Accueil > Courant Alternatif > *LE MENSUEL : anciens numéros* > Courant Alternatif 2023 > 331 juin 2023 > Vertement écolo 331

CA 331 juin 2023

Vertement écolo 331

mardi 27 juin 2023, par Courant Alternatif


{{Manif Stop Micro : les Verts aux abonnés absents

Il n’y avait aucune représentation d’EELV et de la piollesque mairie de Grenoble, (pas plus que leurs compères de LFI, à part un ou deux drapeaux) à la manifestation du premier avril contre l’extension de l’usine STMicro.
Ceci n’a pas échappé à Stop Micro qui a pointé cette absence dans le « Communiqué post-manif : Mais où étaient les Verts samedi ?! »(1).
C’est vrai quoi… Pourquoi n’étaient-ils pas là ?
Ils avaient pourtant clamé leur refus des méga-bassines (dont, comme les Soulèvements de la Terre, ils ignoraient l’existence il y a 3 ans, alors que les locaux luttaient déjà sur le terrain depuis plusieurs années), dénoncé l’accaparement des terres, et « L’avant-veille encore, jeudi 30 mars on a pourtant vu plusieurs élu·es et drapeaux au rassemblement contre les violences de Sainte-Soline. Ce même week-end, le maire de Grenoble était pourtant sensible au problème de l’eau, puisqu’il signait la tribune « Nous sommes les Soulèvements de la Terre » (tout comme la députée et conseillère municipale Nupes Élisa Martin) ».
En fait, les Verts et leurs alliés LFI ont choisi. Quelques « ... mois plus tôt, Eric Piolle se réjouissait de l’annonce de l’agrandissement de l’usine de STMicroelectronics ».
Pourtant la « défense de l’emploi » a bon dos. « Macron a annoncé cet été 2,3 milliards d’euros d’argent public pour 1000 emplois créés [soit 2,3 millions par emploi créé],… Pourquoi la « réindustrialisation » ne concerne que l’industrie high-tech énergivore et artificialisant le monde plutôt que des productions réellement utiles ? »
Et réalité, quand on a sur son territoire un des plus gros employeurs locaux (7000 et 1000 de plus avec la nouvelle usine), un Commissariat à L’Énergie Atomique qui fait la pluie et le beau temps dans la politique locale, un maire, Piolle, ancien cadre dirigeant de Hewlett-Packard (entreprise matrice des géants de la Silicon Valley dès les années 30/40), faut pas mordre la main qui te nourrit.    Pas plus que la couche sociale qui fait ta base électorale : les patrons, cadres, ingénieurs et techniciens des deux sexes, de la Tech grenobloise.
S’y ajoutent une conception du monde et une gestion municipale très, très, libérale, technophile et solutionniste (il n’y a pas de problème, que des solutions) qui se manifeste par la fermeture des bibliothèques de quartier et le développement la bibliothèque numérique la « Numothèque », le développement fulgurant du paiement sans contact ou par smartphone dans les transports en commun… le développement de la vidéo-verbalisation automatisée pour la future ZFE…
Leur « transition écologique » fait peur !
En passant : s’il est vital de combattre les agro-industriels affairistes, pollueurs et destructeurs de l’environnement, il ne faudrait pas oublier du fait d’un effet de loupe (et de mode) les conséquences tout aussi désastreuses de l’activité industrielle et de la technophilie (qui irriguent l’ensemble des secteurs d’activités) sur l’ensemble du vivant et l’environnement.

