CA 339 avril 2024
Big brother 339
mercredi 24 avril 2024, par
Un robot tueur à Gaza
L’annonce est faite par le journal israélien Haaretz (1) : « Dans le but d’éviter de blesser les soldats et les chiens, Tsahal expérimente l’utilisation de robots et de chiens télécommandés pendant la guerre de Gaza. La plupart des tests ont été effectués avec un "chien robot", également équipé d’un drone. Des bulldozers D9 télécommandés sans pilote sont également utilisés ».
Un État surarmé et soutenu par l’occident massacre une population civile, et le génocide colonial est aussi le terrain de tester sur des êtres humains les outils « innovants » du complexe militaro-industriel.
Une vidéo montre les robots déployés. Il s’agit d’un modèle baptisé « Vision 60 » et conçu par une société américaine appelée Ghost Robotics. Chacun de ces chiens coûte 165 000 dollars. Ils sont considérés comme semi-automatiques, travaillent sous terre et au-dessus des décombres et peuvent se remettre sur pied même s’ils tombent. Par le passé, la firme avait monté un modèle de ses robots baptisé « Spur » en train de tirer en rafale, équipé d’une arme à feu sur le dos.
Il y a quelques années, l’entreprise américaine Boston Dynamics présentait son premier « robot chien » de couleur jaune vif baptisé SPOT. L’invention était présentée comme sympathique et inoffensive. Les grincheux qui annonçaient une future utilisation militaire d’un tel robot étaient traités de paranoïaques et de complotistes. Jusqu’à ce qu’une entreprise décide de militariser cette machine. À présent, le robot est équipé d’un fusil d’assaut ou d’outils de surveillance et opère à Gaza en conditions réelles.
Israël est à la pointe des expérimentations technologiques de l’horreur. Un LBD automatisé tirant avec l’aide d’intelligence artificielle sur des cibles humaines est installé sur des checkpoints en Cisjordanie. Des drones tireurs équipés d’armes de guerre tuent à Gaza. L’Intelligence Artificielle a été utilisée pour bombarder l’enclave Palestinienne. Maintenant que ce nouveau « marché » est ouvert et que les premiers usages sur le terrain sont réalisés par Israël, la surenchère dystopique (2) ne fait que commencer.
Sources : youtube.com et haaretz.com
(1) Haaretz (parfois écrit Ha’aretz) est un quotidien national en Israël. Sa ligne éditoriale se situe de la gauche à l’extrême gauche. Haaretz constitue ainsi le plus grand quotidien d’obédience socialiste d’Israël.
(2) Une dystopie est un récit de fiction dépeignant une société imaginaire organisée de telle façon qu’il soit impossible de lui échapper et dont les dirigeants peuvent exercer une autorité totale et sans contrainte de séparation des pouvoirs, sur des citoyens qui ne peuvent plus exercer leur libre arbitre.
Affaire Legay : le commissaire donneur d’ordre condamné !
Les faits remontent au 23 mars 2019, lors d’une manifestation interdite de « gilets jaunes » à Nice. La militante d’Attac, Geneviève Legay, alors âgée de 73 ans, avait été projetée au sol et grièvement blessée par la charge policière (voir CA 337 sous cette rubrique).
Le commissaire, Rabah Souchi, qui a ordonné cette charge a été condamné à six mois de prison avec sursis le 8 mars devant le tribunal correctionnel de Lyon. Ce n’est pas le policier qui avait violemment heurté la militante d’Attac mais sa hiérarchie qui est reconnue coupable. Une grande première !
Le commissaire était poursuivi pour « complicité de violence par une personne dépositaire de l’autorité publique ».
Le tribunal a estimé que cet ordre n’était « pas justifié ni proportionné ni nécessaire », suivant ainsi le réquisitoire du procureur selon lequel cette charge n’était « ni nécessaire ni proportionnée ».
Arié Alimi, avocat de Geneviève Legay considère que ce jugement met fin à « l’immunité et [à] l’irresponsabilité des donneurs d’ordre en matière de violences policières ». Si seulement cela se vérifiait !
Quant à Rabah Souchi, il a annoncé faire appel de cette décision qualifiée par son avocat Laurent-Franck Liénard de « très contestable et sans surprise ».
Notons tout de même que début février 2024, Rabah Souchi, 54 ans, a été nommé directeur adjoint de la police municipale de Nice. Beau recyclage !
Sources : lemonde.fr et médiapart.fr
Contrôles d’identité : Une enquête du Défenseur des droits..
Chaque année, près de 47 millions de contrôles d’identité sont effectués, selon la Cour des comptes (voir CA 336 sous cette rubrique)
Selon une enquête du Défenseur des droits confiée à des chercheurs du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip), sur les conditions d’exercice du travail des forces de l’ordre et leurs attitudes vis-à-vis de la population, publiée mardi 27 février, près de deux policiers et gendarmes interrogés sur cinq (39,2 %) jugent les contrôles d’identité « peu voire pas efficaces » pour garantir la sécurité d’un territoire.
