mardi 1er avril 2008, par
Une femme se tue en se défenestrant à l’arrivée de la police, boulevard de la Villette à Paris. À Amiens, un jeune garçon de 12 ans chute du quatrième étage à l’arrivée des flics. Au centre de rétention de Toulouse-Cornebarrieu, une petite fille de 15 mois et sa mère enceinte sont arrêtées et enfermées, le lendemain, la mère perdra ses jumeaux qu’elle portait. Dans ce même CRA, on apprendra qu’un enfant handicapé moteur et mental ainsi que ses parents y ont été retenus. À Lille, David ASSOEV, un jeune géorgien appartenant à la minorité Yézide, est expulsé, et, dès son arrivée à Tbilissi, il est jeté en prison après un simulacre de procès. Il y a quelques mois encore le parquet de Limoges a demandé à un médecin de procéder à un examen gynécologique de deux jeunes filles pour fournir un rapport prouvant leur minorité. Chaque jour le quotidien de la chasse aux étrangers révèle son lot d’atrocités et s’enfonce dans la barbarie. “La France, pays des droits de l’Homme” c’est une histoire qu’on raconte aux adultes pour les faire dormir. Aujourd’hui plus personne ne peut ignorer la situation et qui ne dit mot consent. L’obstination du gouvernement Sarkozy/Fillon/Hortefeux se matérialise dans l’annonce de chiffres d’expulsions toujours plus hauts (26 000 prévues cette année en métropole) et ne laisse présager rien de bon. Il est vrai qu’il est plus facile de présenter les chiffres de « reconduites à la frontière » et d’intoxiquer les médias avec des délires d’identité nationale plutôt que de s’attaquer aux vrais problèmes du pays. Pourtant des résistances se développent : ici ce sont les centres de rétention (notamment le CRA de Vincennes) qui sont le siège de révoltes et de mouvements de protestations ; là ce sont des parents d’élèves et des profs qui s’organisent pour planquer telle ou telle famille en prenant le risque de l’illégalité ; là encore ce sont des salariés sans-papiers qui se mettent en grève rappelant à quel point le patronat a besoin de ce type de travailleurs. Nous ne pouvons qu’encourager ces initiatives, y prendre part et faire en sorte qu’elles se multiplient : il faut que dans chaque quartier, chaque école, chaque entreprise, chaque syndicat se crée ce genre de collectifs pour instaurer un rapport de force qui fera céder le Pouvoir.
Cependant, même si nous parvenons à obtenir satisfaction, nous ne devons pas oublier que le problème restera en suspens car le statut des personnes irrégulières découle directement de la politique de l’Etat en clair : c’est l’Etat qui crée les sans papiers car il est voué "corps et âme" à rendre éternellement service à ses petits copains patrons. Et ces derniers ont un appétit toujours plus insatiable de main-d’oeuvre d’autant plus exploitable qu’elle se trouve sous la menace d’une expulsion. À titre d’exemple, lorsque la Gauche arrivée au pouvoir en 1997, juste après la lutte de Saint-Bernard à Paris, a mis en place une circulaire pour permettre une régularisation massive (circulaire Chevènement) on a pu croire la question réglée. Mais cela n’a fait que créer une situation ambiguë, puisque sur 150 000 dossiers, 80 000 se sont vus notifier des refus. La question des sans papiers est donc bien évidemment une question politique. Si nous sommes solidaires des sans papiers ce n’est ni par humanisme, ni par pitié. C’est parce que nous considérons que chacun et chacune doit avoir le droit de circuler librement comme bon lui plait. C’est parce que, dans notre conception du monde, les frontières n’ont pas lieu d’être. C’est parce que nous voulons détruire l’Etat qui nous considérera toujours comme des numéros. C’est par ce que nous voulons changer ce monde qui méprise tant la vie humaine.