Courant Alternatif
vendredi 1er février 2019, par
LE BÂTON ET LA CAROTTE
Edito page 3
Luttes sociales
page 4 : Gilets jaunes et stylos rouge
page 7 : Saint-Nazaire : La répression s’abat sur l’estuaire
page 8 : Caen : Etat des lieux non exhaustif de la répression
page 9 : Référendum d’Initiative Citoyenne
Antimilitarisme
page 10 : SNU : Quand la bourgeoisie prépare ses guerres
page 12 Les instits de 14/18
L’économie : page 13
Migrations
page 14 : Le Pacte de Marrakech
Le travail tue
page 15 : Casser du sucre à la pioche
Le mythe du mineur
page 18 : Nouveaux mythes et limites autour de la question du travail
Big Brother : page 20
Colonialisme
page 22 :Comores et Mayotte
page 24 : Kanaky
Mémoire
page 26 : La république de Bavière
International
page 28 : Italie
page 32 : Brexit
Le bâton et la carotte.
Gueule explosée, mâchoire fracturée, œil crevé, rotules, côtes... etc. Depuis le début de la révolte sociale des gilets jaunes (GJ), le 17 novembre 2018, pas une manifestation sans de nombreuses arrestations et multiples blessures graves dues aux armes de la police. Armes dites « de force intermédiaire », armes capables de causer d’irréversibles et graves lésions voir de tuer à moins de dix mètres. Comme si cela ne suffisait pas des CRS ont été déployé, armés de fusils d’assaut. Si la préfecture de police de Paris l’atteste, elle s’empresse de préciser le contexte de la menace terroriste suite à l’attentat du 11 décembre à Strasbourg. Pour ceux ou celles qui préfèrent l’humour la Préfecture précise que si des CRS ont ces fusils d’assaut avec eux, c’est pour ne pas se les faire voler dans les fourgons. « Nous avons besoin de pouvoir utiliser ces armes pour continuer à protéger l’ordre public, faire face à une grande violence, aux attaques systématiques contre nos institutions » déclare C. Castaner, le ministre des policiers. Il faut bien rassurer le bourgeois effrayé à l’image du philosophe Luc Ferry qui appelle les policiers à se « servir de leurs armes ». Ce millionnaire et ministre de 2002 à 2004 révèle jusqu’où peut aller la bourgeoisie réactionnaire apeurée, pour défendre ses intérêts et son ordre social. Fusiller la populace comme l’avait fait en son temps Adolphe Thiers en 1871, massacrant et déportant les communards avec femmes et enfants.
Mais la bourgeoisie est multiple libérale et clairvoyante. Consciente de l’effondrement de ses corps intermédiaires qui lui servaient de relais anesthésiants, pour désamorcer les colères, elle se répand en évoquant la crise des valeurs et y voit une « chance pour la France » de renouer avec la démocratie, l’union nationale et la république... par un « vécu commun ». C’est l’instauration prochaine du Service National universel pour les jeunes. Un service universel des casernes qui renoue avec l’embrigadement militaire : 3000 jeunes serons volontaires, nous dit-on, pour sa mise en service dès juin 2019.
Le pouvoir déstabilisé un temps, par l’irruption sociale des Gilets Jaunes, s’est ressaisi. Le Président conseillé entre autre par L. Berger -leader de la CFDT- lance « Un grand débat national ». Conscient de la diversité des GJ, il tente de les diviser, les invite à se faire entendre par le dialogue et à chasser les casseurs du mouvement. Pourtant, malgré la trêve des confiseurs, les GJ sont aussi nombreux à défiler dans les rues le samedi et à ne pas courber l’échine comme l’a illustré dernièrement la puissante solidarité avec Ch. Dettinger « le boxeur ». Après avoir abusé du bâton sans grand effet, le gouvernement essaie la carotte. Il préconise le dialogue avec les français et des GJ : « prêts à servir ». Il est bien évident que l’objectif est d’éclipser nombre de revendications, d’étouffer la mobilisation qui perdure depuis deux mois. Le président ouvre le dialogue mais fixe les sujets et règles des débats. Il se dit prêt à entendre, à écouter mais prévient qu’il ne changera pas de cap, qu’il ne touchera pas à l’ISF : une revendication emblématique du mouvement. Il écrit aux français, publie un livret de 6 pages mais n’évoque pas les sujets qui ont poussé les GJ sur les ronds points : les salaires, les pensions, les emplois etc. Les éditocrates et ses hérauts claironnent au succès de l’opération, mais dans la rue et l’opinion nul n’est dupe sur la finalité du coup de « com » présidentiel. Il pérore, devant les maire réunis à Bourgtheroulde, Souillac... mais ses polices doivent quadriller aux abords de ses réunions.
« Il faut donner plus de force à la démocratie, à la citoyenneté » nous dit le président après la gueule de bois infligée par le mouvement tandis qu’à l’intérieur de ce même mouvement, certains louent leur référendum d’initiative citoyenne (RIC). C’est, écrivent ses promoteurs inconnu(e)s : « l’outil démocratique qui permettra d’obtenir toutes les revendications ». Si le premier nous ment avec démagogie, les seconds -nous- ou -se- trompent et sèment illusions et futures déceptions. Macron veut anesthésier le mouvement, les promoteurs du RIC veulent le canaliser. Le premier requinqué se replace politiquement, les seconds tentent de se placer dans le mouvement. Sans doute pour des horizons électoraux ?
Il est un fait acquis, aucune consultation, élection, référendum, ne fera aboutir les revendications sociales et politiques des travailleurs ou du « peuple ». D’abord chacun.e. doit savoir que ceux qui nous exploitent et dominent ne céderont rien sans rapport de force de notre côté pour espérer gagner et imposer nos revendications. Chacun.e. sait que les politiciens au pouvoir et ceux qui attendent d’y accéder n’ont aucun pouvoir réel de décision. Ils se contentent de donner des orientations politiques et économiques aux intérêts et profits des grands patrons, des actionnaires, des financiers etc. Nos politiciens occupent le pouvoir pour gérer les intérêts des capitalistes. En 2018, 57 milliards de dividendes ont été versés aux actionnaires soit plus de 13% de plus qu’en 2017. Il n’y a aucun là aucun complot ou je ne sais quoi, que certain voient même dans les traités de « Marrakech » ou « d’Aix la chapelle » ! Non ! c’est la réalité du Capital ! Toute l’économie et donc nos vies sont régies et soumises aux lois, à la dictature des capitalistes sur laquelle gouvernants ou État n’ont que peu de prises.
Aujourd’hui le seul débat qui devrait nous préoccuper, nous les exploité.es et dominé.es, est de savoir comment « tous et toutes ensemble » nous débarrasser de ces sangsues de capitalistes qui nous plongent dans la misère et nous entraîne vers une prochaine la guerre.
Caen le 24 01 2019.