Pendant les vacances la lutte des classes...

Cet été, les luttes des travailleurs/travailleuses n’ont pas cessé. Loin de là. Grèves souvent locales, pour des augmentations de salaires, pour l’amélioration des conditions de travail … Grèves plus « défensives » : contre les licenciements, contre les délocalisations. Parfois à propos du contenu du travail : journal JDD, scénaristes Hollywood ou ouvriers fabriquant des locomotives aux USA. On peut noter une forme de radicalisation dans certaines luttes, avec aussi une extension de la solidarité au niveau des territoires de proximité. Il manque une généralisation de ces grèves. On peut tancer les vilaines bureaucraties syndicales pourtant très affaiblies… mais peut-être, manque-t-il surtout une perspective plus globale ? De ce point de vue, aux USA, la grève coordonnée entre les ouvriers de trois entreprises automobiles (General Motors, Stellantis, Ford) en ciblant les lieux de production où la bourgeoisie fait le plus de profit et avec des revendications unifiantes (Salaires, réduction du temps de travail etc…) est sans doute une perspective concrète dont nous devrions nous emparer dans des branches relevant des mêmes conventions collectives. Ce serait une étape pour construire une grève générale réelle et non incantatoire…

Nous en parlons régulièrement dans cette rubrique. Cela va faire 2 ans, que les piquets de grèves (Derichebourg / Chronopost) tiennent sur le front de la lutte des classes. Ils ne sont pas contentés de défendre leurs droits (régularisation de tous les participants réguliers aux piquets), mais ils n’ont pas manqué une occasion d’être présents et combatifs lors des manifestations parisiennes contre la contre-réforme des retraites. Nous reviendrons plus longuement lors d’un prochain CA sur cette lutte exemplaire. D’ores et déjà nous vous annonçons la sortie d’un livre consacré à cette lutte dont la saison 1 a eu lieu en 20191. C’est plus que jamais l’occasion de faire preuve de solidarité de classe en envoyant des dons, même modestes, aux caisses de grèves.

• Piquet DPD le Coudray-Montceaux https://www.cotizup.com/sanspapiersdpd
• Piquet Chronopost Alfortville https://www.cotizup.com/sans-papier...
  Pour plus d’infos https://www.facebook.com/Solidaires94/

40 heures par semaine pour 150€ par mois ! Emmaüs aurait promis la régularisation des sans papiers en échange de leur travail… Une délégation des piquets de grèves des DPD et CHONOPOST s’est rendue sur place pour exprimer la solidarité de classe. Une délégation des Emmaüs en a fait de même en direction des 2 piquets.

Les services de greffe (profession féminisée, invisibilisée, sans horaires fixes) ont fait grève pour obtenir des augmentations salariales. Depuis fin août des création de postes arrivent sur les greffes. Grève dans l’entreprise REFRESCO -Drôme- pour des augmentations de salaires et de meilleures conditions de travail. Idem dans plusieurs magasins Grand Frais ; les Thermes de Vichy ; le magasin IKEA de Dijon ; Intermarché Champigny sur Marne, Derichebourg La Réunion, SOCAT en Dordogne …

Cimenterie ARGOS en Guyane. 5 jours de grève contre le management de l’entreprise. Un protocole victorieux a été signé.

Les salariés de Lazer Propreté sous-traitants du nettoyage – Gare St Charles Marseille et RMT transports - se sont mis en grève contre les conditions de travail et le mépris des donneurs d’ordre. RMT a tenté une première fois de briser la grève en faisant appel à une autre boîte du nettoyage. Les grévistes sont intervenus physiquement et verbalement pour empêcher les « jaunes » de travailler. Finalement après 13 jours de grève un accord avait été trouvé. Mais la grève a repris, car les salariés dénoncent « la falsification des bulletins de salaires, la pression sur les salariés concernant les arrêts de travail, la fraude à la CPAM, de fausses déclarations auprès de l’URSAF, des impôts et de Pôle Emploi, du travail dissimulé. Cette fois les « jaunes » ont pu bosser sous escorte policière. L’Etat protège les patrons voyous...

L’annonce de la suppression de 187 postes aux papeteries de Condat en Dordogne a d’ores et déjà eu des conséquences tragiques. Cette suppression correspond à la fermeture / délocalisation d’une ligne de production. Un cuisinier employé par un sous-traitant s’est suicidé. Tout le bassin d’emploi est concerné : les carrières Omya ont annoncé un plan social. D’autres petites entreprises seront impactées. Plusieurs actions avec les habitants ont été engagées. La Région demande au groupe (espagnol) de rembourser les 19 millions d’€ obtenu en prêt à taux zéro. Prêt accordé à l’origine pour moderniser et maintenir l’emploi. L’entrée du site a été bloquée par les salariés qui se réunissaient régulièrement en AG de grève. Blocage qui concernait l’entrée des marchandises et matières premières, mais pas les salariés qui voulaient travailler. Après bien des épisodes de lutte et malgré des déclarations vindicatives de certains politiques et de syndicats, les grévistes ont décidé de lever le blocage qui durait depuis 17 jours. Les acquis seraient dans des meilleures conditions de départ à la retraite et des meilleures primes pour les licenciés.