Cette enquête repose sur un échantillon de 976 gendarmes et 655 policiers répartis sur sept départements : trois en région parisienne (Yvelines, Essonne, Val-d’Oise) et quatre en région Auvergne-Rhône-Alpes (Cantal, Isère, Loire, Rhône). Les policiers se montrent les plus sceptiques quant à l’efficacité des contrôles ciblés sur les consommateurs de cannabis, jugeant à 69,5 % cette méthode peu ou pas efficace. Concernant les pratiques professionnelles, les réponses sont contrastées : si l’usage de la force pour obtenir des aveux est réprouvé dans plus de neuf cas sur dix (donc approuvé par 10% !), près de six répondants sur dix (59,8 %) estiment que, dans certains cas, le recours à plus de force que ce qui est prévu dans les textes devrait être toléré…
La formation continue reste un problème selon une part significative des forces de l’ordre interrogées. Une faible minorité de gendarmes et de policiers (respectivement 12 % et 5,5 %) ont bénéficié de formations dans l’année écoulée sur la désescalade de la violence. De la même manière, près de la moitié des agents (45,7 %) se dit insuffisamment formée aux droits des citoyens. Ils sont 66,6 % à avoir étudié le droit des mineurs, 53,5 % le droit de la non-discrimination, 28,8 % le droit des réfugiés et des étrangers.
Face à ces résultats, le Défenseur des droits invite les pouvoirs publics et institutions concernées à mettre en œuvre les recommandations qu’elle a formulées à de nombreuses reprises, comme « renforcer la formation initiale et continue des policiers et des gendarmes » et « mettre en place un dispositif d’évaluation de la pratique des contrôles d’identité, de leur efficacité et de leur impact sur les relations avec la population ». Ok ! Mais nous doutons que les violences policières s’expliquent par un quelconque manque de formation…
Source : Lemonde.fr
Prisons : 76 258 détenus en France au 1ᵉʳ février, un nouveau record de surpopulation
Au 1er février, les prisons françaises comptaient 61 737 places opérationnelles. La densité carcérale globale s’établit à 123,5 %. Dans les maisons d’arrêt, où sont incarcérés les détenus en attente de jugement, donc présumés innocents, et ceux condamnés à de courtes peines, le taux d’occupation est de 147,7 %. Il atteint ou dépasse même 200 % dans 16 établissements ou quartiers.
En raison de cette surpopulation, 3 059 détenus sont contraints de dormir sur un matelas posé à même le sol, soit 50,2 % de plus qu’il y a un an. Parmi les personnes incarcérées, 20 254 sont des prévenus, incarcérés dans l’attente de leur jugement.
Au total, 92 641 personnes étaient placées sous écrou au 1er février. Parmi elles, on compte 16 383 personnes non détenues faisant l’objet d’un placement sous bracelet électronique ou d’un placement à l’extérieur. Comme quoi, les « alternatives » à l’enfermement n’ont pas fait baisser le nombre de taulards !
A noter : une augmentation annuelle de 21,6 % du nombre de condamnés en placement extérieur hébergés, c’est-à-dire qui effectuent leur peine en milieu ouvert, en dehors d’un établissement pénitentiaire, dans un cadre défini par le juge – ils étaient 203 au 1er février.
Le gouvernement table, comme d’habitude, sur la construction de nouvelles places de prison : 15 000 d’ici à 2027 ! Ces nouvelles places n’auront pour effet que de baisser éventuellement et ponctuellement la densité carcérale.
Source : lemonde.fr
Bientôt de nouvelles grenades !
L’Etat français a passé début novembre une commande de grenades pour plus de 78 millions d’euros, la plus importante depuis 10 ans. Plusieurs de ces grenades de maintien de l’ordre sont encore inconnues. C’est ainsi que pour plus de 12 millions d’euros on trouve un modèle de chez Condor fabricant brésilien. Il s’agit de la grenade GL-307. Il s’agit d’une grenade à effet sonore. Sur la fiche technique du fabricant brésilien, le descriptif parle de lui-même. « La grenade à effet sonore GL-307 a été conçue pour produire un effet de souffle bruyant et un aveuglement intense dans les opérations de contrôle des émeutes. » Avec un pictogramme « Ne pas ramasser » inscrit dessus, elle explose au bout de 2,5 secondes. Son niveau sonore atteint des records dans l’arsenal français. Avec, jusqu’à 165 décibels à 10 mètres, elle surpasse le modèle actuel qui monte déjà à 160 dB. D’après BruitParif, l’observatoire du bruit en Île-de-France, « le seuil de douleur pour les oreilles est atteint à 120 décibels. À ce niveau, les dommages sur l’audition sont irréversibles. » Selon la documentation de Condor, à une distance de 2 mètres, l’intensité de la grenade de maintien de l’ordre atteint 175 dB.
Comme le révèle une enquête d’Amérique latine, « le business de la répression », la grenade de maintien de l’ordre GL-307 produit des éclats, des fragments projetés à plus de 10 mètres du lieu de l’explosion pouvant causer des blessures graves.
