compte actuellement à peine 5000 soldats. Les anciennes unités de l’armée libyenne ont entièrement déserté et sont rentrées à la maison. Le CNT leur avait proposé soit d’intégrer la nouvelle armée soit de rentrer chez eux. Sans oublier, les forces de Kadhafi militaires et civiles, (les pro-Kadhafi) qui n’auront pas été exterminés ou jeter en prison ou exilés car vu leur nombre ils seront toujours présents et/ou actifs dans le pays.
Actuellement, une seule force est visible et active : ce sont les Frères Musulmans, qui sont organisés et en contact avec le CNT. Il y a un début de formation d’autres partis politiques mais sans base sociale véritable. Un leader qui ne fait pas parti du CNT ni des frères musulmans est Ali Sallabi, il est très puissant et écouté par les deux camps ; c’est lui qui, en 2009 et en 2010, a négocié avec Saïf Al Islam la libération d’islamistes, dont des membres du GIC. Il représente une sorte de figure emblématique jouant sur tous les tableaux à la fois, invité souvent à s’exprimer à la télévision Al Jazeera, il peut être un trait d’union entre les Frères musulmans, les djihadistes radicaux et les laïcs. C’est Ali Sallabi qui a déclenché les hostilités en déclarant la guerre au CNT, sur la chaine Al Jazeera le 12 septembre 2011, plus particulièrement contre Mahmoud Jibril qu’il qualifie de dictateur et qu’il accuse de pratiquer l’exclusion et la corruption en monnayant des postes de pouvoir à ses proches, de monter un complot des laïcs pour imposer une vision et un projet social unique pour la Libye. Comme cela a été souligné plus haut, Ali Sallabi est très écouté et très puissant d’où une panique générale après de telles déclarations qui surfent sur la vague de contestation apparue à Benghazi contre les anciens membres du régime, entre autre Mustapha Jibril. Le 13 septembre 2011 des centaines de personnes manifestent à Tripoli en soutien au conseil exécutif présidé par Mahmoud Jibril contre les déclarations d’Ali Sallabi. Quelques jours plus tard, Mustapha Abbeljalil annonce lors d’une conférence de presse, que la Libye est un pays musulman, que l’Islam libyen est un « islam du milieu » et dénonce l’extrémisme de gauche comme de droite. Ce qui satisfait pleinement Sallabi, et peut-être que la visite précipitée de BHL, accompagné de Sarkozy et Cameron, le 14 septembre, a principalement comme objet de soutenir le CNT dans ce bras de fer non déclaré avec les djihadistes qui veulent se débarrasser de Jibril et de sa clique de libéraux. Car les forces de l’Otan et les conseillers militaires sur le terrain représentent la force principale au niveau militaire qui peut faire pression sur telle ou telle faction des insurgés armés. Evidemment, l’Otan est un instrument aux mains des Français, des Anglais et des Américains qui gèrent la crise libyenne depuis Paris ou Londres, en fonction de calculs d’intérêts économiques et de politique intérieure. Ces forces resteront le plus longtemps possible et si la situation tourne mal, l’arrivée de forces terrestres est envisageable. Mahmoud Jibril, le premier ministre, a menacé à plusieurs reprises dans ses discours, de démissionner si des conflits graves font leur apparition, prévoyant ainsi l’occupation du sol libyen par des forces armées étrangères. Dans les combats qui se déroulent actuellement pour le contrôle de la ville de Baniwalid, le porte-parole de Kadhafi, Mussa Ibrahim, a annoncé dimanche 18 septembre la capture de 17 ressortissants étrangers qu’il a qualifiés de mercenaires ; parmi eux il y a 13 Français, 2 Anglais et un Qatari. Il ne faut pas oublier la majorité des libyens qui n’ont pas choisi le CNT et non pas non plus choisi de prendre les armes mais qui sont majoritairement pour un changement de régime en se débarrassant de Kadhafi. Ils attendent surtout une amélioration de leurs vies au quotidien à propos des transports, de la Santé, des écoles et du travail car ce sont surtout les jeunes qui sont au chômage et cela depuis des années. La société libyenne, malgré les richesses est une société de classe : il y a des pauvres dans les quartiers populaires des grandes villes, des petites villes éloignées des centres de décision et de production du pétrole et les travailleurs immigrés qui constituent une main d’œuvre pas chère et sans protection sociale. Mahmoud Jibril qui s’occupe de tout en ce moment, a promis au pouvoir égyptien de faire revenir deux millions de travailleurs égyptiens dès que possible. Le capitalisme a besoin d’une main d’œuvre contrôlable et bon marché. Ainsi, les riches continueront à être riches et intégrerons le nouveau pouvoir avec plus de garanties pour leurs entreprises et leurs biens. Ce sont eux qui ont un intérêt direct à un changement de régime et sont prêts à tout accepter pour cela : l’Otan, les islamistes à condition que le pays se stabilise et que les affaires reprennent. Depuis l’assassinant de Younès, il n’y a plus de gouvernement, ils ont tous été viré ; reste le premier ministre, Mahmoud Jibril, seul sans ministres. Le chef du CNT, Mustapha Abdeljalil, a déclaré vouloir former un gouvernement « d’entente nationale » vers le 20 septembre, mais après une semaine de négociations et de tractations, Mahmoud Jibril lors d’une conférence de presse annonce un retard dans la formation de ce gouvernement. Apparemment, le CNT a refusé la liste présentée par M. Jibril et son cumul de fonction comme premier ministre et ministre des affaires étrangères. Le refus porte aussi sur ce qu’on appelle en Libye « Aoqdat Misrata », ce qui signifie nœud et complexe à la fois, car les délégués de Misrata au CNT veulent être représentés au gouvernement à hauteur de leurs « sacrifices » pendant le siège de la ville. Tout laisse supposer la formation d’un gouvernement « communautaire », qui satisfait chaque grande ville, en dehors d’appréciation de compétence ou d’un projet politique. Le secrétaire général des Frères Musulmans, Souleiman Abdelkader, dénonce fortement le fait qu’il n’a pas été consulté à ce sujet. Ce gouvernement est censé gérer le pays pour huit mois à compter de la déclaration de libération de la Libye, le compte à rebours ne commencera que lorsque tout le territoire sera sous le contrôle du CNT et que Kadhafi aura été capturé ou tué. Ensuite seront organisées, sous contrôle de l’ONU, des élections pour élire une assemblée constituante chargée de rédiger une constitution et de préparer des élections législatives et présidentielles, cela un an après la date de libération du pays. Les classes populaires vont jouer un rôle décisif dans l’équilibre des différentes forces politiques du futur pouvoir en Libye. Ces forces en effet ne sont pas acquises d’avance ni au CNT ni aux Frères musulmans, encore moins aux djihadistes ou à l’Otan ; tout dépendra des réformes sociales et économiques notamment sur le travail, le logement et la santé. Pour le moment, le CNT ne s’occupe pas encore de ces secteurs pourtant vitaux, il concentre ses efforts à préparer la transition.
Toutes les critiques qu’on peut faire sur ce travail de transition sont actuellement balayées par les Libyens. Ils ne sont pas inquiets et vivent une période d’euphorie. Ils ont des arguments simples pour évacuer les critiques sérieuses qu’on peut faire : cela ne sera jamais pire qu’avant, on est dans une période de transition il faut attendre la stabilisation avant de critiquer quoi que ce soit et si cela tourne à la dictature maintenant on sait ce qu’il faut faire.
Saoud Salem, 20 septembre 2011