Le tribunal de commerce de Dijon a prononcé la liquidation judiciaire de le l’entreprise. Laissant les 203 salariés de ce sous-traitant de Samsung sur le carreau. Les salariés ont décidé d’occuper l’entreprise pour ne pas rendre les produits de Samsung. C’est l’absence de partenariat (pourtant annoncé depuis plusieurs semaines) de Samsung qui a précipité la liquidation. Malgré les pression de Samsung, envoi tous les jours d’un camion avec service de sécurité, les salariés ont tenu le choc et ont bloqué les dernier modèle de portable fabriqués dans l’usine. Au 19 juillet, ils en étaient à 3 semaines de blocage.

Le 14 août les salariés de Clestra en étaient à leur 7ème semaine de grève dans cette usine de fabrication de cloisons de bureau. Les travailleurs dénoncent la dégradation des conditions de travail depuis la reprise de l’entreprise par le groupe Jestia. La secrétaire générale de la CGT est venue soutenir les salariés.

Après 40 jours de grève, les journalistes du JDD ont cessé la grève. Le motif, rappelons-le est l’arrivée à la tête de la direction, de Geoffroy Lejeune, ex-responsable de Valeurs Actuelles, et bien connu pour son engagement d’extrême droite. Certes l’ancienne version du JDD ne nous faisait pas frémir, mais ce conflit illustre plusieurs phénomènes. Un milliardaire d’extrême-droite, Bolloré (Vivendi), a pris le contrôle de nombreux médias : Canal+, I-Télé, Europe 1 etc. Cela nous vaut le triste sire Hanouna dans Touche pas à mon Poste… la disparition des Guignols de l’Info etc. Le processus est bien installé, puisque le groupe Bolloré-Vivendi a prévu de racheter Lagardère2. Les Macronistes, qui osent se présenter comme un rempart contre l’extrême-droite, ont montré leur sens du combat en étant les premiers à se faire interviewer par le nouveau JDD (Secrétaire d’Etat à la ville – Sabrina Agresti-Roubache). Rassurez-vous les députés Renaissance ont eu pour consigne de ne pas participer aux articles du JDD en attendant de voir si la ligne éditoriale est aussi inquiétante que celle du premier numéro. Premier numéro qui s’est déjà illustré par des articles écrits par des copains de Geoffroy Lejeune et une première page avec une « erreur » de photo concernant un fait divers.

Cela ferait un bon titre et scénario pour une série télé ! Depuis plusieurs mois, les scénaristes sont en grève pour une nouvelle convention collective et ont été rejoints par les acteurs. Les revendications portent sur pour l’obtention de garanties salariales et sur l’arrivée de l’Intelligence Artificielle. Selon eux, cette dernière menace leur avenir, notamment l’IA générative, qui permet de créer aisément des voix et images de synthèse très réalistes. Ce double mouvement social est inédit depuis 63 ans à Hollywood. Cette grève a provoqué l’arrêt de la quasi-totalité des productions cinématographiques et télévisuelles. Elle a perturbé les Emmy Awards et commencent à atteindre toute l’économie à Los Angeles. Ce mouvement bénéficie d’un large soutien d’acteurs connus (B. Pitt, M. Streep, G Clooney etc.), Jane Fonda les a soutenus lors de la présence de travailleurs de Starbucks sur un piquet de grève des scénaristes et acteurs devant les studios de Netflix. Si on compare avec l’absence, depuis 2 ans, d’artistes connus sur nos piquets de grève, en particulier quand ils sont en banlieue et tenus par des travailleurs sans-papiers, on enrage !

En grève pour des locomotives vertes
Les sections locales 506 et 618 des United Electrical, Radio and Machine Workers of America (UE) sont en grève depuis fin juin. L’une de leurs revendications a déjà capté l’attention du pays pour son rôle central dans la construction du pouvoir global des travailleurs.
Au-delà des revendications classiques (anti-disciplinaires etc.) Les revendications visent également à améliorer la société dans son ensemble. Il y a une autre revendication que les travailleurs ont mise en avant dans le processus de négociation : ils veulent que l’entreprise aide le syndicat à remporter une refonte verte de l’industrie des locomotives, dans le but global de réduire considérablement les émissions qui rejettent du carbone et de la pollution dans l’atmosphère. Evidemment, la direction de l’entreprise reste sourde… Comme quoi les principes écologiques, c’est pour les prolos, pas pour les orientations des propriétaires des moyens de production. L’écologie sera prolétarienne ou restera au niveau du discours culpabilisant.(1)

Insubordination Salariale
Juillet/août/septembre 2023

Notes
1 https://www.laboursolidarity.org/
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