CA 344 novembre
lundi 25 novembre 2024, par
Du 12 au 18 septembre, la clinique du parc de Belleville, dans le 20e arrondissement de Paris, était en grève. Toutes professions confondues et malgré les difficultés inhérentes au secteur de la santé, 50 % de son personnel avait cessé le travail et il y avait un piquet animé devant l’établissement.
Cette clinique privée est gérée par le groupe CLINEA EMEIS (« ensemble », en grec), anciennement ORPEA. Ce groupe a été frappé par un énorme scandale, mis entre autres à jour en 2022 grâce au livre-enquête Les Fossoyeurs de Victor Castanet, qui travaille à présent sur le scandale des crèches privées. Suite aux révélations sur les conditions de travail de ses salariés et sur les conditions de prise en charge des personnes âgées qui lui étaient confiées, ORPEA a dû changer de nom pour se faire oublier. Mais, au-delà de la communication et des slogans ronflants : « L’engagement pour l’humain, le goût pour la vie, la soif d’apprendre, l’esprit d’entraide ! », a-t-il changé ses pratiques ?
Pour les grévistes de la clinique du parc de Belleville, c’est leur première grève. Personne n’est syndiqué, mais tout le monde est déterminé et plein d’énergie. « Y en a marre que les chiffres prévalent sur les besoins ! » Leur force : unis en interpro, ils et elles prennent les décisions ensemble en assemblée générale. Ce mouvement local compte bien peser sur les NAO (négociations annuelles obligatoires) qui ont lieu fin septembre, pour augmenter les salaires. Pour l’heure, il s’agit de créer des embauches, mais en face EMEIS répond toujours que ses poches sont vides ; il y a toujours trop de personnel, ce qui renvoie la responsabilité de la situation sur la masse salariale alors que la boîte réalise des bénéfices. La croissance annuelle du groupe depuis 2024 est de 11% . Réduire les coûts pour gagner plus ! Dans les structures, le matériel est manquant ou défectueux. Un bâtiment est vétuste avec des réparations qui tardent, des fuites dans les chambres, des moisissures. Quatre étages, et seulement trois infirmières de nuit. Aucune formation, et pourtant elle est due. Bref, un état des lieux déplorable.
Avant de commencer leur mouvement, les grévistes se sont demandé ensemble jusqu’où ils et elles étaient prêts à aller pour gagner. Ils et elles ont distribué des tracts dans les étages, pour en parler aussi avec les 94 résidents et leur expliquer leurs revendications. Tous les résidents les ont soutenus, et poussés à aller jusqu’au bout. C’est eux qui leur ont donné l’idée de faire une pétition et une cagnotte. Ça les a renforcés, motivés.
« Je suis ergothérapeute depuis plus de deux ans. J’ai pris la décision avec mes collègues d’être en grève, c’est pas forcément un plaisir, mais on n’a pas eu tellement le choix. Quand on n’a pas de direction et quand on n’est pas écoutés par nos employeurs, c’est pas facile de travailler. Je suis confronté quotidiennement à la détresse des soignantes et aux dysfonctionnements. On fait tous cette grève pour améliorer aussi les conditions de vie et de travail de nos collègues dans les étages, aux cuisines, de tous. »
« Moi je suis élue au CSE [comité social et économique] régional, salariée d’EMEIS à Clamart. Je viens prêter renfort. Les constats sont partagés au niveau national, et j’espère que ce mouvement fera tache d’huile et motivera les autres. Ça fait dix ans qu’il n’y a pas eu de contestation. Sans mémoire de lutte, les salariés pensent qu’ils et elles ne peuvent rien faire. C’est inspirant, il y a le soutien du syndicat, une cagnotte a été mise en place. Etre en lutte, c’est concret et on n’est pas seul. Il ne suffit pas de se plaindre, il faut aller demander des comptes. »
« Je suis kinésithérapeute, nouvellement élue au CSE, du coup j’ai pu visiter d’autres cliniques où j’ai pu voir que nous étions confrontés aux mêmes problématiques. Devant le refus systématique de la Cette clinique privée est gérée par le groupe CLINEA EMEIS (« ensemble », en grec), anciennement ORPEA. Ce groupe a été frappé par un énorme scandale, mis entre autres à jour en 2022 grâce au livre-enquête Les Fossoyeurs de Victor Castanet, qui travaille à présent sur le scandale des crèches privées. Suite aux révélations sur les conditions de travail de ses salariés et sur les conditions de prise en charge des personnes âgées qui lui étaient confiées, ORPEA a dû changer de nom pour se faire oublier. Mais, au-delà de la communication et des slogans ronflants : « L’engagement pour l’humain, le goût pour la vie, la soif d’apprendre, l’esprit d’entraide ! », a-t-il changé ses pratiques ?
