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La ministre et les onze vaccins

vendredi 24 novembre 2017, par admi2


La ministre et les onze vaccins

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Dès janvier 2018, onze vaccins (1) seront obligatoires, au lieu des trois précédemment prescrits – diphtérie, tétanos et polio. Pourquoi pareil emballement gouvernemental pour les imposer, alors que l’inoculation de ces trois seuls vaccins (en rupture de stock) semblait faire consensus chez les parents et les médecins ?

Une précipitation
dans la continuité

Marisol Touraine, ministre socialiste du précédent gouvernement, n’a pas eu le temps de passer sa réforme sur l’« obligation vaccinale » censée remédier « à la défiance des Français contre les vaccinations ». Le temps du « calendrier » politique et parlementaire lui a fait défaut. Aussi, dès le 17 mai, elle a invité A. Buzyn, la nouvelle ministre de la Santé, à reprendre son texte de loi étendant l’obligation vaccinale. En janvier 2016, elle avait déjà missionné le Pr Fisher pour piloter un « comité citoyen » (voir l’encart) ; et, après une consultation « citoyenne », en décembre, son rapport préconisait de rendre obligatoires les onze vaccins et recommandait de supprimer la distinction entre « obligatoire et recommandé ». Lors de la remise des clés du ministère, M. Touraine a déclaré à sa remplaçante : « Je suis convaincue que c’est cela qui doit être engagé (…). Je suis heureuse de vous transmettre le flambeau »
L’arrêt de la commercialisation du vaccin du DTP, en 2008, avait forcé les parents à opter pour des vaccins « hexavalents » – un combiné des vaccins obligatoires et de ceux contre la coqueluche, l’hépatite B et la méningite, provenant des laboratoires Sanofi et GSK… et remboursé par l’assurance-maladie depuis 2006. On comprend mieux alors la pénurie du vaccin du DTP qui a été organisée après 2008 : si celui-ci coûtait 6 ou 7 euros, son « remplaçant » vaut 40 euros.

Mais pourquoi l’ancienne ministre a-t-elle montré autant d’enthousiasme envers sa remplaçante ? M. Touraine, candidate nationale du PS aux législatives, a été désavouée par ses instances locales, qui lui reprochaient son double jeu. Comme tant d’autres de ses collègues ministres et socialistes, elle lorgnait vers E. Macron qui, reconnaissant, s’est bien gardé de présenter un-e candidat-e En Marche face à elle. Réjouissons-nous, elle a été battue. Quoi qu’il en soit, sa joie de « transmettre le flambeau » a été partagée par les labos pharmaceutiques, rassurés : la nouvelle ministre était du sérail.

Le jackpot des labos

« Il ne faut pas que l’obligation vaccinale portée à onze devienne le nouveau jackpot des laboratoires pharmaceutiques », a dit Michèle Rivasi, députée européenne d’EELV. Et on peut légitimement s’interroger sur la précipitation de la ministre de la Santé à adopter cette mesure. Pourquoi ne pas remettre sur le marché le DTP sans adjuvants aluminiques et laisser, après information et recommandation sur les autres vaccins, les parents libres de choisir entre les deux, en concertation avec leur médecin ou pédiatre traitant ? Pourquoi cette précipitation alors qu’en Europe 18 Etats n’ont aucune politique d’obligation sans que les épidémies ni la mortalité infantile y soient plus élevées qu’en France ? Il n’y a pas chez eux d’obligations mais de fortes recommandations : 96 % des enfants sont ainsi vaccinés en Suède. Doit-on voir dans l’injonction de la ministre l’aboutissement de l’amitié qui lie Macron à S. Weinberg, président du principal producteur de vaccins français : Sanofi ? Une amitié fort ancienne qui s’est traduite par le soutien indéfectible du second au premier, tout au long de la dernière campagne présidentielle.
Comment croire à la neutralité d’A. Buzyn, professeure de médecine, spécialiste de la moelle osseuse, qui lors de prestations ou congrès est promotionnée ou rémunérée par des labos ? Comme l’a souligné avec humour Le Canard enchaîné : « N’y aurait-il pas un léger conflit d’intérêts ? » Et la ministre de répondre : « Il n’y a aucun problème à ce que les scientifiques qui évaluent les médicaments soient en même temps payés par l’industrie qui les fabriquent. » La question peut être débattue, mais ces « médecins experts » qui deviennent ministres peuvent-ils ou elles être partie prenante et juges ? Ne peut-on y voir, comme le soulignait M. Rivasi, un renvoi d’ascenseur, avec dans la cabine 110 millions d’euros par an de profit pour les labos ?

