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CA 332

« Gloire aux grévistes ! » , la lutte contre Vertbaudet

jeudi 13 juillet 2023, par Courant Alternatif


« Gloire aux grévistes ! »

C’est sur ce slogan scandé lors de la manifestation interprofessionnelle du 6 juin dernier que nous avons fêté, dans les rues lilloises, la victoire des grévistes de l’entreprise de vente par correspondance Vertbaudet. Commencée en plein mouvement contre la réforme des retraites, le 20 mars, la grève de 80 ouvrières a permis de faire plier le patron et d’obtenir des augmentations de salaire et des embauches. Contrairement au mouvement social national où la grève a été insuffisante pour installer le rapport de force et imposer nos conditions, à Vertbaudet, les femmes et les hommes n’ont rien lâché et ont gagné. Retours sur cette victorieuse lutte des classes ! Cet article s’appuie sur des témoignages directs d’ouvrières en lutte et sur les impressions de piquets de grève de quelques camarades.

Le contexte territorial et économique

Le Nord et le Pas de Calais constituent des exemples parfaits de ce que le capitalisme est un rapport social total. Dans ces départements, ce sont la géographie, l’urbanisme, mais aussi la culture et les mentalités qui ont été façonnées par le développement du Capital - de l’industrie du textile à celle du charbon, des phases de croissances exponentielles aux crises périodiques, de la formation de puissantes bourgeoisies à celle d’un prolétariat revendicatif. Ces conditions pourraient idéalement servir de matière concrète à une lecture de Marx lorsque celui-ci affirme que les hommes et les femmes font leur histoire : « mais ils ne la font pas de plein gré, dans des circonstances librement choisies, ils les trouvent au contraire toutes faites, données en héritage du passé ». Dans cette citation tous les termes sont importants car « faire leur histoire » pour les prolétaires c’est affronter la lutte de classes. A ce titre la grève des ouvrières de Vertbaudet est remarquable.

D’un coté, le prolétariat de la logistique, en pleine expansion depuis plusieurs années. En 2021, le secteur représentait 10 % du PIB français pour 200 milliards d’euros de chiffre d’affaire. Les ouvrier-es du transport et de la logistique comptent pour 1,5 millions de salarié-es soit près de 20 % de l’ensemble des ouvrier-es du pays. L’essor de la logistique a remodelé en profondeur la structure des classes ouvrières constituant un nouvel entonnoir pour les classes laborieuses fragilisées par la désindustrialisation. Ces « travailleur-euses du flux » peu organisé-es, affaibli-es par les contrats d’intérim et les menaces d’automatisation du travail en entrepôts font face à des géants économiques type Amazon, la Redoute, etc. Pourtant le secteur est en ébullition et la conflictualité est permanente. Des luttes émergent partout et ce, de manière internationale. La logistique a donc produit de nouvelles concentrations ouvrières et invite à penser une recomposition de classe à une nouvelle échelle territoriale. D’autant plus que les effets néfastes de la logistique sur l’environnement sont prégnants (transports, bétonisation, etc). Nous avons donc ici une bonne occasion d’articuler luttes sociales et luttes écolos.