Pour les grévistes de la clinique du parc de Belleville, c’est leur première grève. Personne n’est syndiqué, mais tout le monde est déterminé et plein d’énergie. « Y en a marre que les chiffres prévalent sur les besoins ! » Leur force : unis en interpro, ils et elles prennent les décisions ensemble en assemblée générale. Ce mouvement local compte bien peser sur les NAO (négociations annuelles obligatoires) qui ont lieu fin septembre, pour augmenter les salaires. Pour l’heure, il s’agit de créer des embauches, mais en face EMEIS répond toujours que ses poches sont vides ; il y a toujours trop de personnel, ce qui renvoie la responsabilité de la situation sur la masse salariale alors que la boîte réalise des bénéfices. La croissance annuelle du groupe depuis 2024 est de 11% . Réduire les coûts pour gagner plus ! Dans les structures, le matériel est manquant ou défectueux. Un bâtiment est vétuste avec des réparations qui tardent, des fuites dans les chambres, des moisissures. Quatre étages, et seulement trois infirmières de nuit. Aucune formation, et pourtant elle est due. Bref, un état des lieux déplorable.
Avant de commencer leur mouvement, les grévistes se sont demandé ensemble jusqu’où ils et elles étaient prêts à aller pour gagner. Ils et elles ont distribué des tracts dans les étages, pour en parler aussi avec les 94 résidents et leur expliquer leurs revendications. Tous les résidents les ont soutenus, et poussés à aller jusqu’au bout. C’est eux qui leur ont donné l’idée de faire une pétition et une cagnotte. Ça les a renforcés, motivés.
Témoignages :
« Je suis ergothérapeute depuis plus de deux ans. J’ai pris la décision avec mes collègues d’être en grève, c’est pas forcément un plaisir, mais on n’a pas eu tellement le choix. Quand on n’a pas de direction et quand on n’est pas écoutés par nos employeurs, c’est pas facile de travailler. Je suis confronté quotidiennement à la détresse des soignantes et aux dysfonctionnements. On fait tous cette grève pour améliorer aussi les conditions de vie et de travail de nos collègues dans les étages, aux cuisines, de tous. »
« Moi je suis élue au CSE [comité social et économique] régional, salariée d’EMEIS à Clamart. Je viens prêter renfort. Les constats sont partagés au niveau national, et j’espère que ce mouvement fera tache d’huile et motivera les autres. Ça fait dix ans qu’il n’y a pas eu de contestation. Sans mémoire de lutte, les salariés pensent qu’ils et elles ne peuvent rien faire. C’est inspirant, il y a le soutien du syndicat, une cagnotte a été mise en place. Etre en lutte, c’est concret et on n’est pas seul. Il ne suffit pas de se plaindre, il faut alledirection d’écouter nos revendications, de prendre en compte notre pétition, signée par 70% des salariés (CDI et CDD confondus), j’ai décidé de participer avec mes collègues à l’organisation d’une action locale, de taper fort avant les NAO. C’est pas facile dans les métiers du soin de se mettre en grève, c’est pour ça qu’il n’y a pas eu dans le mouvement d’infirmiers ou d’aide-soignantes, notre éthique professionnelle nous joue des tours. »
« Je suis kinésithérapeute, à la clinique de Belleville depuis un an. Et depuis nos demandes répétées d’avoir des aide-soignants de nuit, le remplacement du matériel défectueux, rien ne change. J’ai signé pour ce travail car il y a une très bonne équipe, très jeune et motivée, qui a envie de bien travailler, et on est frustrés car on n’a pas les moyens nécessaires. Nos métiers s’entrecroisent : si les patients ne sont pas prêts, s’ils ne sont pas lavés, je ne peux pas faire mon travail. »
« Je suis rééducateur sportif, il n’y a qu’un seul brancardier, depuis des années. Il ne peut pas amener tout le monde dans les différentes activités, du coup c’est nous qui le faisons. On fait du “glissement de tâche”, qu’ils disent, et on remplit une mission qui n’est pas la nôtre. Après deux jours de grève, ils ont proposé un mi-temps de brancardier à l’essai ! »
« Je suis commise de cuisine depuis douze ans et je touche 50 euros de plus que le smic. On est trois, donc pas assez nombreux. Je me battais seule ; quand j’ai vu qu’il y avait un mouvement avec la CGT, on les a suivis. A la cuisine, on est une équipe soudée qui ne lâche pas. »
Comme le plus souvent, ce sont eux, les plus exploités, qui ont été le plus déterminés.
Nadia M.
Vous pouvez écouter sur l’actualitedesluttes.info l’émission du 17 septembre 2024 consacrée à cette grève.