Dès janvier 2018, le gouvernement a rendu les onze vaccins obligatoires sous couvert de « préoccupation de la santé des Français », faisant fi des remarques, critiques ou dénonciations émanant du corps médical lui-même. De même, il ignore le fort courant « vaccino-sceptique ». Sans doute y voit-il encore l’expression des « fainéants » et « extrémistes » qu’il abhorre. Il est vrai que s’expriment là ceux et celles qui n’ont pas de conflit d’intérêts avec les labos pharmaceutiques, et qui voient les 110 millions de nos cotisations sociales qui sortiront de nos portefeuilles, via l’assurance-maladie, pour remplir la tirelire des actionnaires sangsues de Sanofi ou d’autres.

La défiance contre les politiques
vaccinales

41 % des Français s’interrogent sur les vaccins. Certes, ces interrogations et objections sont multiples et diverses, allant du « complotisme » aux préoccupations de parents ou aux réfutations scientifiques fondées sur les effets secondaires de certains vaccins. Mais pareilles méfiance et défiance ne sont pas tombées du ciel. Elles prennent leur source dans les scandales à répétition de ces dernières décennies, qui ont mis à nu les connivences entre les labos et un certain monde médical qui nous régente. Ces scandales ont illustré le pouvoir de pression des trusts sur les politicien-ne-s de bas étage qui prétendent nous gouverner, visible jusque dans les sphères de l’Organisation mondiale de la santé.

Depuis les années 20, on nous disait que les adjuvants à base de sels d’aluminium ajoutés aux vaccins par les labos ne posaient pas problème. Aujourd’hui, ils sont mis en cause dans la maladie du muscle : la myofasciite à macrophages ; et il existe d’autres vaccins sans alumine, voire sans adjuvants. Mais la ministre de la Santé ne répond aux questionnements des professionnels de santé ou aux inquiétudes des parents que par l’obligation des onze vaccins.

De 1994 à 1998, une campagne gouvernementale massive fut organisée pour vacciner contre l’hépatite B, maladie grave transmise sexuellement ou par le sang (transfusion). L’injonction concerna un tiers de la population française. Des individus déclarèrent des scléroses en plaques – une maladie du système nerveux aux causes encore mal comprises. Quelques professionnels de santé et parents de vaccinés y virent un rapport de cause à effet (2), mais, là aussi, le gouvernement était plus soucieux de réduire les budgets de la recherche et de la santé publique que de répondre aux questions posées.

Comment ne pas perdre
confiance ?

En 2009, R. Bachelot, ex-pharmacienne ayant eu des liens très étroits avec les labos, était ministre de la Santé sous Sarkozy. La grippe au virus H1N1 était annoncée comme « pandémique » (3). Branle-bas de combat, vaccination de masse et surtout bonne aubaine pour les labos qui, devant l’urgence annoncée, haussent leurs tarifs. Cette grippe se révélera rapidement inoffensive., et, sur les 94 millions de doses commandées, seules 6 millions d’entre elles furent utilisées. Bref, un scandale de plus – de 2 milliards d’euros. Le gouvernement racheta les doses restantes et dédommagea les labos, à la satisfaction de leurs actionnaires. Une facture qui, bien sûr, fut payée par le contribuable. On peut comprendre, avec de tels ratés, l’incompréhension et la suspicion croissante envers les politiques de vaccination.

Voici peu, avec l’affaire du Mediator, c’est le docteur I. Frachon qui, après un parcours du combattant, a ouvert des espaces de résistance. Son combat contre les laboratoires Servier a ébranlé l’édifice du fric et de la science corrompue. Actuellement, c’est le scandale du glyphosate qui illustre la difficulté de faire prévaloir la santé des populations sur les profits des trusts et l’avidité de leurs actionnaires. De telles affaires propagent durablement un doute dont s’emparent des farfelus sur le Net pour diffuser des rumeurs et de fausses informations. Des « vaccino-sceptiques » oublient qu’un vaccin n’est pas en soi un médicament : il sert à prévenir dans un contexte donné ou devant une menace définie ; et, comme dans toute prescription, il peut y avoir des contre-indications et des effets secondaires néfastes voire dramatiques. Pour autant, notre réflexion doit continuer de se situer dans un contexte de sauvegarde collective. C’est pour cela que la transparence de l’information doit être maximale, afin que le rapport bénéfices/risques d’une inoculation soit consciemment partagé.