Coté bourgeoisie, c’est clair comme de l’eau de roche ! Voyez plutôt : VertBaudet est fondée en 1963 par Anselme Dewavrin, propriétaire d’usines textiles. C’est, dès sa création, une marque qui vend des vêtements pour enfants et mères par catalogue. Anselme Dewavrin est l’héritier d’un capital accumulé par onze générations de négociants du textile. Lui et ses fils sont installés dans un quartier de la métropole lilloise où une poignée d’autres grandes familles se partagent depuis le XVIIIe siècle l’industrie du textile, son négoce, sa vente par correspondance. Et depuis le XIXe siècle, s’ajoute le capital des mines de charbon du bassin minier, de Valenciennes à Bruay. En 1989, la boîte est cédée au concurrent la Redoute qui fait alors partie du groupe Pinault-Printemps-Redoute (devenu PPR puis Kering), après que le Printemps soit devenu le principal actionnaire en 1988-1991. Francois Pinault en prend le contôle en 1992. En 2013, PPR cède Vertbaudet au fonds d’investissement Alpha Private Equity, le fonds Alpha recourant pour acheter Verbaudet à la technique d’endettement spéculatif du LBO (leverage buy out, en anglais). Enfin en juillet 2021, Verbaudet est acheté par un fonds d’investissement nommé "Equistone Partners Europe" dont le directeur des investissements depuis 2017 est Edouard Fillon - oui oui le fils de qui vous savez… - par le biais d’un LBO également. Un LBO est une technique bancaire qui consiste a acheter une entreprise en l’endettant. Des actionnaires s’associent dans une société holding pour acheter toutes les actions d’une entreprise et chargent cette dernière de contribuer au remboursement de l’emprunt. C’est la fameuse prise de risque de l’actionnaire. La dette d’acquisition est remboursée par une ponction sur les flux de trésorerie de la société achetée avec des objectifs chiffrés à remplir pour le remboursement. Cette ponction peut parfois amener à la faillite de la société achetée (par exemple Toys R’Us ou Vivarte). Equistone aurait ainsi emprunté à un pool bancaire mené par BNP Paribas, afin de proposer une somme de plus de 200 millions d’euros pour acheter Verbaudet. La plus-value est ainsi très élevée pour le fonds d’investissement Alpha, car le groupe PPR lui avait vendu ses deux enseignes Vertbaudet et Cyrillus pour 119 millions d’euros, huit ans avant. Charge pour Equistone de faire suer le bur-nout aux travailleurs de Vertbaudet. Mais visiblement tout ne s’est pas passé comme prévu...

Travailler dans la logistique

Aller sur le piquet de grève, rencontrer les ouvrières et leurs soutiens ont été autant d’occasions pour discuter et parler des conditions de travail dans un secteur en plein essor avec la « digitalisation » de l’économie à coups d’internet, d’application de livraison, etc. Mais loin d’être virtuel, cliquer sur un écran fait bosser des ouvrier-ères dans des conditions dégueulasses. A Vertbaudet, le travail ne s’arrête jamais et il est organisé selon la règle des 3x8heures. Les horaires de postes sont les suivants : 4h45/11h45 ; 12h15/19h15 ; 20h45/3h45. Les équipes de nuit font surtout de l’expédition ou le réapprovisionnement des stocks. Il y a trois grands types de postes de travail. Tout d’abord, les préleveuses qui doivent parcourir 174 allées à pied avec un chariot encombrant qu’elles remplissent avec une fiche comportant au minimum 150 articles. Contrairement à Amazon ou la Redoute, le travail n’est pas numérisé ou robotisé. Il n’y a ni robot ni lecteur code-barre géolocalisé, seulement une liste papier et des baskets ! car en moyenne sur 7 heures de travail, une préleveuse parcourt au minimum 20 kilomètres. Puis, il y a l’emballage qui consiste à vérifier les commandes – cette fois-ci avec des bippeuses code-barre - et si elles sont complètes, de les emballer et de les mettre sur le tapis roulant pour l’expédition qui est le 3eme grand poste ouvrier dans l’entrepôt logistique. Autour de ces trois postes, il y a le flux constant des transporteurs qui réapprovisionnent le hangar ou acheminent les colis. Tout ce process est surveillé par un encadrement très présent. Pour le prélèvement, il n’y a pas moins de 2 agents de maîtrise pour surveiller une vingtaine de personnes, un cadre et au dessus encore le DRH. Pas besoin de grand discours pour comprendre les différences de classes sociales : celles qui font face à ceux qui surveillent et punissent le moindre écart de conduite : politesse, ponctualité, etc.

Les salarié-es sont essentiellement des femmes souvent seules avec ou sans enfants. Là encore un « héritage » du capitalisme nordiste car depuis les mines, des femmes étaient embauchées dans les usines textiles de la région lilloise tandis que les hommes charbonnaient. Aujourd’hui encore, de nombreuses femmes font des kilomètres pour venir travailler à l’entrepôt de Marquette-lez-Lille car elles vivent dans le bassin minier autour de Lens ou Hénin-Beaumont. La moyenne d’âge est autour de 40-50 ans et beaucoup de femmes travaillent depuis plus d’une dizaine d’années, il n’y a pas de gros turn-over chez les CDI. Tous ces kilomètres, toutes ces années pour gagner seulement le SMIC ! Toutes les grévistes rencontrées le disent, elles triment pour un peu plus de 1300 euros par mois, et encore pour un 35 heures. Car un certain nombre de femmes ont des mi-temps : 25 heures par exemple pour s’occuper des enfants. S’il y a un 35 heures plein, il faut alors dépenser pour la garde des enfants le soir ou le matin, selon le poste dans l’entreprise. Vivre avec un SMIC se résume donc à de la survie et les femmes sont les premières précarisées comme souvent à cause des temps partiels notamment.

