vendredi 31 mars 2017, par
SOMMAIRE
EDITORIAL page 3
GRANDS PROJETS NUISIBLES
page 4 transport et financements : l’exemple du réseau ferroviaire
page 7 Grand Paris : Big is beautiful ?!
page 8 Annonce chantier “Amba ZAD a”
NUISANCES AGRO-INDUSTRIELLES
page 9 à 11 Les dessous de la grippe aviaire
BIG BROTHER page 12 à 13
VERTEMENT ECOLO page 14
MARCHE POUR L’ÉGALITÉ
page 15 à 18 Pourquoi nous marcherons le 19 mars ?
SOLIDARITÉ MIGRANTS
page 19 Vers une coordination nationale solidaire des migrant-e-s ?
ECOLE
page 20 à 21 Les réac-publicains de l’École
NOTRE MEMOIRE : LA REVOLUTION RUSSE A 100 ANS (2)
page 22 à 27 - 1905 : l’irruption de l’ouvrier révolutionnaire russe
INTERNATIONAL
page 28 à 31 Boycotter et sanctionner Israël, il n’y a pas d’alternative
PUBLICATION
page 32 Un autre futur pour le Kurdistan ?
Editorial
Le visage sans masque du capitalisme et de l’Etat.
On a l’impression qu’enfin les masques tombent et les défenseurs du capitalisme apparaissent tels qu’ils sont, avides, cruels et stupides, mais y avait-il vraiment des masques ? Tout le monde sait depuis longtemps ce qu’il y a derrière ces visages souriants et sérieux. Qu’un personnage loufoque, misogyne, raciste, capitaliste et dingue soit élu président du pays le plus armé au monde prouve d’une manière éclatante qu’il n’y avait pas, qu’il n’y a jamais eu besoin de masque. Ce personnage est nu et ne se cache pas, il a été élu pour ces caractéristiques-là, et c’est ce phénomène qui est inquiétant.
Les qualités morales, politiques ou les capacités professionnelles ne sont pas les critères retenus pour le choix des hommes politiques. Bien pratiques cependant ces bruits médiatiques autour d’un Trump pour redorer le blason des autres, plus démocrates, plus honnêtes, plus intelligents ?!
En France, ce qui importe, c’est la loi du tribunal, dans un monde judiciarisé à l’extrême. On vole, on ment, on triche, et cela passe dès l’instant qu’on n’est pas condamné. Du coup l’enjeu politique se déplace du terrain social au terrain juridique ; la classe dominante, bien évidemment, gère et façonne le juridique à sa mesure. Les procès des hommes politiques peuvent traîner pendant des décennies ou, fait nouveau, lorsque leur culpabilité finit par être reconnue et qu’elle débouche sur une condamnation, on les dispense de peines tout simplement, au nom de services rendus à la France, c’est à dire à la classe dominante. Les membres de cette classe qui dirigent le pays et vantent un libéralisme saupoudré de droits de l’homme ne s’embarrassent pas de scrupules quand il s’agit de profiter des biens communs, de l’argent public, que ce soit pour leurs propres postes ou pour des emplois fictifs, tout en demandant aux pauvres de faire un effort ! Et pendant qu’ils s’enrichissent et en font profiter la famille et les amis, sous l’oeil bienveillant de la justice, l’ordre républicain doit s’imposer aux autres : les exploité-es, les exclu-es, les criminalisé-es, les discriminé-es, celles et ceux qui ne peuvent compter que sur les ressources d’un travail pour survivre. Quant aux révolté-es, aux manifestant-es, aux renégats et petits bandits, la justice est prompte à les condamner, les enfermer quand l’ordre policier ne les a pas encore tué-es, mais les a violé-es, violenté-es, matraqué-es, gazé-es avec les armes mises à sa disposition légalement.
Quel aveuglement démocratique empêche de voir ces inégalités flagrantes et entraîne de nombreuses personnes à espérer un sauveur au pouvoir, un homme digne de confiance pour nous gérer comme de pacifiques moutons ?
Qui dira le nombre de vies perdues au nom du capitalisme et de son ordre policier, de vies gâchées à l’ombre des commissariats, des prisons et autres lieux d’enfermement ?
Pas de statistiques publiées pour les centaines de jeunes morts entre les mains de la police nationale. Légion d’honneur pour ceux qui, officiellement et légalement, trichent et tuent et relégation pour les autres ? Ils sont 126 recensés à ce jour, tués par la police entre 2000 et 2014 ; dont 97 de 2005 à 2014. Mais ces chiffres ne sont pas exhaustifs et n’ont rien d’officiel ; comme le dit l’association pour l’abolition de la torture (ACAT) dans un récent rapport : « On sait combien de personnes sont tuées par des guêpes, par les violences policières, on ne sait pas ».
On entend des discours sur les flics morts en service comme pour faire contrepoids ; alors, faisons la comparaison justement. Entre 2008 et 2015, il y aurait eu 65 policiers morts en service, mais plus de la moitié (37) sont morts par accidents de manipulation d’armes, de circulation routière ou de manière fortuite, 28 autres en mission sur cette période, selon des statistiques révélées dans Le Monde du 14/06/2016. Entre les risques du métier et ceux de l’assignation sociale, il y a un monde, un monde à détruire.
Mais tout cela est connu des lectrices et lecteurs de Courant Alternatif, ce sont des lieux communs. On sait très bien que nous ne sommes pas dans une société libertaire, encore moins communiste anarchiste ! Notre propos n’est donc pas de révéler des vérités cachées mais de dire simplement : et alors, on fait quoi après avoir constaté l’aberration et la violence mortifère de ce système ?
C’est cette interrogation qu’il faut mettre en débat un peu partout. Comment faire pour tout changer sans se faire dissoudre dans la réponse des réformateurs du système qui va faire la une prochainement : faire barrage à l’extrême droite, certains ajoutent opportunément, et à l’extrême gauche !
Dans l’histoire des vaincu-e-s, il y a eu de nombreux instants de révolte salutaire, de courage exemplaire pour instaurer la justice sociale, la paix réelle, et si ces révolutions ont été anéanties par la force des puissants, elles gardent toute leur légitimité et leur nécessité. Cette histoire lointaine ou récente nous a montré que la seule façon de réformer le capitalisme, de lui donner un visage humain, c’est de s’en débarrasser totalement et définitivement.
CJ Sud-Ouest, février 2017