L’industrie du vaccin :
une industrie comme une autre

200 vaccins sont aujourd’hui développés dans les labos, contre quelques dizaines voici quelques années. Le marché mondial des vaccins est passé de 6 milliards en 2006 à 12 milliards en 2012 et 56 milliards en 2017. Jusque dans les années 90, en France, la vaccination était assurée par le service public, loin de l’idée de rentabilité. Depuis, la vente de ce secteur au privé et l’arrivée de la biotechnologie ont boosté ce créneau économique. Et, bien que minime par rapport au marché du médicament en général, il reste florissant et très prometteur – malgré l’essor des vaccins « low cost » venant de la Chine et de l’Inde.

« La vaccination ça ne se discute pas », déclarait hier M. Touraine, et c’est sans doute ce que pense A. Buzyn aujourd’hui. Une position idéologique et dogmatique qui sied mal au domaine scientifique, qui devrait rester ouvert à toute remise en cause ou critique fondée. Quiconque émet un doute face à la politique vaccinale se voit taxer d’« antivaccinal », ce qui peut le pousser dans les filets des charlatans qui ont le vent en poupe sur les réseaux sociaux. Par exemple Andrew Wakefield, auteur en 1998 d’une étude truquée sur les liens entre le vaccin ROR et l’autisme.Ou encore le Pr H. Joyeux, ancien cancérologue mais aussi ex-président de Famille de France, qui s’est opposé au mariage pour tous et a tenu des propos réactionnaires contre les homos, la pilule et l’avortement, etc. Sans oublier qu’aux Etats-Unis le courant antivaccin, très influent notamment chez les républicains, a trouvé son héraut avec un Président Trump qui déclare entre autres : « La vaccination est la plus grande imposture de tous les temps. »

Le passage en force des onze vaccins obligatoires favorise ainsi une opposition contre lui mêlant de simples sceptiques, des parents inquiets ou désemparés, des professionnels qui dénoncent la généralisation inutile de cette politique vaccinale et les antivaccins – alors qu’un débat, une écoute et de la transparence sur la vaccination pourrait aider à rétablir une confiance. Michèle Rivasi, qui se déclare vaccino-sceptique, avait accepté de débattre (4) avec l’arnaqueur Wakefield à Bruxelles, mais, ayant été désavouée par son groupe parlementaire, le débat n’a pas eu lieu. « Je suis envahie par les pro, les anti, les lobbies (…). J’ai l’impression d’être instrumentalisée d’un côté comme de l’autre », a-t-elle dit. A-t-elle vraiment été instrumentalisée ? Comment pouvait-elle ignorer les « gamelles » de Wakefield ?
Comment le gouvernement peut-il convaincre quand aucune action n’a été prise à l’encontre de ceux qui ont programmé la pénurie du vaccin DTP depuis 1998, quand sa ministre de la Santé passe en force l’obligation des onze vaccins sans information sur qui paiera et combien cela coûtera ? Comment pourrait-il « œuvrer pour le bien-être des Français » et être audible, quand les ministres de la Santé successifs conduisent la même politique en effectuant de sévères coupes dans les budgets de la recherche publique de santé ? Pour 2018, encore 1,6 milliard d’euros d’économies demandé à l’hôpital public, qui se traduira par la suppression de lieux de soins, de personnel et de moyens de travail pour lui, par une augmentation de 2 euros du forfait hospitalier (porté à 20 euros par jour). Doit-on s’étonner de cette défiance vaccinale individualiste lorsque ce sont les gouvernements qui détériorent chaque jour les solidarités collectives encore existantes, en s’attaquant au monde du travail, aux retraités (augmentation de 1,7 point pour la CSG…), à l’assurance-chômage et à la Sécurité sociale ? En agitant son obligation vaccinale, la ministre de la Santé ne fait que renforcer les réflexes de défiance individualistes, au détriment de réflexions collectives d’où pourraient naître des solidarités collectives.

MZ. Caen, le 23/10/17

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