Dans cette commande on retrouve un autre modèle de grenade jamais utilisé : des « cartouches-grenades 40 millimètres à effet sonore ». Elles sont prévues pour être tirées avec le futur lance-grenade à double canon. Un lanceur de 40 mm qui équipe aussi le Centaure, nouveau blindé de la gendarmerie. Aujourd’hui, les forces de l’ordre utilisent uniquement des grenades lacrymogènes avec ce calibre. Plus pour longtemps !
D’après l’enquête menée par Politis, il s’agirait de la GM2F. Elle provoque un effet sonore de 153 dB à 10 mètres, toujours au-dessus du seuil de douleur.
Avec cet achat de plus de 78 millions d’euros, le gouvernement s’équipe de douze grenades de maintien de l’ordre différentes. Quatre fumigènes, quatre lacrymogènes, trois assourdissantes et une assourdissante et lacrymogène. Plusieurs projettent des fragments pouvant gravement blesser.
Source : politis.fr
Des milliers d’euros d’amende pour des jeunes des quartiers populaires
L’amende forfaitaire est un outil répressif de masse utilisé auprès des classes populaires. Cette sanction pénale est infligée par la police ou la gendarmerie hors de tout contrôle de magistrats, hors de tout procès.
La chercheuse Aline Daillère a ainsi mis en évidence dans sa recherche « Le policier, juge de la rue. Les amendes forfaitaires ou l’expansion du discrétionnaire » que « les multiverbalisé·es, très majoritairement de jeunes hommes racisés âgés de 13 à 25 ans et résidents ou usagers de quartiers populaires, ont en commun de recevoir un grand nombre d’amendes forfaitaires ». En claire : un moyen de racketter et d’humilier la jeunesse de banlieue, en la mettant encore plus dans la merde financièrement.
La chercheuse a ainsi réalisé une enquête minutieuse sur cette stratégie de harcèlement policier. À l’appui, « une cinquantaine d’entretiens, rassemblé près de 1200 amendes distribuées dans le 12e arrondissement, mais aussi dans d’autres quartiers parisiens et trois communes de banlieue ».
Comme l’explique la chercheuse, la police s’improvise juge, usant ainsi des amendes forfaitaires pour infliger des peines, sans motif, ni procès. Une sanction pénale qui permet ainsi d’évincer toute notion du procès équitable et de laisser tout droit à la police d’infliger des milliers d’euros d’amende sans contrôle ni limites.
D’années en années, le champ d’application des amendes forfaitaires s’est allongé, passant des seules contraventions liées à des infractions au code de la route, aux infractions liées au bruit en 2012, avant de s’appliquer à partir de 2016 au domaine délictuel. En 2019, l’amende forfaitaire peut désormais être utilisée en cas d’usage illicite de stupéfiants notamment.
L’amende forfaitaire a ensuite été particulièrement utilisée lors de la pandémie de Covid-19, notamment dans les quartiers populaires. En comparaison, certaines personnes et quartiers ont été complètement épargnés par les contrôles de police répétés. « Pendant une période, je pouvais recevoir trois ou quatre amendes par semaine » explique un jeune. Des amendes qui, dans une majorité des cas, sont adressées aux personnes sans qu’elles le sachent, s’empilant dans leur boîte aux lettres. Dans de nombreuses villes, des amendes ont été distribuées sur la base de la vidéosurveillance, donc de façon totalement arbitraire, sans qu’il n’y ait de contrôle, sans vérifier les fameuses « attestations de sortie ».
La loi LOPMI du 24 janvier 2023 a ensuite élargi le champ d’application de cette sanction pénale sans procès à 85 nouveaux délits, dont l’outrage sexiste, l’occupation de halls d’immeuble, la vente à la sauvette, l’intrusion dans un établissement scolaire… » « Un simple crachat sur le trottoir ou une canette qu’on laisse traîner sur un banc entrent dans la catégorie des contraventions de 2e classe pour "des ordures, déchets, déjections, matériaux, liquides insalubres ou tout autre objet de quelque nature qu’il soit" abandonnés sur la voie publique. Et occasionner une amende de 35 euros, majorée à 75 euros au bout de deux mois ».
La police a ce pouvoir de réduire et de maintenir des personnes dans une situation de pauvreté sans fin. Des jeunes qui se retrouvent avec des milliers d’euros de dettes alors même qu’ils arrivent à la majorité, sans aucune perspective de pouvoir rembourser des dettes sans fondement, créant un immense sentiment d’injustice. L’amende délictuelle peut en effet atteindre la somme de 3 000 euros et les amendes peuvent également se cumuler lors d’un même contrôle. La contestation de ces amendes est en théorie possible, mais avec des preuves impossibles à rassembler bien souvent, et devant un officier du ministère public en lien direct avec la police, sans aucune indépendance donc.
Il s’agit bien d’une stratégie volontaire de terreur et de punition économique, une répression qui maintient un système de classe et de domination sans fin.
Sources : contre-attaque.net et basta.media