Enfin, les contrats de travail sont à peu près répartis comme suit : 2/3 de CDI et 1/3 d’intérimaires pour 370 salarié-es au total. Les intérimaires sont largement utilisé-es comme variable d’ajustement pendant les périodes de rush comme les soldes, les black friday ou la fin de l’année. Les employé-es sont plus jeunes, mais beaucoup sont des régulier-es. Ils ou elles ne sont pas pour autant embauché-es et d’ailleurs tou-tes les CDIsé-es ont du faire d’abord de l’intérim plus d’un an. Autre contrat utilisé, le CDI précaire où c’est la boîte d’interim qui emploie et dispatche les personnes qui ne bénéficient alors plus de la prime d’interim, la double peine ! La lutte des grévistes - majoritairement en CDI - a cassé cette distinction et l’isolement des intérimaires. Elles se sont battues pour tout le monde !

La lutte : grève CGT, soutiens, répression

Les grévistes ont eu droit à un pack complet « lutte des classes » où la grève a été dure car revendicative et longue tandis qu’en face les patrons et l’État ont utilisé tous les moyens pour casser le mouvement : inflexibilité, sexisme, jaunes, police... L’histoire commence le 20 mars, jour de mobilisation interprofessionnelle contre la réforme des retraites. L’Union locale CGT de Tourcoing fait un piquet de mobilisation devant les hangars logistiques situés à Marquette-Lez-Lille. Ça parle retraite à 64 ans mais aussi NAO, négociations annuelles obligatoires qui viennent de se terminer en février. Or, les deux syndicats majoritaires de la boîte que sont FO et la CFTC viennent de signer un accord pour aucune augmentation salariale des ouvriè·res, seulement une prime de 650 euros mais au prorata du travail effectué donc les femmes isolées avec enfant à mi temps se retrouvent lésées. C’est alors que la jeune section CGT qui existe depuis les dernières élections professionnelles d’octobre dernier monte au créneau et arrive à catalyser les colères. Plus de 70 ouvrières (quelques hommes dedans) arrêtent le travail et font un piquet devant l’entrée des entrepôts. Au départ, tout le monde pensait que ça allait durer quelques jours – comme lors des derniers conflits dans l’entreprise - il y a eu 82 jours de grève non-stop ! Les revendications sont les suivantes : augmentation du salaire de 20 % dans l’idéal ( pour que le brut devienne le net) mais rapidement la somme de 150 euros par mois s’impose ; l’embauche d’intérimaires. Le but est de palier à l’inflation galopante qui rend la vie avec un SMIC encore plus difficile.

Voilà pour les causes immédiates de la grève mais en réalité, la colère grondait depuis plusieurs années surtout depuis la reprise de l’entreprise, en 2021, par le fond de pension Equistone (voir plus haut) qui s’est accompagnée d’un tour de vis managérial. Les nouveaux chefs ne sont pas des paternalistes et la reprise de Vertbaudet par LBO ou « achat à effet de levier » conduit à une exploitation accrue de la force de travail. En effet, il devient nécessaire pour les capitalistes de répondre à des objectifs élevés, fixés par les créanciers, pour rembourser la dette. Des interdictions sont apparues comme manger un petit truc sur son poste de travail ; les injonctions infantilisantes se sont multipliées avec un encadrement et une ressource humaine « innovantes » ; des avantages ont disparu comme le contrat de travail vie scolaire qui permet à une employée de moduler son CDI et ne pas travailler pendant les vacances scolaires pour économiser les centres aérés ; bref un ensemble de mesures pour augmenter le temps de travail tout en gelant les salaires. En sachant que le groupe a fait de bons résultats cette année, la pilule a encore plus de mal à passer.

