CA 322, été 2022
vendredi 29 juillet 2022, par
Ludivine Bantigny, historienne, et Ugo Palheta, sociologue, ont écrit ce livre il y a un an, et par bien des aspects, il aide à comprendre les rapports de force politiques dans la France d’aujourd’hui, au lendemain de la séquence électorale de ce printemps.
Tout d’abord, même s’il évoque par moments différentes formes de fascismes historiques ou contemporains, son objet n’est pas de définir le fascisme et de dire quel(s) parti(s) actuels le représentent. Il repose d’abord sur la description de l’exercice du pouvoir par ceux qui l’occupent aujourd’hui (et leurs prédécesseurs) ; un pouvoir de plus en plus autoritaire dans sa défense du capitalisme : répression des travailleurs, brutalité des contre-réformes, insécurité sociale, criminalisation des mouvements contestataires, état d’exception…
Ce petit livre nous amène à réfléchir sur les conditions d’émergence d’un fascisme d’aujourd’hui. Evidemment, le macronisme n’est pas un fascisme, mais il est prêt à user de violence pour imposer les réformes stratégiques capitalistes. Les auteurs rappellent d’où viennent le président et ses soutiens : ils sont les tenants d’un libéralisme extrême qui fait tout pour démanteler l’état social.
Ensuite les auteurs décrivent le processus de fascisation en cours : comment ses deux aspects principaux progressent : l’autoritarisme de l’Etat et la montée du racisme et de la xénophobie. Sur ce dernier plan, il est manifeste que la politique à l’égard des populations de banlieue issues de l’immigration et la politique anti-migrants se durcissent depuis des années. Et parallèlement, les discours racistes et xénophobes imprègnent de plus en plus la classe politique de l’extrême-droite jusqu’à une bonne partie de la gauche. Sur le premier point, l’autoritarisme de l’Etat face aux mouvements de contestation est de plus en plus fort… ça crève les yeux !
L’intérêt de leur analyse du processus de fascisation est de reconnaître que le processus est complexe, chaotique et que son avancée dépend des rapports de forces dans la société. C’est pour cela que pour les auteurs, ce n’est pas la défense incantatoire de la démocratie qui peut combattre le fascisme, mais le développement de mouvements sociaux révolutionnaires et anticapitalistes associant à la lutte de classe les autres combats émancipateurs : féminisme, antiracisme...
Certains des concepts évoqués trop rapidement dans ce petit livre mériteraient d’être mis en débat, comme par exemple celui de « démocratie réelle » ou celui de « politique d’émancipation ». Pour moi, c’est un livre qui mérite d’être lu et discuté.
Alain