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Courant Alternatif 286 janvier 2019

Quelques paroles collectives de rassemblements de gilets jaunes

samedi 19 janvier 2019, par OCL Reims

Les communiqués, dont nous publions ci-dessous de larges extraits, ont pu avoir un impact sur les revendications du mouvement et son audience. Nous décidons de les publier car ils sont révélateurs de certains aspects qui nous semblent intéressant dans ce mouvement, notamment dans la critique des institutions républicaines. On est très loin du « Référendum d’Initiative Citoyenne » que certains confusionnistes voudraient vendre au mouvement...


APPEL DE SAINT-NAZAIRE (21 novembre)

« A tous, à toutes, Le mouvement des gilets jaunes exprime le ras-le-bol d’un peuple qui n’en peut plus d’être taxé, humilié, exploité, méprisé par un pouvoir toujours plus distant de sa réalité, toujours plus arrogant envers les faibles, toujours plus acquis aux puissants. Depuis le 17 novembre, les actions de blocage économique, routiers, des centres de la grande consommation se multiplient partout en France. L’objectif est d’assécher les puissances de l’argent pour faire plier un pouvoir politique qui leur est acquis. (…) Notre objectif est de redonner le plus rapidement possible le pouvoir de décision au peuple, par le peuple et pour le peuple, un pouvoir qui lui revient pleinement de droit. (…) Les représentants du pouvoir exécutif dans les régions et villes de province sont les préfectures et les sous-préfectures. Ce sont eux qui sont tenus d’appliquer les décisions politiques prises en haut lieu par des élites toujours plus déconnectées de nos réalités. Ces lieux devraient être les lieux de l’exercice d’un pouvoir populaire où la fraternité et la bienveillance se côtoieraient, où les problèmes sociaux, humains et environnementaux puissent trouver des réponses naturelles et simples, soucieuses de préserver le bien-être de chacun et celui de notre patrimoine commun – et celui-ci inclut notre environnement. Le mouvement des gilets jaunes de la zone portuaire de Saint-Nazaire a donc décidé d’organiser une assemblée dans la cour de la sous-préfecture de Saint-Nazaire le samedi 24 novembre à 14 heures. (…) Nous appelons toutes les villes de France à organiser, le même jour à la même heure, une assemblée dans les lieux d’exercice du pouvoir exécutif (…). Nous demandons aux autorités publiques de laisser le peuple entrer dans ces locaux qui sont les siens, qu’il a financés et même construits de ses mains. Nous n’attendrons plus que la solution vienne d’en haut. Les directions politiques, financières et industrielles, qui gouvernent aujourd’hui notre pays seront toujours incapables de résoudre à notre place des problématiques sociales et environnementales que, bien souvent, elles n’entendent et ne voient même pas. La solution est en nous-mêmes, en nous les travailleurs, les chômeurs, les retraités de toutes origines et de toutes couleurs. (…) Le mouvement des gilets jaunes de la zone portuaire de Saint-Nazaire »

APPEL DE COMMERCY (2 décembre)
Refusons la récupération ! Vive la démocratie directe !
Pas besoin de « représentants » régionaux !

(…) A Commercy, en Meuse, nous fonctionnons depuis le début avec des assemblées populaires quotidiennes, où chaque personne participe à égalité. Nous avons organisé des blocages de la ville, des stations-service, et des barrages filtrants. Dans la foulée, nous avons construit une cabane sur la place centrale. Nous nous y retrouvons tous les jours pour nous organiser, décider des prochaines actions, dialoguer avec les gens, et accueillir celles et ceux qui rejoignent le mouvement. Nous organisons aussi des « soupes solidaires » pour vivre des beaux moments ensemble et apprendre à nous connaître. En toute égalité.
Mais voilà que le gouvernement, et certaines franges du mouvement, nous proposent de nommer des représentants par région ! C’est-à-dire quelques personnes qui deviendraient les seuls « interlocuteurs » des pouvoirs publics et résumeraient notre diversité. Mais nous ne voulons pas de « représentants » qui finiraient forcément par parler à notre place ! A quoi bon ? A Commercy une délégation ponctuelle a rencontré le sous-préfet, dans les grandes villes d’autres ont rencontré directement le préfet : ceux-ci font DÉJÀ remonter notre colère et nos revendications. Ils savent DÉJÀ qu’on est déterminés à en finir avec ce Président haï, ce gouvernement détestable, et le système pourri qu’ils incarnent ! Et c’est bien ça qui fait peur au gouvernement ! Car il sait que s’il commence à céder sur les taxes et sur les carburants, il devra aussi reculer sur les retraites, les chômeurs, le statut des fonctionnaires, et tout le reste ! Il sait aussi TRÈS BIEN qu’il risque d’intensifier UN MOUVEMENT GÉNÉRALISÉ CONTRE LE SYSTÈME !
Ce n’est pas pour mieux comprendre notre colère et nos revendications que le gouvernement veut des « représentants » : c’est pour nous encadrer et nous enterrer ! Comme avec les directions syndicales, il cherche des intermédiaires, des gens avec qui il pourrait négocier. Sur qui il pourra mettre la pression pour apaiser l’éruption. Des gens qu’il pourra ensuite récupérer et pousser à diviser le mouvement pour l’enterrer. Mais c’est sans compter sur la force et l’intelligence de notre mouvement. (…) Et puis surtout, c’est sans compter qu’il y a une chose très importante, que partout le mouvement des gilets jaunes réclame sous diverses formes, bien au-delà du pouvoir d’achat ! Cette chose, c’est LE POUVOIR AU PEUPLE, PAR LE PEUPLE, POUR LE PEUPLE. C’est un système nouveau où « ceux qui ne sont rien », comme ils disent avec mépris, reprennent le pouvoir sur tous ceux qui se gavent, sur les dirigeants et sur les puissances de l’argent. C’est l’égalité. C’est la justice. C’est la liberté. Voilà ce que nous voulons ! Et ça part de la base !
Si on nomme des « représentants » et des « porte-parole », ça finira par nous rendre passifs. Pire : on aura vite fait de reproduire le système et fonctionner de haut en bas comme les crapules qui nous dirigent. (…) Ne mettons pas le doigt dans l’engrenage de la représentation et de la récupération. (…)
Depuis Commercy, nous appelons donc à créer partout en France des comités populaires, qui fonctionnent en assemblées générales régulières. (…) Si délégués il doit y avoir, c’est au niveau de chaque comité populaire local de gilets jaunes, au plus près de la parole du peuple. Avec des mandats impératifs, révocables, et tournants. Avec de la transparence. Avec de la confiance.
Nous appelons aussi à ce que les centaines de groupes de gilets jaunes se dotent d’une cabane comme à Commercy, ou d’une « maison du peuple » comme à Saint-Nazaire, bref, d’un lieu de ralliement et d’organisation ! Et qu’ils se coordonnent entre eux, au niveau local et départemental, en toute égalité ! C’est comme ça qu’on va gagner, parce que ça, là-haut, ils n’ont pas l’habitude de le gérer ! (…) Non aux représentants et aux porte-paroles autoproclamés ! Reprenons le pouvoir sur nos vies ! Vive les gilets jaunes dans leur diversité ! (…) »

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