{{Shein, Shit and Shame

L’apparition de la marque de vêtements « Shein » a permis de remettre en lumière les ravages planétaires de la « Fast fashion » qui ne se limitent pas aux produits à bas prix de cette entreprise chinoise du Web dont la cible est la consommatrice, jeune voire très jeune.
Zara, et bien d’autres, s’enrichissent grâce à ce modèle économique qui consiste à faire acheter toujours plus souvent, en plus grande quantité, des vêtements de merde (Shit : des vêtements de merde en plastique, tellement mal fabriqués qu’on ne peut ni les laver, ni les porter plus de 4 ou 5 fois)(2) et de honte (Shame : pour les conditions de fabrication et de travail)(3), partout sur la planète.
Heureusement pour la tranquillité d’esprit des fabricants et des consommateurs et consommatrices, des filières de récupération et de ré-utilisation responsables ont été mises en place.
Qui ne connaît pas les boîtes blanches du « Relais » avec ses salariés précaires en contrat d’insertion ?
Une faible partie des vêtements (la meilleure qualité) repart dans les circuits d’occasion locaux, une autre partie est revendue à l’industrie du chiffon et de l’isolation thermique, mais la majeure partie est mise en ballots non triés et expédiés par bateaux au Kenya.
En 2021, 900 millions de vêtements y ont été exportés, « 150 millions proviennent d’Europe et du Royaume-Uni, majoritairement des dons. »(4)
Les commerçants locaux achètent des lots de ballots et, c’est ballot, découvrent seulement à l’ouverture ce qu’ils contiennent. Et là c’est désespérant pour le commerçant : il y a de plus en plus de vêtements en plastique    et/ou de trop mauvaise qualité pour être revendus.
Résultat : 300 millions de vêtements sont brûlés ou envoyés à la décharge. Cela entraine une pollution massive de l’air, des sols et des eaux et provoque des maladies.
Pourtant, les exportations de matières plastiques sont officiellement interdites. Pourtant, il est interdit d’exporter des déchets vers des pays ne disposant pas des infrastructures suffisantes pour les traiter. Pourtant, cela continue car la méga-machine du capitalisme doit continuer à tourner, coûte que coûte.
Toute la chaîne de l’industrie du vêtement est une catastrophe écologique et sociale.
La culture du coton est très gourmande en eau (voir l’assèchement des cours d’eau d’Asie centrale) et en produits chimiques divers et variés, tout comme la fabrication des tissus.
Globalement, les conditions de vie des travailleuses du secteur (c’est très genré, la couture) sont épouvantables dans la Fast Fashion.
Mais c’est à peu près la même chose dans le haut de gamme. Les conditions de travail des couturières polonaises, slovaques, des Balkans et d’Ukraine qui fabriquent ces vêtements à forte valeur ajoutée sont terribles : salaires misérables justifiés par les institutions de l’UE et le FMI qui n’hésitent pas à « recommander une baisse des salaires minimaux légaux, comme indiqué dans le rapport de l’OIT consacré en 2011 à l’impact de la crise sur les salaires dans le Sud-Est de l’Europe ». Résultat : « Depuis 2013, la Bulgarie, la Macédoine et la Roumanie possèdent des salaires minimaux légaux inférieurs à la Chine. » et les ouvrières gagnent « 10 % à 36 % du salaire vital estimé. »
Chez Hugo Boss, en Pologne, elles travaillent pour un salaire inférieur au minimum légal.
On peut mettre dans le même sac, la mode dite éthique et responsable.
Cette mode en toc se prétend vertueuse en relocalisant les productions. Résultat : en Pologne en 2022 les ouvrières triment dès 6 heures du matin et en une heure elles fabriquent 530 poignets de chemises, 9 par minute toute la journée ! Et pas question de partir avant d’avoir fait son quota ! Le tout pour 450 € mensuels et des heures sup non payées.
En France et dans d’autres pays hautement développés, on entend le refrain insistant de la nécessaire relocalisation des industries, des mines et des services. Capitalistes macronistes, souverainistes ou nationalistes y voient soudainement un gage de souveraineté et d’indépendance.
Que croyez-vous qu’il risque de se passer quand cela se développera ?
Après des dizaines d’années d’exportation des « externalités négatives » (pollutions) vers les Suds, comment faire face aux concurrences étrangères ? L’environnement, les salaires et les conditions de travail seront une fois de plus les seules variables d’ajustement.
Et Macron a ouvert le bal en demandant une « pause » pour de nouvelles normes environnementales européennes, pour faire face à la concurrence des méchants.
Il a déjà préparé le terrain en détruisant lentement mais systématiquement un bon nombre de normes environnementales et sociales existantes.

Freux et Eugene the Jeep

Notes
1 - Disponible sur <https://stopmicro38.noblogs.org/> , avec (entre autres) un texte sur la pollution cachée des eaux de surface par STMicro.
2 - Pour en découdre avec la surproduction. Dossier de presse. Les Amis de la Terre France. 2022
3- Living wages now ! Clean Clothes Campaign. 2015. Rapport en français qui documente l’exploitation féroce des travailleuses de la couture et leurs luttes : Cambodge, Hong Kong, Haïti, Italie et Europe.
4 - Seconde main : 300 millions de vêtements exportés au Kenya "brûlés ou jetés" en 2021. Matthieu Guinebault. Fashion network. 2023. Cette vitrine de l’industrie de la mode qui a forcément des pulsions éthiques et renouvelables reprend le rapport « Trashion » publié par les Amis de la Terre.

Répondre à cet article


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette