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CA 334 novembre 2023

Relancer le mouvement antinucléaire

lundi 13 novembre 2023, par Courant Alternatif

Le gouvernement a claironné une relance du nucléaire tant civil que militaire. Au-delà de l’effet d’annonce, au-delà des interrogations importantes sur sa faisabilité tant technique que financière, du moins pour la filière civile, les antinucléaires doivent se réveiller pour empêcher cette aberration mortifère.


Toute cette année a été marquée par une tentative de (re)construction du mouvement antinucléaire. Cela a démarré avec le « grand débat national » sur la relance du nucléaire. Vous n’avez probablement jamais entendu parler de ce débat, qui était une obligation légale, et sur lequel le gouvernement ne souhaitait surtout pas faire trop de publicité. Ce débat comportait plusieurs dates, en visio et chaque fois dans une ville différente. En novembre 22, il avait lieu à Paris, et les antinucléaires rassemblés là, venus surtout de la Hague et de Bure, ont décidé de tenir une assemblée générale le lendemain. Nous avons décidé de choisir une des dates de ce pseudo-débat comme lieu de convergence nationale. C’est Tours qui a été choisi pour sa position centrale. Le débat devait y avoir lieu en février dernier. Le gouvernement a choisi de l’annuler. Et, ô surprise, nous étions quand même environ 150 venu·es en gros de toute la partie nord de la France pour perturber un débat dont on savait qu’il n’avait plus lieu, mais surtout pour nous rencontrer. L’assemblée antinucléaire était lancée.

A Paris, puis à Bure...

Elle s’est poursuivie à Paris le 3 juin, avec encore un peu plus de monde, et à Bure le 8 juillet avec moins de monde. C’est là que le nom « coordination nationale antinucléaire » a été choisi. Ce choix n’est peut-être pas judicieux ; en effet, il n’y a pas encore de mouvement réel à coordonner, mais le nom n’est sans doute pas le plus important. Ce qui est important, c’est la volonté des différents courants antinucléaires de tenter de travailler ensemble pour s’opposer à la relance. Et on part de loin ! Je ne fais pas seulement allusion aux divergences, qui perdurent, naturellement, mais à notre faiblesse et au fait que la lutte antinucléaire qui était un point de contestation majeur a quasiment disparu et de l’agenda écolo de la jeunesse et des mouvements contestataires en général. Ces réunions se sont poursuivies au Larzac pendant les Résistantes, le 6 août, avec beaucoup de monde ; c’est là que sa création a été connue publiquement grâce à un article (assez fallacieux) de Reporterre, et à Bure le 26 août.
Il a été réfléchi, en juillet, ce qu’on pouvait faire en commun contre la relance du programme nucléaire. On va essayer de monter en puissance tout au long de l’année. La première apparition devait être en se joignant à la journée pour l’abolition de l’arme nucléaire, le 23 septembre. Cela a posé deux problèmes. D’une part, il y avait aussi ce jour-là la manifestation contre les violences policières – certains rassemblements ont été déplacés pour pouvoir participer aux deux. D’autre part, malgré qu’ils soient demandeurs de notre soutien, les opposants au nucléaire militaire n’étaient pas vraiment prêts à tolérer un discours contre le nucléaire civil. A Paris en tous les cas, ils ont été obligés de le subir. La journée commune suivante aura lieu le 22 octobre, sur le thème de la pollution nucléaire. Au Larzac, les ateliers ont eu lieu par région, et une structuration régionale a donc été lancée. Chaque région déterminera de la forme de cette journée.

Coordination antinucléaire « carton rouge au nucléaire » - Bure, Maison de la Résistance, 8 juillet 2023

Contrairement à ce qu’a annoncé Reporterre, le mouvement antinucléaire n’est pas réunifié. Mais l’idée est qu’en travaillant localement en commun, on arrivera à retisser des liens et sans doute à se rapprocher. Pour le moment, on en est à se construire et à tenter de construire un mouvement, une mobilisation capable de perturber la relance du nucléaire, avec peut-être un lieu central, dans un événement qui aura lieu début juin 2024. On est contraints par les dates des Jeux olympiques, pendant lesquels toutes les mobilisations seront interdites.

Un cadre de coordination à définir

Le cadre précis de cette coordination antinucléaire n’a pas encore été défini, ce devrait être fait à la prochaine assemblée, en décembre. Le fonctionnement est pour le moment très souple. Il n’y a pas de porte-parole, un groupe de travail tournant de contacts avec la presse est défini à chaque assemblée. Chaque région s’organise comme elle le souhaite et comme elle le peut.
La situation actuelle est très paradoxale. D’un côté le programme de relance du nucléaire est complètement irréaliste, en tous les cas pour la filière civile, quand on voit qu’ils n’arrivent à résoudre aucun de leurs problèmes techniques (corrosion, fissures…) ni financiers, qu’en plus ils viennent de perdre une de leurs sources d’uranium au Niger. Le programme nucléaire civil dans le monde continue de décliner et est donc de plus en plus marginal. De l’autre, il y a un rouleau compresseur politique et médiatique en France qui ignore totalement ce qui se passe dans le reste du monde et présente le nucléaire comme une énergie écolo, et le mouvement antinucléaire est moribond. Il suffirait peut-être de pas grand-chose pour faire vaciller une filière qui a fait la preuve de son inefficacité énergétique (on attend toujours qu’un EPR produise de l’électricité), de son coût faramineux (cf. l’état d’endettement d’EDF) et de sa dangerosité. Une filière qui, contrairement aux affirmations des Jancovici et consorts, aggrave le dérèglement climatique et ses conséquences (c’est une filière très gourmande en eau qui pollue tous les grands fleuves [1]), tant physiquement par son mode de production d’énergie que par le monde productiviste et capitaliste auquel il est indissolublement lié.

Sylvie, le 19 octobre

Note
1. Cf. « Le nucléaire nous pompe l’eau ! », Courant alternatif n° 330, mai 2023.

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