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CA 337 février 2024

Une grève ouvrière qui dure depuis 2 ans

mardi 6 février 2024, par Courant Alternatif


Une grève ouvrière [1] qui a marqué ses 2 ans [2], le 7 décembre 2023 devant la Préfecture de Créteil (94) devrait faire la « une » de toute la presse syndicale, révolutionnaire, de gauche, etc. Les travail-leurs sans papiers de Chronopost, mais aussi de beaucoup d’autres boîtes de sous-traitance présents sur le piquet de grève à Alfortville, n’ont pas ménagé leur peine… Tournées contre les esclavagistes des temps modernes, pour arracher ici des documents administratifs, là des payes non versées, etc. Mais aussi des luttes plus globales contre la contre-réforme des retraites, contre la loi Asile Immigration, etc. Cette lutte est auto-organisée par les premiers concernés, avec localement un réel sou-tien syndical, associatif et politique [3]. Ces camarades nous rappellent un slogan trop souvent ou-blié : FRANÇAIS IMMIGRÉS, MÊME PATRON MÊME COMBAT !

Depuis fin octobre 2021, trois grèves de travailleurs sans-papiers ont démarré successivement. Ils ont installé des piquets devant leurs entreprises : la plateforme de DPD (filiale de La Poste) du Coudray-Montceaux, l’agence Chronopost d’Alfortville et l’agence d’Intérim RSI de Gennevilliers. La principale revendication dans ce conflit du travail est la régularisation de l’ensemble des travailleurs en lutte sur ces trois piquets dans le cadre d’une négociation collective.
Ces travailleurs intérimaires subissent depuis des années une surexploitation qui fait système, par des entreprises qui recherchent les travailleurs sans titre par suite de la dégradation extrême des conditions de travail qu’ils ont imposées à leurs salariés.
Côté RSI (boîte de sous traitance du bâtiment), la préfecture de Nanterre (92) a régularisé en août dernier 18 travailleurs et a refusé toutes les autres demandes. Il faut préciser qu’un an avant, Darmanin avait négocié une rencontre avec la députée du PCF de Gennevilliers et pour le seul piquet de RSI. A l’issue de la rencontre, 83 récépissés avaient été donnés, mais au bout des six mois de validité, la grande majorité des personnes sont redevenues sans papiers.
Côté DPD, les choses avancent lentement (récépissés) avec la préfecture d’Évry.
Depuis fin octobre 2021, trois grèves de travailleurs sans-papiers ont démarré successivement. Ils ont installé des piquets devant leurs entreprises : la plateforme de DPD (filiale de La Poste) du Coudray-Montceaux, l’agence Chronopost d’Alfortville et l’agence d’Intérim RSI de Gennevilliers. La principale revendication dans ce conflit du travail est la régularisation de l’ensemble des travailleurs en lutte sur ces trois piquets dans le cadre d’une négociation collective.

La Poste, patron de combat contre les sans-papiers

Les Postiers sans-papiers se heurtent à un refus total de La Poste de reconnaitre ses responsabilités d’employeur dans le système de sous-traitance en cascade mis en place dans ses filiales colis et logistique, comme à Chronopost Alfortville ou DPD au Coudray-Montceau : chantiers et traitement des colis sous-traités par exemple à Derichebourg, qui lui-même sous-traite à des boites d’intérim, dont la sienne propre (Derichebourg Intérim) ! Ajoutons que cela se fait avec des contrats de mission systématiquement d’une semaine, alors qu’il s’agit de postes pérennes. Au bout de cette chaîne, il y a l’exploitation éhontée de travailleurs sans-papiers, obligés de bosser avec des horaires de dingues, incompatibles avec l’usage des transports en commun, dont les heures supplémentaires (voire une partie des heures tout court) ne sont pas payées, et dont les missions sont interrompues dès qu’ils ne peuvent suivre le rythme ou qu’ils réclament leurs droits.
Depuis plus de 24 mois, les travailleurs en lutte et leurs soutiens multiplient les mobilisations devant les sièges des directions de La Poste et de ses filiales, pour exiger que ces patrons sans vergogne assument leurs responsabilités de donneurs d’ordre ! La Poste étant parfaitement au courant, puisqu’elle a fini par rompre les contrats avec Derichebourg. Cette lutte, à Chronopost Alfortville, a pris le relais de celle qui, entre juin 2019 et janvier 2020, avait permis d’imposer la régularisation de 27 travailleurs surexploités par cette filiale de La Poste et ses sous-traitants, Derichebourg et Mission Intérim, et la régularisation de 46 autres travailleurs, d’autres sociétés, ayant activement participé à ce combat. Parmi les 83 travailleurs écartés à l’époque de la régularisation, nombreux poursuivent le combat dans le conflit actuel.
Dans leur lutte, les actuels salariés de Chronopost, comme les anciens du piquet de 2019, ont reçu le renfort de nombreux travailleurs sans-papiers d’autres entreprises, la plupart exploités dans les mêmes conditions, et présents depuis plus de 24 mois sur le piquet et dans les manifestations, pour exiger aussi leur régularisation.