Face à la grève, les patrons ne veulent rien lâcher et les discours deviennent haineux et sexistes. Rapidement, le climat se tend entre grévistes et non-grévistes, sûrement attisé de l’intérieur par l’encadrement. Des pages facebook sont même créées contre les grévistes qui sont insultées, diffamées sur leur vie privée. Des propos sexistes à l’encontre des femmes en lutte sont nombreux du type « il n’y a jamais eu autant de préservatifs devant l’entrepôt depuis la grève » et autres saloperies. Pour remplacer les grévistes et casser leur mouvement, environ 80 intérimaires sont embauché-es. Une bataille juridique est lancée par la CGT avec huissiers, référés en justice pour contester l’embauche des intérimaires. L’inspection du travail tape sur les doigts des patrons mais la justice donnera raison à ces pratiques. Justice de classe !

Sur le piquet, les ouvrières s’organisent selon leur poste de travail ce qui assure une présence permanente. Il faut une détermination monumentale pour rester dans cette zone industrielle, sous la pluie et le froid car le mois d’avril a été particulièrement mauvais météorologiquement parlant. La CGT de l’UIL de Tourcoing encadre le tout de manière forte et volontariste. Une caisse de grève appelée caisse de solidarité est constituée et reçoit beaucoup de soutiens qui permettent de payer les salaires des grévistes. Même si la CGT a un rôle prépondérant – et qui se veut hégémonique, on y reviendra - les soutiens autres ont été aussi importants : des cantines, des concerts ont été organisés. Quelques coups de main ont aussi eu lieu pour tenter de bloquer l’entrée des camions dans l’entrepôt avec des pneus ou en voulant rendre inutilisable la grille d’entrée. Le blocage et le sabotage sont aussi nos armes ! Les grévistes restent en tout cas maîtresses de leur mouvement car chaque semaine, la grève est votée et reconduite lors d’une assemblée générale. La plupart font leur première grande grève et la spontanéité irrigue la lutte et forge la détermination d’aller jusqu’au bout !

Le 1er mai passe et avec lui les premiers long jours fériés. La lutte se médiatise peu à peu avec la venue de plus en plus régulière de personnalités politiques de gauche qui y voient un bon moyen de garder la face alors que c’est la déconfiture au niveau de la bataille des retraites : députés France insoumise, communistes, et surtout la nouvelle secrétaire de la CGT Sophie Binet. Elle y voit une bonne entrée en scène pour le début de son mandat syndical en alliant lutte des classes et féminisme. Elle appelle même à boycotter nationalement la marque en signe de soutien aux grévistes.

Sentant la mayonnaise prendre, les bourgeoisies économiques et politiques se concertent pour en finir avec la lutte et imposer la loi des patrons. Une réunion a lieu à la préfecture entre le préfet en charge de la police, les patrons de Vertbaudet et le maire de Marquette-Lez-Lille. Le 16 mai, une soixante de CRS viennent déloger le piquet, deux personnes sont arrêtées et il y a une blessée qui a été étranglée alors qu’elle venait récupérer des affaires personnelles. La veille, deux figures CGT de Vertbaudet sont agressées dont un délégué syndical qui est embarqué devant chez lui et devant sa famille par un groupe d’hommes qui se présentent comme des flics en civil. Il est molesté, menacé et gazé avant d’être jeté de la camionnette où les barbouzes du patronat ont officié. L’histoire reste obscure mais ces violences et tentatives d’intimidation provoquent un tollé médiatique et politique national. Les jours suivants, le gouvernement est interpelé à l’Assemblée nationale et dans la presse, Borne se saisit de l’affaire et promet une sortie de crise. Dans la continuité de cette accélération du mouvement, une manifestation de soutien est organisée à Tourcoing par l’union locale CGT et le lendemain c’est une manifestation qui se déroule à Paris, devant le siège du fonds d’investissement Equistone, propriétaire de Vertbaudet. Enfin le 23 mai, une tribune à l’initiative de Sophie Binet est publiée dans le journal Le Monde et rejointe par toute une série de personnalités. Préfet et patron ont perdu la partie et doivent se mettre à table. Le rapport de force et la solidarité l’ont emporté après plus de 2 mois et demi de grève ! Au passage, les grévistes avaient reconstitué le piquet de grève en face de l’entrée de l’entreprise.

La victoire !

