La pêchécologie

Didier Gascuel est un universitaire rennais spécialiste de l’écologie marine, travaillant principalement sur les impacts de la pêche et du changement climatique sur l’environnement marin. Ce court livre est son troisième sur le thème de la pêche durable. Pourquoi donc mettre en évidence ce petit essai dans Courant Alternatif ? A première vue, pas grand chose, d’autant plus que l’auteur, probablement proche des écolo-réformistes, en profite pour nous indiquer que les bonnes politiques européennes de pêches dépendent du « bon vote » ! Passons aussi sur la lourdeur de certain terme utilisés, comme celui inventé pour l’occasion et utilisé dans le titre : « pêchécologie ». Alors oui, malgré ces quelques détails, ce livre présente malgré tout un intérêt et ce pour plusieurs raisons.

D’une part, le métier de pêcheurs est extrêmement critiqué alors qu’il est méconnu par une grande majorité de la population. Ainsi, la gauche au sens large, ne se risque que très rarement à prendre parti pour cette profession, souvent étiqueté comme réactionnaire et « tueuse de dauphins ». Or il n’y a pas « un métier » de pêcheur, mais bien « plusieurs métiers ». En effet, sans rentrer dans la caricature des « bons et mauvais pêcheurs », il existe en effet plusieurs types de pêche, du chalutier industriel, au petit ligneur côtier seul sur son bateau en passant par le dragueur de coquille Saint-jacques. Chacune de ses professions a ses spécificités, des impacts différents sur l’économie du pays, des impacts à diverses échelles sur les ressources et des influences variées dans les sphères politiques (1). Il est en effet difficile de s’y retrouver pour les non initiés, et il est donc plus simple de réduire cela à un tout : des marins qui prélèvent une ressources naturelle. Face à cette méconnaissance globale dans la société, il est fort appréciable de lire un discourt claire, cadré et pédagogique sur le sujet. Didier Gascuel est un défenseur de la petite pêche, celle dont l’impact sur l’environnement liée à son activité reste quasi anecdotique face à sa concurrente industrielle. Il montre par « A+B » comment cette profession qui propose généralement un produit de qualité souffre de l’industrialisation, des décisions européennes et nationales ainsi que des modifications environnementales. On trouve par ailleurs actuellement très peu de texte de fond traitant des problématiques inhérente à la vie des pêcheurs, ce que fait l’auteur dans ce livre.

D’autre part, alors que la profession subie une énième crise de la pêche, en lien avec le plan de sortie de flotte menée par Hervé Berville (2), ministre de la mer, en Février 2023, ajoutée à l’augmentation du prix du carburant et la fermeture très médiatique du golfe de Gascogne à la pêche pour limiter les captures accidentelles de mammifères marins, il est fort appréciable de découvrir un texte remettant les pendules à l’heure au sujet des politiques publiques en terme de préservation de la ressources, de l’avenir de la profession et des collusions politico-industrielles au sein des organisations de producteurs.

Notes
1 - voir l’article de l’association Pleine Mer sur les élections représentatives pour la pêche en 2022  : https://blogs.mediapart.fr/associat...
2 - https://www.ouest-france.fr/mer/pla...;: :text=sortie%20de%20flotte.-,En%20Bretagne%2C%20quarante%2Dcinq%20bateaux%20vont%20partir%20%C3%A0%20la%20casse,sont%20concern%C3%A9s%20au%20niveau%20national.