La préfecture joue la division et ne répond plus

La préfecture du Val-de-Marne, après 18 mois de silence et de refus, a enfin reçu une délégation du piquet Chronopost au mois de mai. Quelques dossiers ont alors été déposés en préfecture, et un très petit nombre de cartes de séjour ont été délivrées depuis. On est donc très loin d’un traitement « bienveillant » des grévistes Chronopost et de leurs soutiens. "Traitement bienveillant selon le dossier " qui avait été affirmé par la préfecture. La préfecture multiple les exigences, en particulier en demandant à nouveau des documents d’employeurs que ni Derichebourg, ni les autres sous-traitants, ni La Poste n’ont jamais voulu donner. D’autre part, la préfecture de Créteil (94) refuse à ce jour tout nouveau dépôt collectif de dossiers des autres travailleurs en lutte sur le piquet. Il ne peut être question pour les travailleurs mobilisés d’accepter cette manœuvre de division, et la lutte continue donc pour la régularisation de tous les occupants du piquet.


Le Gouvernement doit régulariser

La responsabilité du gouvernement, en particulier en ce qui concerne la Poste et ses filiales, est totalement engagée en tant qu’actionnaire de référence de cette entreprise dont il contrôle le capital aux côtés de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ; l’Etat n’ignore rien du système d’exploitation mis en place depuis des années. Le ministère du Travail connait parfaitement la situation et les responsabilités des sous-traitants et donneurs d’ordre. Mais pas plus qu’il y a deux ans, les services du ministère du Travail dans le Val-de-Marne (DRIEETS) n’ont mené de véritable enquête sur l’exploitation des sans-papiers à Chronopost Alfortville, et couvrent de fait la Direction de La Poste. Lors de la manifestation devant sa direction, le 4 octobre, ce ministère a refusé de nous recevoir, nous renvoyant à nouveau vers le ministère de l’Intérieur. Au ministère de l’Intérieur, où nous avons de nombreuses fois manifesté et sollicité des audiences, c’est silence radio concernant ces filiales de La Poste et leurs sous-traitants. Le ministère de l’Intérieur nous renvoyant vers la préfecture.
Dans un contexte où Macron, Darmanin, s’appuyant sur la droite et l’extrême droite, appellent à un durcissement insupportable de toutes les conditions d’accueil et de séjour des migrant.e.s, les travailleurs en lutte sur les piquets, avec leurs soutiens, sont plus que jamais déterminés à obtenir leur régularisation.
Régularisation de tous les sans-papiers !


Contribuez financièrement à la lutte : participez à la caisse de grève
https://www.cotizup.com/sans-papier...

Insubordination Salariale
Janvier 2024

Notes

[1Les grévistes sont les travailleurs de Chronopost. Les autres travailleurs sans papiers, qui bos-sent dans d’autres boîtes, sont présents sur le piquet de grève en dehors de leurs heures de boulot

[2Les camarades sont en train de battre le record des femmes de ménage des hôtels IBIS

[3SUD PTT 94, SOLIDAIRES 94 ; le soutien financier et politique des réseaux syndicaux de Solidaires. Et de certains groupes politiques Mairie d’Alfortville LO, LFI, PCF. Si les élus de la NUPES interpellent le gouvernement à l’assemblée Nationale et au Sénat, leurs militants locaux sont peu présents, à de rares exceptions près

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