Première semaine de juin, la direction annonce l’ouverture des NAO 2024 anticipées. Les discussions commencent et des propositions d’augmentation sont proposées mais selon les postes et surtout selon l’ancienneté. Lors du premier jour, les avis étaient très partagés sur les négociations. Il y avait bien des augmentations mais avec des primes, ce qui fait à peu près 150 euros par mois mais avec le problème de la non cotisation pour les retraites par exemple. Les discussions se sont poursuivies et finalement, un accord est trouvé : une « revalorisation du salaire minimum à hauteur de 1 810 euros brut par mois sur 13 mois (soit + 4 %) pour tou-tes les salarié-es dès le 1er juillet 2023 et les salarié·es bénéficiant d’au moins douze ans d’ancienneté auront droit à une revalorisation à « au moins 1 860 euros brut par mois sur 13 mois (soit + 7 %) » selon les mots de la direction ce qui correspond à des augmentations nettes mensuelles de 90 à 140 euros selon l’ancienneté des salariées + prime du 13eme mois complète et non proratisée sur le temps de travail (ce qui désavantagerait les grévistes) + embauche de 30 salarié-es intérimaires en CDI + levée des sanctions car certaines grévistes étaient convoquées pour un entretien préliminaire à licenciement après quelques bousculades et mots doux envers la direction bien mérités ! La victoire est belle et il faut la savourer, ce que font les grévistes et leurs soutiens lors de la manifestation interprofessionnelle du 6 juin. Toutes les revendications ont été prises en compte et il y a même une garantie d’augmentation si inflation pour 2024 du fait de la NAO anticipées. Comme quoi, la grève avec du soutien et de la solidarité paie ! Comme le dit une préleveuse, « on est sorti de l’ombre grâce à la lutte et on ne se laissera plus faire ». Elle est même prête à soutenir, et elle encourage, les autres luttes sur des augmentations de salaires.

Il faut savoir continuer une grève !

Pour contre-paraphraser Maurice Thorez (figure du PCF à la sauce stalinienne et de la CGT) qui déclarait en juin 1936 peu après les accords de Matignon du Front populaire : "Il faut savoir terminer une grève dès que la satisfaction a été obtenue. Il faut même savoir consentir au compromis si toutes les revendications n’ont pas encore été acceptées mais que l’on a obtenu la victoire sur les plus essentielles revendications", souhaitons tout le contraire ! La lutte des travailleuses de Vertbaudet est une preuve supplémentaire que se mettre en mouvement dans la lutte des classes est le meilleur moyen d’activer les solidarités entre les personnes et de retrouver la conscience que ce sont les ouvrier-es qui font tourner la machine et pas les patrons ou les cadres … Elles le disent elles-mêmes, les grévistes sont devenues invincibles en tant que groupe mais aussi en tant qu’individu car la lutte a émancipé beaucoup de monde. Des femmes ont pris la parole, ont géré leur lutte sans rien lâcher et ont gagné aussi une lutte féministe. C’est par le mouvement social que les barrières tombent et que le féminisme peut entrer en action concrète au service des plus précaires, des plus concernées. On l’a vu d’ailleurs aussi pendant les gilets jaunes où de nombreuses femmes en situation monoparentale se sont retrouvées sur les ronds-points ou dans les manifestations et ont avancé leurs revendications.

La lutte ne doit donc pas se terminer et rester ancrée à la base. Avec la reprise du travail, il va falloir retisser des liens avec les non-grévistes qui, on l’espère, seront majoritairement reconnaissant-es des gains obtenus. Avec le temps, il faudra veiller à rester soudé-es face aux chefs qui voudront à un moment ou un autre reprendre le dessus. D’ailleurs rappelons que les patrons de Vertbaudet sont des ordures au service d’un fond d’investissement qui cherche uniquement à maximiser les profits sur le dos de celles et ceux qui travaillent. Continuer une lutte, c’est aussi prendre garde aux oripeaux du « dialogue social » où les syndicats se perdent et finalement ne défendent plus les travailleur-euses comme ce fut le cas dans la boîte avec FO et la CFTC – mais ça pourrait être d’autres syndicats.

Gardons en mémoire cette lutte, sa spontanéité à la base, pour qu’elle essaime et qu’elle nous donne la force collective pour mettre en place un vrai rapport de force. Collectivement, nous n’avons pas été assez forts pour contrer la réforme des retraites. Nous avons été baladés par une intersyndicale qui voulait respecter le calendrier politique de nos ennemis de classe. La bourgeoisie nous impose 2 ans de plus, à un moment ou un autre, il faudra leur faire ravaler leur fierté de dominant. Notre arme la plus efficace : la grève à la base, reconductible et la solidarité ! Gloire aux grévistes de Vertbaudet.

Lille, le 20/06/23

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